La carpe dans la tradition aquacole chinoise
Les traces de l'aquaculture en Chine remontent à 2 400 ans. Des poissons marins et des mollusques et crustacés ont été cultivés entre 1 700 - 2 000 ans. Le «Fan Li sur la pisciculture» est le premier travail existant en Chine sur la pisciculture. C'est également le premier travail écrit dans le monde sur la pisciculture et résume la riche expérience d'élevage de la carpe dans les étangs au 5ème siècle A.C.
L’élevage des poissons en Chine a toujours été une activité familiale basée sur l’expérience accumulée au cours des générations. Les technologies utilisées étaient primitives et avaient un rendement relativement faible, comparées aux techniques actuelles avancées. Après les années 50, le gouvernement de la Chine a commencé à employer de nouvelles méthodes d’élevage caractérisées par la percée technologique remarquable dans la reproduction artificielle des principales carpes chinoises.
En 1978, il y a eu une série de changements dans les politiques économiques de la Chine, faisant que la planification centrale ait été graduellement remplacée par une économie de marché. En brisant le monopole du marché et les entraves au commerce dans le pays, la Chine a créé un environnement favorisant le développement du marché de l'aquaculture. En même temps, l'évolution scientifique et technologique a également préparé le terrain pour la production à grande échelle.
Le succès dans la reproduction artificielle des carpes vers la fin des années 50 a bâti graduellement une grande industrie de carpe qui représentait, en 2004, 46,4% du rendement de l'aquaculture nationale, ou 78,58% de l'aquaculture continentale nationale. Beaucoup d'autres espèces telles que les algues, les mollusques, les crustacés et les poissons ont suivit et sont entrés dans la production massive après les années 80. La plupart des semences des espèces cultivées proviennent des écloseries. L'exception est marquée par l’anguille, dont l’élevage se base toujours sur des semences collectées dans les eaux naturelles ou importées d'autres pays.
La carpe dans la tradition culinaire chinoise
Hishamunda, N.; Subasinghe, R.P.
FAO Document technique sur les pêches. No. 427. Rome, FAO, 2003. 69 p.
Les documents existants montrent que la Chine élevait déjà des poissons en 1 100 avant notre ère. La carpe commune (Cyprinus carpio), poisson d'eau douce, fut la première espèce cultivée. Son élevage était mené en étangs en terre.
Au cours de la dynastie Tang (618-917 après JC), l'élevage s'est étendu aux différentes espèces de carpes: carpe commune (C. carpio), carpe argentée ((Hypophthalmichthys molitrix), carpe à grosse tête (Aristichthys nobilis), carpe herbivore (Ctenopharyngodon idellus), carpe noire (Mylopharyngodon piceus) et carpe de vase (Cirrhina molitorella). Sauf dans le cas de C. molitorella prélevée dans la rivière des Perles, toutes les autres espèces provenaient du Yangtsé. Plus tard, sous la dynastie Song (960-1279 après JC), les éleveurs établis le long de ces deux rivières récoltaient des alevins provenant des espèces susmentionnées en milieu naturel qu'ils transportaient dans des endroits éloignés pour les mettre en élevage.
L'ostréiculture date de la dynastie Han (206 avant JC à 220 après JC). Les élevages marins et celui du chanos chanos se sont popularisés sous la dynastie Ming, surtout dans la province de Taiwan (Zheng Hongtu, 1600)…
Résumé
Ce rapport analyse les raisons et les facteurs qui ont conduit au développement de l'aquaculture en Chine, spécialement le rôle des politiques gouvernementales. L'objectif est de comprendre l'avenir de ce secteur et de rendre l'expérience chinoise disponible au reste du monde, particulièrement aux pays en développement, dans leurs efforts de développement de l'aquaculture en vue de contribuer à la sécurité alimentaire et à l'économie nationale. L'aquaculture chinoise semble s'être développée grâce aux politiques tournées vers l'autosuffisance alimentaire et aux raisons économiques. Celles-ci comprennent la création d'emplois, spécialement dans les communautés rurales, la création et l'accumulation de biens immobiliers et des richesses aux niveaux national, local et individuel ainsi que le gain de devises nécessaires à l'achat de biens d'équipement pour la reconstruction de l'économie après la libération du joug étranger et la fin des conflits internes en 1949.
Grâce à des politiques gouvernementales entreprenantes, une planification adéquate, des technologies de production fondées sur des résultats scientifiques, une gestion appropriée, et une demande mondiale sans cesse croissante pour les produits aquacoles, l'aquaculture chinoise peut être, et sera probablement, stable, durable et compétitive à la fois au niveau national comme au niveau international. D'importantes leçons peuvent être tirées de l'expérience chinoise: (1) l'aquaculture peut être développée d'une manière durable pour créer des emplois, produire à manger et améliorer les revenus et les moyens de subsistance des populations rurales et urbaines, diminuant ainsi la faim et la pauvreté; (2) le moteur d'une aquaculture économiquement forte et durable est la volonté du Gouvernement et sa détermination à mettre en place des politiques appropriées favorisant l'essor du secteur; c'est aussi la demande du marché pour les produits aquacoles; (3) la pleine utilisation des facteurs de production, y compris les ressources humaines, les améliorations permanentes des cadres politique, juridique et réglementaire favorables au développement du secteur, et des avancées scientifiques dans les technologies de production renforceront le secteur aquacole et assureront sa durabilité, faisant ainsi de l'aquaculture un sérieux contributeur à la croissance de l'économie nationale.
Pour accéder au document, cliquer Développement de l'aquaculture en Chine: rôle des politiques gouvernementales
La pêche en eau douce en Chine continentale : un modèle transposable ?
La République populaire de Chine (RPC) occupe une place de premier plan dans la production halieutique en eaux continentales. Ces dernières années, elle a fait des progrès remarquables dans ce domaine et pourrait constituer, dans une certaine mesure, un modèle d'inspiration pour d'autres pays en développement.
La croissance de sa capacité productive en eau douce (captures et aquaculture) dépasse de loin celle des pêches continentales ailleurs dans le monde. Au cours des 30 dernières années, la consommation par habitant, estimée sur la base de la production déclarée, est passée de 4,4 kg en 1972 à 25,1 kg en 1999. Le poisson contribue pour environ 20% à la consommation totale de protéines animales….
En Chine, une large gamme de technologies aquacoles est utilisée pour différentes espèces : carpes, anguille japonaise, crevette d'eau douce, poisson-chat, tilapia, etc.. Les conditions environnementales de la production sont diversifiées : élevage en étang ; élevage en enclos ou en cages, techniques introduites dans les années 1970 et 1980 ; élevage en rizières, ou rizipisciculture, est une pratique traditionnelle du système cultural, très importante pour le développement rural ; élevages en circuit fermé et pêcheries en eaux libres….
La "loi sur la pêche" de la RPC, promulguée en 1986 et révisée en 2000, régit la pêche et l'aquaculture. Elle a été complétée par un arsenal juridique (règles, règlements, directives) régissant le développement de l'aquaculture et par la "Réglementation sur la protection et la reproduction de la faune sauvage aquatique" de 1993. Par ailleurs, en 1999, le gouvernement a adopté la politique de "croissance zéro" de la pêche de capture et a renforcé les périodes d'arrêt de la pêche afin de protéger les ressources. À certains égards, cette politique a encouragé les fermiers à se tourner vers l'aquaculture.
La nouvelle réglementation a renforcé la confiance des aquaculteurs et encouragé leurs investissements. Les aquaculteurs peuvent obtenir, par contrat, des droits d'usage et d'aménagement des plans d'eau et des zones aquacoles, propriétés d'État ou propriétés collectives. La réglementation s'efforce aussi de réduire les impacts environnementaux générés par l'aquaculture : pollution de l'eau, perte de biodiversité génétique, etc. Par exemple, vingt-six stations aquacoles ont été créées dans le pays afin de conserver des souches sauvages de plusieurs espèces ou de variétés de poissons génétiquement sélectionnées.
Depuis le début des années 1980 (réformes économiques et politique d'ouverture), le gouvernement a encouragé et facilité le transfert de propriété des fermes aquacoles du secteur public au secteur privé. Cette réforme foncière a eu une influence positive sur le développement de l'aquaculture dans le pays que l'extension du bail à trente ans a aussi favorisé. Par exemple, la province de Hubei, dont la production était négligeable dans le passé, est devenue le premier producteur de poissons d'eau douce du pays, avec 2,18 millions de tonnes produites en 1998.
Le développement de la filière aquacole a été très rapide également. Auparavant, il n'existait pas, en Chine, d'usines d'aliments pour animaux aquatiques. Vers la fin des années 1970, les éleveurs ont commencé à nourrir les premiers élevages de crevettes (Penaeus spp.) avec des aliments préparés à domicile. Mais ce système s'est rapidement révélé insuffisant pour satisfaire une demande croissante d'aliments de qualité, d'autant plus qu'à la fin des années 1980 et au début des années 1990, de nouvelles espèces ont commencé à être élevées en eau douce ou saumâtre. Dès lors, de grosses entreprises privées de production d'aliments sont apparues, couvrant près de 50% des besoins du marché. Les grandes usines appartiennent à des entreprises locales ou étrangères. La filière industrielle a été complétée par des usines de production de farine de poisson, d'additifs alimentaires et d'équipements pour la transformation de poissons….
Les politiques d'ouverture des marchés ont été un facteur essentiel du développement de l'aquaculture, premier secteur concerné par les mesures de libéralisation dans le domaine de la production agricole. Avant 1978, les produits aquacoles, comme les autres produits agricoles et industriels, étaient achetés aux producteurs par l'État (qui possédait le monopole des achats et des ventes) et redistribués. À partir de 1979, le marché a été ouvert graduellement. Production, commercialisation et distribution ont été libéralisées et privatisées. Les barrières douanières entre régions ont été abolies et les produits aquacoles ont pu circuler librement dans tout le pays. En 1995, l'État a adopté un "Plan de développement national du marché de gros pour les produits aquatiques". De 150 marchés de gros en 1993, on est passé à 323 en 1998 (150 au niveau urbain et 173 dans les campagnes)….
Pour plus de renseignements, cliquer Geoconfluences
==================
Piscicultures : le poisson de demain
Piscicultures : le poisson de demain
Jérôme Lazard, René Lésel
Cahiers Agricultures - Vol. 18, N°2/3, mars-avril/mai-juin 2009
Éditeur John Libbey Eurotext, juillet 2009, 232 p.
Au cours des trente dernières années, la consommation de protéines animales, relativement stable dans les pays développés, a plus que doublé dans les pays en développement. Les produits aquatiques y ont apporté une contribution notable (doublement de la consommation au niveau mondial, de 6 à 14 kg/personne/an), comparable à celle des porcins.
Les prospectives à échéance 2020 montrent que produits de la pêche et produits d'aquaculture contribueront à égalité à l'alimentation mondiale. Dans l'avenir, la pisciculture se présente donc comme une option majeure pour les pays émergents et en développement. Réussir un tel projet nécessite de privilégier les axes de recherches tels que la nutrition et l'alimentation des poissons, la domestication de nouvelles espèces, l'optimisation des systèmes d'élevage, la co-construction d'innovations et la mise en place de démarches de développement durable.
Les enjeux
La pisciculture joue, et jouera encore plus dans l’avenir, un rôle essentiel dans l’alimentation du monde. Selon nombre de nutritionnistes, le poisson est un vecteur de l’ensemble des nutriments et sa consommation est de ce fait qualitativement un facteur d’équilibre nutritionnel incontournable. Par ailleurs, le calcul rapide du volume des besoins mondiaux fixés par cette exigence nutritionnelle comparé à nos capacités de production, montre que ces deux données sont du même ordre de grandeur. Toutefois, si tout est mis en œuvre au plan mondial pour assurer la ressource, sa couverture dépend de façon très rigide de la pisciculture.
Pour faire face à ces enjeux nutritionnels, la pisciculture ne peut pas ne pas être relativement intensive. Se pose alors la question de sa durabilité. Comment faire pour ne pas épuiser les ressources génétiques ? Comment faire pour ne pas créer de nuisances environnementales préjudiciables, à terme, à la production elle-même ? Comment répartir la richesse que pourrait créer la pisciculture de façon suffisamment harmonieuse pour favoriser l’entreprise sans provoquer de l’exclusion ?
Ce numéro des Cahiers Agricultures n’élude aucune de ces questions. Il a été réalisé à l’initiative de, et en collaboration étroite avec, Jérôme Lazard chercheur au Cirad et spécialiste international de la domestication et l’élevage d’espèces vivant en eaux chaudes.
Les éléments essentiels de ces problématiques sont rassemblés dans ce numéro thématique exceptionnel des Cahiers Agricultures qui regroupe 30 articles en un corpus unique de 232 pages. Source : CIRAD
Commentaires