En Europe, nous mangeons les poissons de ces forçats des mers en nous fermant les yeux derrière des labels et autres écocertifications ! Nous sommes tous coupables ! Lire aussi : Tous complices des braconniers des mers !
Au départ, l’organisation britannique, Environmental Justice Foundation (EJF), voulait mener une enquête sur les bateaux pirates pour montrer leur impact négatif et jusqu’ici non mesuré sur les stocks de poisson au large des côtes ouest-africaines. Ce qu'ils ont découvert est autrement plus troublant. Sur ces bateaux pirates, véritables poubelles des mers, les travailleurs sont traités dans des conditions proches de l'esclavage.
Ces marins-pêcheurs travaillent pour des armateurs sans scrupule qui écoulent les poissons sur les marchés asiatiques et européens !
Les conditions décrites par les militants d’EJF, dans un long reportage publiées par The Guardian, donnent froid dans le dos : nourriture périmée, insalubrité et travail éreintant sans aucune règle de sécurité. Côté salaire ? Un pêcheur francophone nous parle de 200 dollars par mois dans la vidéo ci-dessous. C'est-à-peine si ces esclaves des temps modernes reçoivent une boîte de déchets de poissons, qu'ils peuvent revendre au marché pour quelques dizaines de dollars.
La plupart de ces bateaux sont enregistrés sous pavillon de complaisance mais ont des autorisations pour commercialiser leur poisson sur les marchés asiatiques et européens, ajoutant au non-respect des droits humains la concurrence déloyale et l’épuisement des ressources naturelles.
ALL AT SEA-The Abuse of Human Rights on Illegal Fishing Vessels from Environmental Justice Foundation on Vimeo.
Pour plus d’informations sur l’enquête d’EJF : All at Sea – the abuse of human rights aboard illegal fishing vessels
Autre article :
Résolution du Parlement européen du 25 novembre 2010 sur les droits de l'homme et les normes sociales et environnementales dans les accords commerciaux internationaux
Droits de l'homme et normes sociales et environnementales dans les relations commerciales unilatérales: SPG et SPG+
24. estime que les 27 conventions, dont la ratification et la mise en œuvre effective sont demandées afin de pouvoir bénéficier du SPG+, représentent un mélange unique de conventions sur les droits de l'homme, le droit du travail, l'environnement et les normes en matière de bonne gouvernance; souligne que, jusqu'ici, le SPG+ a eu un impact positif visible en ce qui concerne la ratification de ces conventions, mais moins quand il s'agit de leur mise en œuvre, et souhaite donc mettre davantage l'accent sur les mesures d'accompagnement visant à améliorer la capacité de mise en œuvre; considère également que, pour assurer la crédibilité du SPG+, la Commission doit lancer des enquêtes si des éléments concordants indiquent que certains pays ne mettent pas en œuvre les 27 conventions, et le cas échéant supprimer les préférences;
25. considère qu'un lien plus étroit pourrait être établi entre les clauses sur les droits de l'homme et le SPG+ dans les accords de l'Union européenne avec les pays tiers, en particulier en ce qui concerne le suivi;
26. invite la Commission, dans le processus de révision du régime SPG, à faire en sorte qu'il bénéficie surtout aux pays qui en ont le plus besoin, et à simplifier les règles d'origine, afin que les pays bénéficiaires de l'initiative «Tout sauf les armes» et du régime SPG+ puissent tirer le plus grand profit des préférences qui leur sont accordées; demande que des points de comparaison, des mécanismes et des critères transparents pour l'octroi ainsi que le retrait des préférences dans le cadre de ce régime soient établis; demande également la pleine participation du Parlement européen tout au long de ce processus, notamment en ce qui concerne la proposition du Conseil relative aux listes de pays bénéficiaires, le lancement des enquêtes ou la suspension temporaire du SPG+;
27. prie instamment la Commission de déposer dans les meilleurs délais une proposition de règlement interdisant l'importation dans l'Union de biens produits par le biais de formes modernes d'esclavage, du travail forcé, notamment du travail forcé de groupes particulièrement vulnérables, en violation des normes fondamentales des droits de l'homme;
Texte intégral, Cliquer Ici
Convention de l’OIT sur le travail dans la pêche 2007
Guide pour les syndicats
ITF
La convention de l’OIT sur le travail dans la pêche 2007 (n° 188) vise à faire en sorte que les pêcheurs du monde entier bénéficient de conditions de travail et de vie décentes. Après des années de négociations difficiles, elle a été adoptée en juin 2007, de même qu’une recommandation officielle qui l’accompagnait.
Cette convention historique s’applique à tous les types de pêche commerciale et s’attache à fournir des normes minimales acceptables qui protègent les pêcheurs dans tous les aspects de leur travail, sachant qu’il s’agit d’une profession extrêmement dangereuse qui n’est pratiquement pas réglementée.
Les pêcheurs et les navires de pêche étant exclus de la quasi-totalité de la législation existante, cette convention établit un cadre fondamental d’obligations pour les employeurs, et d’obligations correspondantes pour les gouvernements concernant l’intégration des normes minimales à la législation nationale. Cela représente un plus grand défi pour certains gouvernements que pour d’autres, étant donné la diversité des conditions dans lesquelles opère l’industrie de la pêche à travers le monde. Pour cette même raison, il est probable que les dispositions les plus fondamentales de la convention auront davantage d’impact sur les pêcheurs travaillant dans les secteurs de l’industrie les moins développés.
La convention est flexible, de manière à être pertinente pour tous les types de pêche commerciale et à être appliquée dans le monde entier. Certaines de ses dispositions bénéficient en outre d’une mise en place progressive.
Cependant, bien qu’adoptée, elle n’entrera pas en vigueur avant d’avoir été ratifiée par 10 États membres de l’OIT (Organisation internationale du travail), dont huit doivent être des États côtiers. Cette condition n’est pas encore remplie. L’ITF estime qu’il est essentiel que davantage de pays la ratifient, et que les syndicats ont un rôle important à jouer pour les convaincre de le faire.
L’ITF tient à rendre hommage aux 30 millions d’hommes et de femmes dans le monde qui travaillent dans le secteur de la pêche et veut les aider à obtenir des conditions de travail décentes à travers l’application de cette convention. Ce guide vise à aider les syndicats et leurs membres à mieux comprendre la convention et à mener des actions de lobbying plus efficaces en faveur de sa ratification ; à les aider à s’en servir pour améliorer les conditions de travail et soutenir les négociations collectives ; et enfin à montrer comment elle peut être appliquée en utilisant une convention collective cadre de l’ITF spécifique.
Sommaire :
- À propos de la convention
- De quelle protection bénéficient les pêcheurs ?
- Que signifie « flexible » dans ce contexte ?
- Qui est couvert ?
- En quoi la convention profite-t-elle aux petits pêcheurs ?
- Quelles sont les répercussions sur la réglementation existante concernant le travail dans la pêche ?
- Qu’est-ce que cela signifie pour les pêcheurs ?
- Quel est l’âge minimum ?
- Quelles sont les normes médicales ?
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Violation des droits des pêcheurs et concurrence déloyale (CLPM Le Guilvinec)
Dans le monde les pêcheurs sont l’un des groupes humains dont les droits sont les plus bafoués. International Trade Federation (ITF) vient de rendre public un rapport qui met le doigt sur le lien entre les abus et la pêche illicite (IUU) pratiquée par des navires sous pavillon de complaisance. Cela peut paraître lointain, mais une bonne partie de cette pêche illégale arrive à prix cassés sur les marchés européens.
La pêche illicite a le triste record de présenter souvent les conditions de travail les plus déplorables et le plus grand nombre de violations des droits. Les enquêtes menées par Environmental Justice Foundation (EJF), soutenue par ITF, démontrent que les équipages des navires IUU travaillent dans des conditions proches de l’esclavage. Dans son nouveau rapport « All at sea : the abuse of human rights aboard illegal fishing vessels » l’EJF dénonce ces violations des droits humains et l’absence de règlementation internationale, notament sur les pavillons de complaisance (mais pas seulement), qui permet aux opérateurs IUU de commettre ces violations des droits humains en toute impunité.
La Mission de la Mer qui travaille ces questions donne un exemple classique de contrat IUU : un népalais analphabète a signé un contrat de trois ans au salaire de 200 US$ par mois. Sur cette somme 150 US$ sont prélevés par l’agence de Singapour chaque mois, ainsi que les six premiers mois de salaire. 50 US$ sont retenus mensuellement par le capitaine et remis dans le port. Les envois d’argent au Népal se font tous les six mois. Le travail journalier est de 18 heures, sans heures supplémentaires. Toilettes et lessives se font à l’eau de mer. Le pêcheur doit rentrer à Singapour par ses propres moyens pour toucher son salaire. Si le contrat n’est pas rempli, pour une raison ou une autre, le pêcheur est abandonné sur place.
Les États et l’Europe doivent prendre leurs responsabilités dans ce domaine. Madame Damanaki indique elle-même que « nous importons plus des deux tiers de la consommation européenne », quel pourcentage provient des pêches illicites ? Il faudrait dire aux pêcheurs européens que la Politique Commune des Pêches (PCP) prévoit un alignement sur les cours mondiaux, mais qu’en plus la lutte contre les IUU n’est faite que de vœux pieux....
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Le 14 septembre 2011
Derrière la pêche industrielle thaïlandaise, les récits d'esclavage (20 minutes)
RAYONG (Thaïlande) - Des milliers de Birmans et de Cambodgiens travaillent sur les riches bateaux de pêche thaïlandais, mais à bord se côtoient parfois ouvriers en règle et esclaves des temps modernes. Avec des récits de meurtres, de violence, de terreur.
Le jour où Hla Myint a vu la mer la première fois, c'est après un trek d'une semaine à travers la jungle pour rejoindre la côte thaïlandaise depuis la Birmanie. Le début de sept mois "en enfer", marqués par des violences "chaque jour, chaque heure".
Son témoignage en rejoint bien d'autres dans un secteur qui, selon plusieurs rapports, s'appuie sur le travail forcé.
Hla Myint a décidé de plonger du bateau où il était retenu après avoir assisté à l'exécution d'un compagnon d'infortune.
L'homme, qui avait tenté de s'évader, a été torturé devant l'équipage. "Puis ils l'ont emmené à l'arrière du bateau, l'ont fait monter sur le bord et lui ont tiré une balle dans la tête", ajoute celui qui aide désormais une association à recueillir les fuyards.
Son histoire, il l'a racontée à l'AFP lors d'une opération pour récupérer quatre Birmans près de la ville de Rayong, à une heure et demie de Bangkok. "Ils m'ont dit que si j'essayais de me sauver, une balle ne coûterait que 25 bahts" (83 cents), a raconté Myo Oo, 20 ans.
Mana Sripitak, de l'Association nationale de la pêche, affirme qu'il est "impossible" que le travail forcé soit utilisé. Mais le gouvernement lui-même reconnaît un flou propice aux malversations et promet l'enregistrement futur de tous les bateaux.
"On ne peut pas savoir ce qui se passe quand les bateaux quittent la côte. Les ouvriers peuvent être torturés ou détenus. Les capitaines exercent un contrôle absolu et ils peuvent maltraiter les gens", admet sans détour Sirirat Ayuwathana, du ministère du Développement social, en charge du trafic des êtres humains.
Impunité et collusion
Les Nations unies, tout en évoquant des efforts du pouvoir, ont récemment dénoncé un phénomène "qui augmente en proportion".
A bord, les hommes travaillent 20 heures par jour, sept jours sur sept. Certains bateaux-mères se déplacent pour faire le plein des navires, en fuel et en personnel. Certains sont ainsi piégés des mois, voire des années, jusqu'au large de la Somalie, selon l'Office international des migrations (OIM).
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Le 22 juin 2012
Dans la plaine du Cambodge brûlée par le soleil, où la poussière pique les yeux et bouche les pores de la peau, se dresse une minuscule habitation bâtie sur des pilotis en ciment. Elle abrite trois générations d’esclaves en fuite. Le chef de famille, Sokha (un pseudonyme), est de retour depuis peu, après deux ans de captivité. La maison est dans le même état que lorsqu’il l’a quittée : vide, avec quelques oreillers sales en guise de meubles. Des rais de lumière filtrent à travers les fissures des murs. Le bien le plus précieux de la famille, une truie, se dandine en grognant sous le plancher surélevé. Jusqu’à son évasion, en décembre dernier, Sokha était la propriété d’un capitaine de chalutier de haute mer. Ce Cambodgien de 39 ans, son jeune fils et deux de ses neveux avaient chacun été achetés pour environ 650 dollars [520 euros] via des intermédiaires leur ayant promis un travail au noir dans une conserverie de poissons.La conserverie n’existait pas. Introduits clandestinement en Thaïlande, les quatre Cambodgiens ont été embarqués sur un bateau en bois qui a pris le large sur une mer de non-droit. L’oncle de Sokha était tombé dans le même piège cinq ans plus tôt. Il avait réussi à s’échapper et avait mis en garde sa famille. En vain. Sokha a persuadé son fils, alors âgé de 16 ans, que, cette fois, l’aventure tournerait différemment. Bien entendu, il se trompait. “Nous étions contraints de travailler à l’œil et sans arrêt pendant parfois deux ou trois jours d’affilée, malgré le mal de mer et les vomissements, se souvient-il. Nous obéissions au doigt et à l’œil au capitaine.” Un capitaine qui proférait des menaces de mort pour maintenir son emprise sur l’équipage et n’hésitait pas à sortir son pistolet K-54 datant de la guerre du Vietnam. Une nuit, il a tailladé le visage de l’un des esclaves sous les yeux de l’équipage. “Vingt heures par jour, nous étions forcés de pêcher et de trier ce que nous remontions : maquereaux, crabes, calmars, poursuit Sokha. Mais le poisson n’était pas pour nous.”
Un marché axé sur l’exportation
A qui était-il donc destiné ? La réponse devrait faire tomber des nues tous ceux qui observent de près l’industrie de la pêche en Thaïlande, secteur générant plusieurs milliards de dollars. “C’est un marché axé sur l’exportation. Et nous savons vers quels pays ces produits partent”, indique Lisa Rende Taylor, du Projet interagences des Nations unies sur le trafic d’êtres humains (Uniap). “Il suffit de faire le calcul.”
La Thaïlande est le deuxième fournisseur de produits de la mer des Etats-Unis, avec une part de marché de 16 % de ces importations. En 2011, selon la Direction américaine des pêches maritimes, la Thaïlande a exporté 375.000 tonnes de poissons et de fruits de mer aux Etats-Unis pour une valeur dépassant 2,5 milliards de dollars [1,6 milliard d’euros]. Seul le Japon en consomme davantage.
En cette ère de mondialisation, les Etats-Unis apparaissent de plus en plus sensibilisés aux mauvais traitements subis par les pauvres qui, à l’étranger, les approvisionnent en produits de consommation. Il suffit de voir le succès remporté par le commerce équitable, l’indignation suscitée par les “diamants de sang” [qui financent des guerres en Afrique] et, plus récemment, le tollé provoqué par les conditions de travail inhumaines qui règnent chez les sous-traitants chinois d’entreprises comme Apple.
Mais l’assemblage des iPad est une sinécure comparé à l’esclavage pratiqué sur les chalutiers thaïlandais. Là, les conditions de travail sont aussi dures et exténuantes que dans les plantations américaines au XIXe siècle. Les plus chanceux parviennent à s’évader au bout d’un an ou deux. Les autres sont revendus encore et encore. Quand ils ne sont pas assassinés.
Il est de plus en plus difficile de nier que les gros importateurs de produits de la mer thaïlandais – Japon, Etats-Unis, Chine et Union européenne – profitent, de fait, du travail forcé. Les témoignages d’anciens esclaves, d’associations de pêcheurs thaïlandaises, de fonctionnaires, d’exportateurs et de travailleurs sociaux recueillis par le Global Post au cours d’une enquête de trois mois ont levé le voile sur une chaîne logistique qui repose sur l’esclavage. La complexité du réseau de chalutiers, bateaux-mères et grossistes indépendants contribue à masquer l’origine du poisson pêché par les esclaves bien avant que celui-ci ne soit débarqué à terre. C’est ainsi que nombre de patrons d’usines thaïlandaises ignorent par qui a été pêché le poisson qu’ils transforment avant de l’exporter.
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