Pêche électrique : analyse à contre courant !

(Copie d'écran Google images : Pêche électrique Pays Bas)

A quelques heures du dénouement, le suspense est à son comble...

Qui va gagner ? les pêcheurs néerlandais ou les pêcheurs français ?

Au Parlement européen, la tension devrait monter jusqu'au moment du vote... Une tension électrique à l'annonce des résultats !

Quelque soit le résultat, autorisation ou pas de la pêche électrique dans les eaux européennes (1), il nous semble important de prendre le recul indispensable pour analyser la situation de la pêche européenne dans un contexte de mondialisation du marché des produits de la mer... Et comprendre comment on en est arrivé là alors que la pêche électrique est interdite dans l'Union Européenne depuis 1998.

Une fuite en avant vers la concentration des activités de pêche en Europe... Et une grande nation maritime comme fer de lance ! Les Pays-Bas agissent en sous-marin pour arriver à leurs fins dans le domaine halieutique... Acquisition avec la reprise des armements étrangers, et étouffement avec la politique de la terre brûlée comme l'utilisation de pratique de pêche qui ne laisse aucune chance à ses rivaux...

Pays de tradition culinaire, « Ventre » du poisson mondialisé...

En dehors de la pêche électrique, les Pays-Bas font de temps en temps les grands titres de la presse spécialisée... Les armateurs néerlandais détiennent dorénavant de grands pans du secteur de la pêche en France... La pêche chalutière industrielle, démersale et pélagique, avec l'acquisition d'Euronor à Boulogne et de la Compagnie des pêches de Saint-Malo... La pêche thonière avec l'acquisition de la Compagnie Française du Thon Océanique (CFTO), l'un des leaders mondiaux de la pêche au thon tropical... Côté aquaculture, Nutreco, géant mondial de la nutrition aquacole, est piloté depuis la Hollande qui contrôle ainsi une grande part des intérêts dans le saumon et la crevette d'élevage, deux produits aquacoles dont les français sont accrocs...

Et enfin avec la Rabobank, le secteur bancaire néerlandais suit l'évolution du secteur de la pêche et de l'aquaculture depuis de nombreuses années ; cette banque ne manque pas dans ses analyses très suivies d'impulser ses choix en matière de stratégie de développement à l'échelle planétaire... Ce qui pourrait expliquer le non décollage de l'aquaculture en France, pays de tradition culinaire mais considéré ni plus ni moins comme un « Ventre » du poisson mondialisé...



Quant à la politique de la terre brûlée à laquelle se livrent les pêcheurs néerlandais sur les fonds marins, nous donnons la parole à Jean-François Le Bitoux avec ce très bon billet publié sur le blog de Paul Jorion :

L’étrange défaite de la démocratie bureaucratique européenne : l’autorisation du chalutage électrique. De quoi cette dérogation est-elle le message ?

Extraits

L’historienne Mona Ozouf aime souligner qu’avant de se lancer dans l’analyse d’une situation délicate, il faut « contextualiser avant de hiérarchiser ». Cette attitude implique une curiosité et une volonté de savoir qui selon Marc Bloch, autre historien exigeant, ne sont guère encouragées en notre pays : résister à « cette paresse de savoir, funeste complaisance envers soi-même » demande une volonté tenace.

Il y a toujours plusieurs manières d’aborder une situation compliquée. Le vote de l’autorisation du chalutage électrique dans les eaux européennes est d’autant plus absurde qu’il provient de la Commission qui est censée faire respecter une législation européenne qui en interdit l’usage. C’est l’occasion de s’interroger sur les petits arrangements entre amis qui sont aussi une caractéristique de toute corruption officielle ou tolérée. Un « wicked problem » ?

(...)

En une dizaine d’années, le chalutage hollandais vient de réussir un magnifique casse aux subventions qui a pris les apparences d’une procédure bureaucratique administrativement bien menée. Depuis 2006, cette activité a fait financer par la Recherche européenne un investissement dans le chalutage électrique afin d’en étudier les forces et les faiblesses. Contrairement à ce qui a été dit, il existe des rapports de recherche intéressants qui constatent tout le bien de la technologie proposée et qui de fil en aiguille, suggèrent qu’elle va sauver le monde sans en rechercher d’éventuels paramètres limitants (2). Cela semble bien une technologie optimisée pour travailler dans les espaces de pêche hollandais et sans doute dans d’autres écosystèmes de manière plus ponctuelle. Elle pourrait « y faire un malheur » sans y être concurrencée par des méthodes traditionnelles.

C’est sans doute « de bonne guerre » mais les citoyens qui financent, s’attendent à ce qu’une commission responsable, curieuse et critique, en apprécie les bienfaits et les risques avec un peu de recul. La pêche électrique est utilisée à une échelle limitée depuis longtemps : quel pourrait en être l’impact à une échelle industrielle ? Il a été dit que cette technique a été interdite en Amérique et en Asie, pourquoi ? Puisque cette technique est mise en œuvre depuis plusieurs années, il est sans doute possible d’en observer les effets là où elle a été le plus utilisée ? Bref sans méconnaître l’impact d’autres techniques de chalutage, il peut sembler risqué de « laisser faire » ou même de donner un avantage comparatif économique à cette technique sans autre encadrement.

Il n’est pas possible de citer ici les effets destructeurs attribués à cette pêche dans une discussion sans fin, sans même évoquer les manipulations de tensions de pêche, mais les scientifiques savent qu’elle permet de faire sortir des sédiments un maximum d’animaux.

Comment en est-on arrivé là ? Réponse sur le blog de Paul Jorion

https://www.pauljorion.com/blog/2018/01/16/letrange-defaite-de-la-democratie-bureaucratique-europeenne-lautorisation-du-chalutage-electrique-par-jean-francois-le-bitoux/

(1) Ce mardi 16 janvier 2018, le Parlement Européen a voté Non à la pêche électrique et demande son interdiction... Dans Ouest France : Pêche électrique : Le parlement européen dit non
(2) Dans Huffingtonpost (16/01/2018) : Ce que dit la science sur la pêche électrique


Autres articles :

Pour aller plus loin...

Conversation (janvier 2018) : Pêche électrique plus destructrice que chalutage classique ?
Is fishing with electricity less destructive than digging up the seabed with beam trawlers?
https://theconversation.com/is-fishing-with-electricity-less-destructive-than-digging-up-the-seabed-with-beam-trawlers-89621

Le 20 Juin 2018

L'Ifremer appelle à approfondir les effets des impulsions électriques sur la faune benthique, le réseau trophique, le fonctionnement de l’écosystème… sans généraliser les quelques observations qualitatives réalisées.

Le chalut à impulsions électriques - Décryptage de l'avis du CIEM



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