L'étude dirigée par Camilo Mora, biologiste à l'université de Californie à San Diego se fonde sur l'analyse de la gestion des pêcheries dans 236 zones économiques exclusives. Les Etats côtiers ont le droit d'exploiter les ressources marines dans ces zones, qui s'étendent jusqu'à 370 kilomètres de leurs côtes, en vertu de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.
Seulement 7% de l'ensemble des pays étudiés ont fondé leur politique de pêche sur des données scientifiques fiables tandis que moins de 1% se sont dotés d'un mécanisme qui permet de s'assurer que les pêcheurs respectent les règles, selon les chercheurs. L'étude montre également qu'aucun pays étudié ne gère la "durabilité" de ses pêcheries.
Ce constat d'échec intervient malgré l'existence d'une série de textes internationaux visant à protéger les ressources marines, dont le Code de conduite de la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) pour une pêche responsable et la Convention sur la diversité biologique.
« La situation est mauvaise partout », résume Camilo Mora. « Aujourd'hui, nous voyons les pêcheries décliner en raison d'une mauvaise régulation des activités de pêche dans de nombreux pays développés, y compris l'Union européenne, les Etats-Unis et le Canada", explique-t-il. "Si la surexploitation due à la mauvaise gestion a lieu dans les pays développés, quelles sont les chances que les pays pauvres avec leurs diverses insuffisances en matière d'alimentation, de richesses et de gouvernance fassent mieux? »
Les capacités de pêche en excédent dans les pays du Nord (carte de gauche) sont "exportées" dans les pays du Sud, et tout particulièrement en Afrique de l'Ouest, l'Océan Indien et Asie du Sud-Est (carte de droite)
Les pays développés sont mieux lotis sur le plan scientifique et le respect des lois, mais ils laissent souvent les pressions politiques et les considérations économiques prendre le pas dans leurs politiques de pêche. Beaucoup ont des flottes modernes qui ont bénéficié de subventions, ce qui se traduit par une surcapacité et une surpêche.
De leur côté, les pays pauvres ont vu leurs politiques de pêche affaiblies par la corruption et la vente de droits de pêche aux flottes étrangères provenant d'Asie, des Etats-Unis et d'Europe. Il existe souvent peu de limites sur le volume des prises de ces flottes et peu de contraintes pour réguler leur activité.
« La transparence de la prise de décision est au coeur du problème », souligne Marta Coll, co-auteure de l'étude et chercheuse à l'université Dalhousie à Halifax (Canada) et à l'Institut des sciences de la mer en Espagne. Si les réglementations de pêche « sont fortement influencées par les pressions politiques ou la corruption, il est peu probable que de bonnes recommandations scientifiques conduisent à des règles adaptées ».
« L'étude souligne le rôle essentiel que la pauvreté et les systèmes de gouvernance jouent dans le déclin de la durabilité des pêcheries », souligne Joshua Cinner, un chercheur de l'université James Cook en Australie, qui n'a pas participé aux recherches. Ce constat est « très cohérent avec un article que nous avons récemment publié, montrant que le développement économique était le principal moteur de la surpêche dans les récifs coralliens de l'ouest de l'océan Indien. »
L'industrie de la pêche au thon constitue un exemple typique de la manière dont les intérêts économiques l'emportent sur l'avis des scientifiques quand il s'agit de limiter les prises. Dans le monde entier, les commissions chargées de réglementer le secteur sont accusées par les écologistes d'autoriser des quotas de pêche qui conduiront à terme à l'extinction de la ressource.
Les scientifiques ont par exemple recommandé une limitation des prises à 15.000 tonnes par an pour le thon rouge en Méditerranée. Pourtant, la Commission internationale pour la Conservation du thon de l'Atlantique (CICTA) a autorisé en novembre un quota de 22.000 tonnes par an et a aussi autorisé la pêche durant les mois de frai des poissons, une période cruciale pour leur reproduction. Source : AFP
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30 août 2011 : Affrontement des biologistes outre-atlantique !
La guerre des pêches
Y aura-t-il encore des pêcheurs en 2050 ? C'est la question que se posent depuis une quinzaine d'années les biologistes marins. Deux écoles s'affrontent: ceux qui jugent que la surpêche est irréversible ; et ceux qui pensent que la gestion scientifique, notamment aux États-Unis, peut rendre la pêche durable. La bataille entre les deux camps fait des étincelles.
Depuis la fin des années 90, un groupe de chercheurs nord-américains crie sur tous les toits que les pêcheries mondiales se dirigent tout droit vers le précipice. Au milieu du XXIe siècle, préviennent-ils, les pêcheurs du monde devront accrocher leurs filets et trouver un autre métier.
La contre-attaque est venue il y a cinq ou six ans : pour contrer l'«alarmisme» de leurs confrères, des biologistes ont montré que la gestion moderne des pêches peut renverser la vapeur et que, aux États-Unis, l'immense majorité des espèces pêchées n'est plus en danger d'extinction.
Des chercheurs des deux groupes ont récemment tenté de faire la paix. Mais les plus tenaces refusent d'enterrer la hache de guerre. « Ce sont des âneries ! », tonne Daniel Pauly, de l'Université de la Colombie-Britannique, quand on lui demande son avis sur les études optimistes. « Ceux qui disent que la surpêche a été exagérée font le jeu des industriels qui veulent affaiblir les règlements existants et éviter qu'on les resserre dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique. »
Selon Gabriella Bianchi, coordonnatrice du secteur des pêcheries à la FAO : «Tout le monde s'accorde à dire qu'il y a un problème grave de surpêche dans la plupart des régions. Mais il existe des pays occidentaux où la surpêche a disparu, et il faut le reconnaître.»
Texte intégral de Mathieu Perreault dans La Presse : La guerre des pêches
Un reportage d’Ismeni Walter sur ARTE - vendredi 21 octobre 2011 à 22h40
Un reportage catastrophe ?
Malgré une apparente abondance, les poissons des océans représentent une ressource limitée. Ce documentaire montre l'urgence de faire évoluer les modes de production vers une pêche durable.
Chaque année, 90 millions de tonnes de poisson sont pêchées sur la planète. Cette ressource, que l'on croyait renouvelable, et donc inépuisable, est en réalité menacée. En effet, plus de 85% des poissons remontés dans les filets sont rejetés morts à la mer - et ne sont pas comptabilisés dans les quotas de pêche. Si la pisciculture semble à première vue une bonne solution, elle consomme en réalité plus de poissons qu'elle n'en produit : pour 1 kg de poisson d'élevage, il faut pêcher 5 kg d'espèces sauvages, transformées ensuite en farine. Sans compter la pollution qu'occasionne l'aquaculture... Les réglementations suffisent-elles pour sortir du cercle vicieux de la surpêche, qui bouleverse les écosystèmes ? De l'avis des experts, il existe des solutions pour mettre en place une pêche durable. Ce documentaire mène l'enquête de manière rigoureuse, dans plusieurs pays, pour dévoiler des réalités méconnues du public.
Le dernier poisson de l’artisan-pêcheur. Quel bel avenir pour la pêche industrielle !
De leurs côtés, les économistes Gunnar Haraldsson et David Carey tablent sur le dernier poisson pour les pêcheurs artisanaux avec la fin des stocks gérés en commun et ils prévoient un bel avenir pour la pêche industrielle avec la privatisation des ressources halieutiques dans un article publié en septembre 2011 par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economiques) : « Ensuring a Sustainable and Efficient Fishery in Iceland » (Garantir une pêche durable et efficace en Islande)
Alain Le Sann du Collectif Pêche et développement : « L’indécente promotion des QIT par l’OCDE »
En 2009, le scientifique islandais Jon Kristjansson écrivait sur son site : « Je soupçonne la « science » d’être un outil pour établir des restrictions telles que le système des quotas puisse être maintenu, La réduction des débarquements mène à des prix plus élevés du poisson et plus d’argent pour les propriétaires de quotas qui les louent…La science est utilisée pour faire peur comme le pape au Moyen Age : « Qui sera responsable de la capture du dernier poisson ?»
La publication par l’OCDE d’un bref rapport à la gloire du modèle islandais de gestion par les QIT illustre parfaitement l’analyse de Jon Kristjansson. Il vient à point pour conforter les propositions de réforme de la PCP, il montre aussi très clairement quels seront les résultats de la mise en œuvre des QIT en Europe et l’aboutissement d’une gestion centrée non sur la ressource mais sur la recherche du profit maximum.
Les QIT entraînent la baisse des TAC (taux admissible de captures)
Le rapport s’intitule « Ensuring a sustainable and efficient fishery in Iceland » et a été rédigé par Gunnar Haraldson et David Carrey, deux chercheurs de l’OCDE. Il commence par vanter l’efficacité du système des QIT pour assurer la pérennité des stocks, ce qui paraît d’ailleurs curieux parce que leur propre graphique montre que la gestion par les QIT a abouti à diviser les captures de morue par deux en 25 ans, de 300 000 T à 150 000 T. Ils se félicitent en effet de ce résultat parce que les QIT créent une pression politique en faveur d’une limitation des TAC, favorable à une meilleure valorisation des quotas. Ils se félicitent également d’une augmentation de la taille moyenne des bateaux, gage, selon eux, d’une meilleure efficacité. Cette limitation des TAC, associée à l’augmentation de la taille des bateaux, permet d’accroître la rente.
Logiquement les QIT condamnent la pêche artisanale...
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