Illustration : Palais Bourbon (wikipedia)
Le médecin observe « une altération de l’image de soi » chez les ostréiculteurs...
A Bourcefranc, Etaules ou encore La Tremblade, le désespoir des professionnels se nourrit d'une sourde colère...
Ah… les élus ! Je ne veux pas arrêter de voter, les anciens se sont battus pour ça. Mais il y a des moments où… » Le débordement est contenu. Pascal reprend son souffle. « Je veux qu'ils viennent ici, à la cabane, discuter avec nous. Discuter avec la France qui se lève tôt. On sait ce que sont les politiques, ils t'écoutent, mais ne t'entendent pas. Où est la ministre de l'Environnement. » Qui parle de la qualité de l'eau ?
« Il n'y a plus d'enthousiasme, j'observe une altération de l'image de soi. Plus de projet, plus d'envie. Les ostréiculteurs baissent les bras, ils sont désemparés. Cela débouche sur une véritable pathologie : la dépression. » Dans Sud Ouest : lire plus bas
A l’occasion des universités d’été des partis politiques on entend quelquefois des questions du genre : « Qu’est-ce que ça veut dire aujourd’hui d’être de gauche ? (ou de droite) » qui ne déclenchent tout au plus que des tempêtes dans un verre d’eau et laisse indifférent la majorité des électeurs dépourvus de carte de membre engagé. Pourtant, aujourd’hui, après des alternances de gouvernements n’ayant laissé que des sentiments d’échecs, de déceptions et de désillusions on peut se demander si l’inefficacité persistante des partis traditionnels n’indique pas qu’ils cheminent vers l’obsolescence.
Ils sont nés aux confins d'un siècle religieux : le 19ème siècle où l'on croyait que la science, le commerce, le travail amèneraient le bonheur aux peuples, qu'on croulerait sous les biens de consommation, qu'on ferait reculer la faim, la maladie, la vieillesse. Cette ère religieuse a vu s'élever des gares, des usines, des halles comme autant d'églises, de basiliques, de cathédrales au Moyen Age.
Si sous l'ancien régime seule une minorité privilégiée portait les projets de société, aux siècles industriels les distinctions sociales étant fondées sur l'utilité collective, chacun avait un rôle à jouer. Les prolétaires constituaient la force musculaire faisant fonctionner le système. Les damnés de la terre avaient une identité, une fierté et un but noble à atteindre, de quoi se retrousser les manches, supporter les contraintes laborieuses et hiérarchiques.
En occident, cette religion a atteint son but. Dans les années 60 commencent à fleurir les supermarchés, les soins sont gratuits pour tous, la richesse cascade sur chacun. Un ouvrier peut fonder une famille s'acheter une maison, posséder une voiture, une télévision, partir en vacances, envoyer ses enfants à l'université... C'est le bonheur !
Et donc pourquoi supporter les contraintes davantage ? En mai 68, on veut partir à la plage.
Les partis politiques sont les hérauts de cet avènement. Malgré leur antagonisme apparents, ils ont accompagné et soutenu les mutations économiques et sociales de façon efficace.
Aujourd’hui, les trente glorieuses sont loin... les emprunts d'état sont importants, le déficit se creuse, la production industrielle est en recul, le chômage en hausse... et les gouvernements se succèdent sans succès. L'alternance est inopérante.
Et pourtant, les candidats promettent encore l'arrêt du chômage, la croissance, l'abondance... Ils utilisent leur auréole de pourvoyeur de bonheur, leur parti encore nimbé de succès dans l'accomplissement des rêves de nos aïeux. Mais tout ça est, semble-il, bien fini. Alors évidemment, ils n'ont à offrir aux électeurs qu'une suite de déceptions.
Et d'un autre côté comment peut-on promettre une croissance alors que la planète entière se meurt de l'expansion et de l'activité humaine ?
Une révolution aujourd'hui consisterait en un désamorçage du système économique et du développement démographique...
Ainsi, les partis pertinents ne recéleraient pas un fonds de commerce basé sur un accroissement d'une richesse hypothétique pour accéder à un bonheur révolu, mais s'apprêterait à gérer la décroissance, prévenir les pénuries à venir, contenir la démographie, préserver l'environnement, développer des énergies renouvelables et donc maintenir la confiance dans l'avenir et conserver un espoir...
En attendant, la droite et la gauche turbinent à vide sur des acquis passés avec un objectif commun à tout être vivant : exister.
Frantz Tyenkel
Autres articles :
Du 26 au 29 Août 2014
Charente-Maritime : Philippe Baroux donne la parole aux ostréiculteurs
A Bourcefranc, Etaules ou encore La Tremblade, le désespoir des professionnels se nourrit d'une sourde colère.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
Charente-Maritime : les damnés de la mer
C'est une maman. Michèle est une mère tendre, douce, et attentive. Elle les connaît bien ses deux garnements. Yann, l'aîné, 41 ans, carrure de surfeur sous un marcel dévoilant de solides épaules, dent de requin sur la poitrine. Et Jérôme, 39 ans, dont les coups de gueule rappellent ceux de « Michou », leur père, décédé d'un cancer il y a un an. Lui, s'est battu contre le crabe et pour l'ostréiculture, dans le respect des hommes, pour l'amour du métier qu'il pratiquait à La Tremblade, et pour que soit préservé ce patrimoine naturel qui façonne un produit de renom : l'huître. Ses fils, eux aussi, ont lutté contre le cancer, et ils combattent pour l'entreprise familiale qui emploie sept salariés.
Suite dans Sud Ouest
Charente-Maritime : Freddy a remis les pieds sur terre
Il aura fallu une chute d’un grenier et deux mois d’immobilisation pour que Freddy Privat retrouve son bon sens. En difficulté en 2010, il a su se relancer.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
Il garde un souvenir précis de l'accident qui, en 2009, allait l'immobiliser au lit durant deux mois. Ce jour-là, Freddy Privat était monté dans le grenier de sa cabane ostréicole. « J'ai fait une chute. Diagnostic : triple fracture cheville-tibia-péroné. Physiquement, je ne pouvais plus travailler. »
Pour l'ostréiculteur, il ne fait aujourd'hui aucun doute que la dégringolade - au sens propre, comme au figuré - n'était que l'inéluctable issue de plusieurs années de tensions cumulées. « Je ne dormais plus, je n'avais plus d'objectif, je courais partout. C'est simple, je suis allé au clash... »
Quelque temps avant, le producteur marennais était allé une première fois au tapis. Les premières mortalités d'huîtres juvéniles venaient de le frapper. Un direct dans le ventre avec, à la clé, la perte de 53 % du stock, soit...
Pour ce médecin de Marennes-Oléron, les mortalités des huîtres affectent la santé des producteurs. Ils souffrent de dépression.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
Profession : médecin généraliste. Sous couvert d'anonymat (1), il témoigne de la détresse des ostréiculteurs qui franchissent la porte de son cabinet. Il est installé dans une localité du bassin de Marennes-Oléron. Quelques minutes de face à face suffisent à sérier sa passion pour le territoire ostréicole, son amour des hommes qui le façonnent. « Je fais un parallèle entre le monde ostréicole et le monde de la paysannerie », explique ce descendant d'une famille rurale de la Creuse. « Il y a ici une identité propre, culturelle, sociale, économique. Un patrimoine qui est à la fois maritime et terrien. Il y a cette mer et le bassin de Seudre, aux limites très précises. C'est vrai que l'Éguille et le Pays royannais ne se mélangent pas, aussi vrai que La Tremblade et la rive gauche de la Seudre constituent une identité singulière dans cet ensemble, et que le marais d'Artouan est une spécificité, ou que la pointe de Daire est une petite merveille que - fort heureusement - les touristes ne connaissent pas. Ce bassin, c'est un spectacle… »
Une identité forte
Il soigne depuis plusieurs années des familles d'ostréiculteurs, sur plusieurs générations, du patriarche nonagénaire, aux petits-enfants juste sortis des langes. Selon lui, nombre de logiques découlent de ces spécificités territoriales et patrimoniales, attachées aux contours d'un exercice professionnel rude et exigeant : « élever une huître n'est pas permis à tout le monde, et l'on peut parler d'identité propre à cette profession. Tout part de là : ils sont fiers d'être ostréiculteurs. Cela structure des projets de vie, des projets de succession, un projet global. Il y a un devenir et l'exploitant est fier de se dire que son fils pourra lui succéder… »
Mais avec les mortalités et la crise économique qu'elles ont installée dans la filière, ce qu'il raconte serait désormais à conjuguer au passé. Les regroupements d'entreprises ostréicoles sont en marche, qui lui donnent un autre élément de parallèle avec le monde rural. Et ces liens qui réunissaient, au-delà de l'ostréiculteur, mais à travers lui, les composantes de toute une filière professionnelle - de l'entrepreneur de travaux publics terrassant les claires d'affinage, à l'écailler de brasserie parisienne -, ces liens, selon cet observateur attentif, se dissolvent.
« Pression psychologique »
Les causes du malaise ostréicole ? Il les lit dans les contraintes économiques générales, doublées de celles propres à la profession : « la nécessité de rendement, la réflexion sur le coût de production, etc. entraînent une pression psychologique. À quoi s'ajoute, depuis 2008, la préoccupation permanente des mortalités d'huîtres. »
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Du 26 au 29 Août 2014
Charente-Maritime : Philippe Baroux donne la parole aux ostréiculteurs
Charente-Maritime : "Sud Ouest" donne la parole aux ostréiculteurs
A Bourcefranc, Etaules ou encore La Tremblade, le désespoir des professionnels se nourrit d'une sourde colère.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
Sept
années que les huîtres meurent ici, en Charente-Maritime, et ailleurs
dans le monde, confrontant les exploitants à des difficultés de gestion
de stocks, et d'équilibre comptable de leurs entreprises. Certains
surnagent. D'autres sombrent. Dans les marais du sommeil perdu,
quelques-uns de ces travailleurs de la mer nous ouvrent la porte de leur
coeur. Pour les abonnés, retrouvez toute cette semaine notre série sur
les sept années de crise du monde conchylicole.
Témoignage de Yann Bertin à La Tremblade : vidéo
Témoignage de Guillaume Got à Bourcefranc : vidéo
Témoignage de Freddy Privat à Etaules : vidéo
À Bourcefranc, le désespoir des professionnels se nourrit d’une sourde colère. Pascal Breuil ne contient plus la sienne.
Sur
les parcs d'élevage, la calculette est désormais plus utile que la
paire de cuissardes. Pascal Breuil fait et refait ses comptes. Et le
compte n'y est pas. Il n'y est plus. Depuis 2007. « L'an dernier, sur
les 13 tonnes que j'ai mises en poche, j'en ai vendu 1,4 tonne. Quand je
pense que les services de l'État nous disent que nous pouvons faire 30 %
de bénéfices. Ces gens-là ne savent pas ce que c'est de travailler dans
une entreprise ! » Anse de Daire à Bourcefranc, la colère brûle la
douceur du port ostréicole. On oublie le large méandre du chenal, on
ignore les planches colorées des cabanes, on ne voit plus, au loin, le
galbe franc du viaduc d'Oléron. Le vrai visage de l'ostréiculture n'est
pas un décor de carte postale. Pascal Breuil a le cheveu hirsute, les
yeux rougis par la peine. 75 hier, 11 aujourd'hui Un homme sur le fil,
qui avait 17 ans lorsqu'il a chaussé les bottes derrière trois
générations d'ostréiculteurs. Sa main embrasse le décor du passé. Il y
avait là 75 professionnels, et à l'époque où son aïeul récoltait le sel,
il était payé en Louis d'Or....
Suite dans Sud Ouest
Suite dans Sud Ouest
Charente-Maritime : « C’est une remise en question… puissance à l’infini »
Chez
les Bertin, le temps qui passe est un combat pour ne pas céder à la
lassitude. Las d’avoir perdu tout repère dans leur métier.
C'est une maman. Michèle est une mère tendre, douce, et attentive. Elle les connaît bien ses deux garnements. Yann, l'aîné, 41 ans, carrure de surfeur sous un marcel dévoilant de solides épaules, dent de requin sur la poitrine. Et Jérôme, 39 ans, dont les coups de gueule rappellent ceux de « Michou », leur père, décédé d'un cancer il y a un an. Lui, s'est battu contre le crabe et pour l'ostréiculture, dans le respect des hommes, pour l'amour du métier qu'il pratiquait à La Tremblade, et pour que soit préservé ce patrimoine naturel qui façonne un produit de renom : l'huître. Ses fils, eux aussi, ont lutté contre le cancer, et ils combattent pour l'entreprise familiale qui emploie sept salariés.
Suite dans Sud Ouest
Charente-Maritime : Freddy a remis les pieds sur terre
Il aura fallu une chute d’un grenier et deux mois d’immobilisation pour que Freddy Privat retrouve son bon sens. En difficulté en 2010, il a su se relancer.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
Il garde un souvenir précis de l'accident qui, en 2009, allait l'immobiliser au lit durant deux mois. Ce jour-là, Freddy Privat était monté dans le grenier de sa cabane ostréicole. « J'ai fait une chute. Diagnostic : triple fracture cheville-tibia-péroné. Physiquement, je ne pouvais plus travailler. »
Pour l'ostréiculteur, il ne fait aujourd'hui aucun doute que la dégringolade - au sens propre, comme au figuré - n'était que l'inéluctable issue de plusieurs années de tensions cumulées. « Je ne dormais plus, je n'avais plus d'objectif, je courais partout. C'est simple, je suis allé au clash... »
Quelque temps avant, le producteur marennais était allé une première fois au tapis. Les premières mortalités d'huîtres juvéniles venaient de le frapper. Un direct dans le ventre avec, à la clé, la perte de 53 % du stock, soit...
Suite dans : Sud Ouest
Pouls faible et dépression « Les ostréiculteurs ne rêvent plus »
Pour ce médecin de Marennes-Oléron, les mortalités des huîtres affectent la santé des producteurs. Ils souffrent de dépression.
Source : Sud Ouest par Philippe Baroux
« Il
y a une véritable rupture entre Paris, les élites politiques qui
prennent des décisions, et le quotidien des Français, et encore plus
avec le quotidien des ostréiculteurs. Et je sais de quoi je parle, j'ai
vécu dix-sept ans à Paris. »
Profession : médecin généraliste. Sous couvert d'anonymat (1), il témoigne de la détresse des ostréiculteurs qui franchissent la porte de son cabinet. Il est installé dans une localité du bassin de Marennes-Oléron. Quelques minutes de face à face suffisent à sérier sa passion pour le territoire ostréicole, son amour des hommes qui le façonnent. « Je fais un parallèle entre le monde ostréicole et le monde de la paysannerie », explique ce descendant d'une famille rurale de la Creuse. « Il y a ici une identité propre, culturelle, sociale, économique. Un patrimoine qui est à la fois maritime et terrien. Il y a cette mer et le bassin de Seudre, aux limites très précises. C'est vrai que l'Éguille et le Pays royannais ne se mélangent pas, aussi vrai que La Tremblade et la rive gauche de la Seudre constituent une identité singulière dans cet ensemble, et que le marais d'Artouan est une spécificité, ou que la pointe de Daire est une petite merveille que - fort heureusement - les touristes ne connaissent pas. Ce bassin, c'est un spectacle… »
Une identité forte
Il soigne depuis plusieurs années des familles d'ostréiculteurs, sur plusieurs générations, du patriarche nonagénaire, aux petits-enfants juste sortis des langes. Selon lui, nombre de logiques découlent de ces spécificités territoriales et patrimoniales, attachées aux contours d'un exercice professionnel rude et exigeant : « élever une huître n'est pas permis à tout le monde, et l'on peut parler d'identité propre à cette profession. Tout part de là : ils sont fiers d'être ostréiculteurs. Cela structure des projets de vie, des projets de succession, un projet global. Il y a un devenir et l'exploitant est fier de se dire que son fils pourra lui succéder… »
Mais avec les mortalités et la crise économique qu'elles ont installée dans la filière, ce qu'il raconte serait désormais à conjuguer au passé. Les regroupements d'entreprises ostréicoles sont en marche, qui lui donnent un autre élément de parallèle avec le monde rural. Et ces liens qui réunissaient, au-delà de l'ostréiculteur, mais à travers lui, les composantes de toute une filière professionnelle - de l'entrepreneur de travaux publics terrassant les claires d'affinage, à l'écailler de brasserie parisienne -, ces liens, selon cet observateur attentif, se dissolvent.
« Pression psychologique »
Les causes du malaise ostréicole ? Il les lit dans les contraintes économiques générales, doublées de celles propres à la profession : « la nécessité de rendement, la réflexion sur le coût de production, etc. entraînent une pression psychologique. À quoi s'ajoute, depuis 2008, la préoccupation permanente des mortalités d'huîtres. »
Suite dans : Sud Ouest
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