Vers l'interdiction des rejets en mer ! Mais comment ?

Vers l'interdiction des rejets en mer ! Mais comment ?

Le 1 mars 2011, Maria Damanaki, commissaire européenne en charge de la pêche, a annoncé vouloir interdire les rejets en mer de poissons morts, dénoncés comme un gaspillage des ressources naturelles.

« J'envisage de proposer une interdiction des rejets dans le cadre de mes propositions de réforme de la politique commune de la pêche » d'ici quelques mois, a déclaré Mme Damanaki lors d'une réunion à Bruxelles réunissant des représentants des pays européens concernés et du Parlement européen.

« Jusqu'ici, nous avons tenté de nous attaquer au problème par des mesures techniques. Mais soyons honnêtes, si nous continuons comme ça, ce sera comme de traiter une maladie grave avec de l'aspirine », a commenté Mme Damanaki. De fait, la pêche aux poissons plats en Europe produit plus de 70% de rejets, a-t-elle dénoncé. « Les rejets ne sont pas éthiques, ils représentent un gaspillage des ressources naturelles, comme des efforts des pêcheurs ».


L'idée serait d'adopter une "approche graduelle", a-t-elle souligné, en commençant par exemple par les espèces pélagiques (anchois, maquereau, thon rouge), puis aux poissons des grands fonds, en élargissant la liste des espèces concernées d'année en année, a précisé la commissaire.

La question est toutefois très complexe, a-t-elle admis, soulignant qu'il fallait choisir de quelle manière mettre en oeuvre cette interdiction. Une solution pourrait être de déduire les prises des quotas de pêche afin d'encourager les pêcheurs à développer des techniques plus sélectives… « Nous devons dire que notre industrie de la pêche fait aussi des efforts. En fait, l'industrie l’a bien compris en prenant des mesures telles que la conception d’engins plus sélectifs. Il y a beaucoup de bons exemples comme le projet de 50% au Royaume-Uni, le projet de langoustines dans le Golfe de Gascogne ainsi que des projets en Suède et au Danemark…. »

Selon l'eurodéputé conservateur breton Alain Cadec, « contrairement à la Commission, qui propose d'interdire les rejets de manière radicale et sur un très court terme, ce problème doit être traité sur le moyen terme en relation étroite avec les pêcheurs et les scientifiques ». Alain Cadec a le sentiment que Mme Damanaki "nous a entendus". La commissaire a promis de tenir compte des remarques des participants dans l'élaboration de sa proposition.

Sources : Rejets: défi majeur dans la réforme de la politique des pêches (Europa) et Bruxelles veut bannir les rejets en mer de poissons morts (AFP)

Autres articles :

Pour aller plus loin...

1 million de tonnes de rejet en Mer du Nord

1 million de tonnes de rejet en Mer du Nord pour ne garder que le bon poisson (bonne valeur commerciale) et coller aux quotas de pêche…

Lire l’article de CTA et les deux liens avec deux bons articles anglais, Time et Guardian :

L'UE discute des quotas de pêche

Les quotas de pêche de l'Europe sont conçus pour protéger les eaux européennes contre la surpêche. Ce sont toutefois des instruments imparfaits et l'une de leurs conséquences involontaires est qu'elles obligent souvent les pêcheurs à rejeter dans l'océan d'énormes quantités de poissons morts en surplus. Mardi, les ministres de la pêche des États membres de l'UE se sont réunis pour discuter de la manière de mettre un terme à cette pratique. La commissaire européenne chargée de la pêche, Maria Damanaki, a déclaré aux ministres qu'ils devraient introduire progressivement une interdiction totale du rejet en mer. Actuellement, on estime à environ 1 million de tonnes le volume de poissons rejetés chaque année dans la seule mer du Nord. Ce qui signifie des « rejets cauchemardesques », a déclaré Mme Damanaki au Guardian avant la réunion….Suite dans CTA

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Le 31 mai 2011

Malgré les précautions prises, la pêche à la crevette en mer du Nord génère 78% de prises accessoires

Il existe une pêche qui produit 78% de prises accessoires (ainsi des poissons rejetés en mer) malgré l’emploi d’engins de pêche sensés éviter une grande partie de ce gâchis ; une pêche qui est envoyée au Maroc pour y être conditionnée avant d’être vendue sur le marché européen; une pêche, enfin, dominée par deux sociétés qui concentrent 80% du marché.

De quelle pêche s’agit-il ?

Réponse: De la pêche industrielle à la crevette grise en mer du Nord.

Apprenez tout à son sujet dans la nouvelle étude spéciale : « La pêche à la crevette grise de mer du Nord » , commandée par la Commission de la pêche, et publiée mercredi au Parlement européen.

Une deuxième étude a été publiée le même jour : « La pêche industrielle en mer Baltique. »

Source : cfp-reformwatch.

Studies on North Sea shrimp fishing and Industrial Fishing in the Baltic

Two very interesting studies, coordinated by the EP Policy Department for structural and cohesion policies, have been presented in PECH Committee on 25 May, focusing in particular on different aspects of the brown shrimp fisheries in the North Sea (mainly in the Netherlands, Germany and Denmark) and on the perspectives and problems of industrial fisheries in the Baltic Sea. The full studies can be requested from the PECH Secretariat.




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Les rejets de la pêche en mer du Nord: un gaspillage de ressources ou un mal nécessaire ?

Fisheries Discards in the North Sea : Waste of Resources or a Necessary Evil ?

Etude publiée dans Reviews in Fisheries Science

Auteurs : Ben Diamond et Bryce D. Stewart-Beukers (The University of York)

Publié le 20 Juin 2011

Résumé

Les rejets de la pêche sont souvent considérés comme un gaspillage de ressources et un obstacle à la gestion des stocks de poissons. Cependant, de nombreuses mesures traditionnelles de gestion des pêches ont effectivement favorisé les rejets en mer. Cette dichotomie controversée a récemment incité la Commission européenne à revoir son approche de la gestion des rejets, en particulier dans la mer du Nord, où les taux de rejets sont parmi les plus élevés au monde. La Commission européenne gère conjointement les pêcheries de la mer du nord avec la Norvège, mais dans les eaux norvégiennes, les rejets sont interdits. Pour évaluer l'efficacité de la politique norvégienne sans rejet, l’étude a examiné les effets sur les stocks biologiquement isolés comme le cabillaud, aiglefin, colin et hareng dans l'Arctique nord-est. Les tendances quant à l'état des stocks et à la performance économique, montrent que l'approche norvégienne dans l'Arctique nord-est a été plus efficace que l'approche commune en mer du Nord. Après avoir étudié les résultats économiques et la situation actuelle des stocks, l’étude conclut que l'interdiction des rejets dans la mer du Nord pour les espèces ci-dessus pourrait également offrir des avantages substantiels. La mise en œuvre de cette politique serait compliquée par la nature plus mixte (à la fois politiquement et biologiquement) de la pêche en mer du nord, mais des fermetures de zones en temps réel, des modifications d’engins, et des systèmes de surveillance électronique pourraient aider à atteindre plus d'efficacité.

Pour accéder à l’étude, cliquer Reviews in Fisheries Science

Selon une étude, l’interdiction des rejets permettra aux stocks de poissons de se reconstituer (cfp-reformwatch.eu)

En Norvège, une interdiction sur les rejets de poissons par-dessus bord a aidé à la reconstitution des stocks de poissons du pays. Selon une nouvelle étude, une même stimulation pourrait avoir lieu en mer du Nord.

Interdire les rejets de poissons constitue une priorité de l’agenda européen. Dans la réforme de la politique commune de la pêche à venir, la Commission devrait proposer une forme d’interdiction des rejets. Alors que l’Allemagne, le Danemark, la France et le Royaume-Uni ont déjà marqué leur soutien à une interdiction des rejets, de nombreux autres États membres restent hésitants.

À présent, les partisans d’une interdiction des rejets devraient trouver un certain soutien dans la recherche publiée cette semaine dans la revue spécialisée Reviews in Fisheries science.

Selon la nouvelle étude, une interdiction des rejets en mer du Nord aiderait à reconstituer les stocks de poissons et à augmenter les revenus des pêcheurs.

L’étude a été menée par des scientifiques à l’université d’York au Royaume-Uni et présente notamment une comparaison de données à long terme sur le cabillaud, l’aiglefin, le lieu noir et le hareng en mer du Nord avec les stocks de ces espèces dans le nord-est de l’Arctique (Norvège).

La pêche norvégienne était en crise lors de l’introduction d’une interdiction des rejets à la fin des années 1980, mais elle a maintenant rebondi de façon spectaculaire. Les chercheurs ont analysé les taux de prises de la pêche norvégienne et la structure d’âge des stocks de poissons afin de démontrer que l’amélioration de la situation est en grande partie due à l’interdiction des rejets. Ils ont également souligné le fait que les stocks de poissons existants en mer du Nord présentent le potentiel de croître plus rapidement encore que leurs équivalents norvégiens.

Les auteurs écrivent: «Le fait d’autoriser les pêcheurs à tout emporter sur la terre ferme ne semble pas avoir augmenté la pression pesant sur les stocks de poissons. Au contraire, cette mesure combinée à un système de fermeture en temps réel de certaines zones semble avoir incité les pêcheurs à apporter des modifications au matériel et à pratiquer une pêche plus sélective. Ces changements associés à une meilleure connaissance scientifique quant au statut des stocks ont probablement contribué aux taux de reconstitution relativement rapides que l’on a pu observer dans le nord-est de l’Arctique.....

Photo Wikipedia : Langoustines pêchées dans le Golfe de Gascogne, recommandées par Maria Damanaki, commissaire européenne en charge de la pêche

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