Offshore Leaks : Fondations US ?

Offshore Leaks : Attaque des fondations US ?

En pleine affaire Cahuzac, le quotidien Le Monde lance l’opération « Offshore Leaks »...

Le Monde, la Voix du soir des fondations américaines ! (1)

Selon Le Monde, « Offshore Leaks » représente une immense banque de données sur les sociétés offshore dans les paradis fiscaux, des informations secrètes et explosives entre les mains du Consortium américain d'investigation ICIJ : Comment le consortium américain d'investigation a traité les données.

Avant l'opération « Offshore Leaks », ICIJ avait frappé dans le domaine dans la pêche. A la même époque en 2012, ICIJ qui se qualifie comme un consortium de journalistes indépendants, avait fait des révélations sur la filière Pêche en Espagne, en Namibie et au Chili... avec la Surpêche en ligne de mire !

A ce moment là, l’industrie de la pêche découvrait pour la première fois les sponsors de ce groupe de journalistes : The David and Lucile Packard Foundation, Oak Foundation, Pew Charitable Trusts, Adessium Foundation, Open Society Foundations and Waterloo Foundation. De richissimes fondations pour la plupart étatsuniennes, parmi les plus grosses dans le monde et qui interviennent dans les activités pétrolières, l'éolien offshore, les réserves marines, le commerce,...

Ces fondations à l’origine de l’étude : Blue Charity Business

Après le retour à la nature sauvage (wilderness) des fondations américaines (voir l'étude ci-dessus), les journalistes d’ICIJ aspirent à l’intégrité de la vie politique ! En effet, le consortium de journalistes est une initiative du CPI : Center for Public Integrity.

Autres articles :

Pour aller plus loin...

Résumé du rapport "Aux paradis des impôts perdus"

Source : CCFD - Terres Solidaires

Longtemps ignorée ou minorée, la responsabilité des entreprises multinationales dans le pillage des recettes fiscales est devenue un objet de mécontentement de l’opinion.

Cliquer Ici pour télécharger le rapport "Aux Paradis des impôts perdus - Enquête sur l'opacité fiscale des 50 premières entreprises européennes" CCFD Terre Solidaire Juin 2013

Apple, Google, Glencore ou Starbucks, les récents scandales de mieux en mieux relayés par les médias, exposent aux yeux de tous, la faiblesse de la contribution fiscale des entreprises dans un contexte de raréfaction des ressources publiques. Un récent sondage Guardian / ICM poll a d’ailleurs révélé que 40% des britanniques se déclarent prêts à boycotter des entreprises qui pratiquent l’évasion fiscale [1].

Dans les pays en développement, l’enjeu est d’autant plus important que les flux financiers illicites vers les paradis fiscaux progressent à un rythme plus rapide que les économies, privant ainsi les populations d’une partie des retombées de la croissance actuelle. En 2010, près de 1138 milliards de dollars se seraient ainsi évaporés !

L’incapacité des administrations des pays en développement mais également des pays riches à lutter contre cette délocalisation artificielle des profits invite à revoir dans les meilleurs délais les règles du jeu pour mettre hors la loi les pratiques certes légales mais abusives qui y contribuent. Le sujet est cette année à l’agenda de tous les sommets internationaux. Après les chefs d’Etats de l’Union européenne, le 22 mai 2013, c’est au tour des pays du G8 (Sommet de Lough Erne des 17 et 18 juin 2013) puis du G20 (réunion des ministres des Finances les 19 et 20 juillet puis des chefs d’Etats en septembre) de s’atteler au problème. L’OCDE a été mandatée pour plancher sur des propositions concrètes de révision des règles de fiscalité internationale des entreprises multinationales. Les solutions sont en partie connues. Encore faudra-t-il le courage politique d’imposer des règles contraignantes de transparence aux multinationales afin de rétablir une juste réallocation des richesses créées, en particulier au bénéfice des pays en développement.

Pour encourager les chefs d’Etats à passer à l’action, le CCFD-Terre Solidaire, en partenariat avec la Revue Projet a renouvelé l’exercice déjà réalisé en 2010, d’analyser la présence des cinquante premières entreprises européennes dans les paradis fiscaux, à partir des documents publics produits par les entreprises.

Sans constituer une preuve d’évasion fiscale, la concentration massive de filiales dans les territoires les plus opaques de la planète, observée dans cette enquête, dévoile l’étendue du problème. D’autant qu’un grand secret entoure les comptes des 50 premiers groupes européens et leurs 208 milliards d’euros de profits cumulés en 2012. Impossible en effet de connaître la répartition géographique de leurs activités ou de s’assurer que la localisation des bénéfices correspond à la réalité de la richesse créée dans chaque pays de production ou de consommation.

Première surprise, le périmètre exact des 50 premières multinationales européennes est incertain. Seulement 60% d’entre elles donnent la liste exhaustive des filiales. Leur localisation est même impossible dans le cas de Total.

Aucune entreprise n’échappe à l’attrait des paradis fiscaux. Elles y détiennent en moyenne 117 filiales chacune, soit 29% de leurs filiales étrangères.

Les territoires européens abritent 63% de ces filiales offshore. Les destinations de prédilection sont, dans l’ordre, les Pays-Bas, l’État du Delaware (États-Unis), le Luxembourg, l’Irlande et les Îles Caïman, dépassant de loin les économies émergentes de la planète. Les 50 groupes étudiés ont aux îles Caïman davantage de filiales qu’au Brésil et deux fois plus qu’en Inde. Même la Chine n’attire guère davantage que le Luxembourg.

Cette présence dans les paradis fiscaux n’a pas diminué depuis 2009. Le nombre de filiales offshore dont elles révèlent l’existence ne cesse d’augmenter, même si la progression est moindre que celle du nombre total de filiales.

Enfin, les informations mises à disposition du public dans les rapports d’activité restent très parcellaires. Le peu de données disponibles révèlent déjà quelques anomalies et montrent surtout que l’information est disponible, quand l’entreprise le veut.

Alors que la mobilisation citoyenne et politique s’accroît, les propositions de la société civile commencent à être prises en compte. Des avancées historiques ont été obtenues récemment pour les banques et le secteur extractif au niveau européen. Mais le contexte politique actuel exige des mesures beaucoup plus ambitieuses, notamment la généralisation de la transparence comptable pays par pays pour tous les secteurs d’activité. L’objectif ? Rendre lisible les stratégies d’évasion fiscale des grands groupes et donner des armes efficaces aux administrations fiscales de tous les pays pour y mettre fin.

[1] Enquête réalisée par le Guardian et ICM poll « Four in 10 might join consumer boycott over tax avoidance », Tom Clark, 10 juin 2013

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(1) Autres informations....

Le Monde ne parle pas de ses liens même indirectes avec les fondations étatsuniennes !!!

Offshore Leaks : "Nous publierons une dizaine de noms français significatifs"

Source : Le Monde

Entretien | Le Monde.fr | 05.04.13 | 09h34     Mis à jour le 05.04.13 | 17h11

Le Monde publie les révélations d'une vaste enquête sur les paradis fiscaux, menée conjointement par l'International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ) et trente-six médias internationaux. Anne Michel, journaliste au Monde, explique dans un chat la méthode et les enjeux de l'"Offshore Leaks".

Daniel : Pourquoi la liste des 130 noms français n'est-elle pas rendue publique ?

(...)

Nicolas : Comment êtes-vous rentrée en contact avec ICIJ ?

Nous avons publié en 2012 deux de leurs enquêtes, l'une sur la corruption dans les milieux de la pêche, et l'autre sur le trafic international de tissus humains. ICIJ a pris contact avec notre directeur adjoint, Serge Michel, en novembre 2012, pour nous proposer de participer à cette opération collective.

Pendant deux mois, tous les contacts se sont faits par messagerie cryptée et par Skype, car le consortium était très inquiet à l'idée de fuites éventuelles et de tentatives de piratage.

QuiDame : Bonjour et bravo ! En dehors d'Augier, y a-t-il dans la liste des 130 Français d'autres personnalités liées à des hommes politiques ?

Pas directement, mais dans les listes suisses, auxquelles nous avons aussi accès grâce à nos partenaires sur place, la banque et la fiduciaire Reyl apparaît de façon assez massive. C'est elle qui a géré les avoirs de M. Cahuzac à Genève, puis à Singapour. Nous en rendrons compte dans Le Monde qui paraît samedi après-midi.

Don lopez : Avez-vous subi des pressions ?

Non, nous n'avons subi aucune pression. En revanche, les gens que nous avons contactés pour leur annoncer qu'ils étaient dans la liste ont souvent réagi avec grand embarras.

Visiteur : Pourquoi les documents n'ont-ils pas été donnés à tous les médias ? Avez-vous des règles à respecter ? Qui définit la liste qui fait "sens", comme vous dites ?

Le consortium ICIJ a choisi un grand média par pays. En France, Le Monde. Nous avions une première règle à respecter sur l'embargo du 4 avril. Nous sommes aussi tenus de ne pas partager avec des tiers les documents en notre possession. Il nous a été demandé de ne pas publier certains documents d'identité scannés qui apparaissaient dans les fichiers.

Nous avons nous-mêmes décidé quels noms nous allions révéler en fonction des documents que nous avions sur ces personnes et de l'exemplarité de leur cas pour éclairer les pratiques dans le monde des paradis fiscaux. Au-delà des noms, il s'agit en effet de pointer l'incroyable opacité qui perdure dans ces territoires dérégulés, quatre ans après le fameux G20 d'avril 2009 qui a suivi la crise financière de 2007 et a vu les grandes puissances déclarer la guerre aux paradis fiscaux non coopératifs.

Gérard : Quelles garanties avez-vous reçues qui vous permettent de penser que ces informations étaient vraies et non manipulées ?

La masse de documents, leur homogénéité et les détails apparaissant ici ou là ont conduit l'ICIJ à estimer qu'il s'agissait de documents authentiques.

Par la suite, le Guardian, à Londres, a publié un article en janvier 2013 sur la base de ces documents, mais sans mentionner la fuite massive, et qui a eu valeur de test. Enfin, dès que nous avons appelé les personnes mentionnées dans les documents, leur aveu immédiat nous en a apporté la preuve définitive.

Le K. : Quel est l'avenir de ces documents ? Seront-ils un jour disponibles sur Internet ?

Certains partenaires de l'opération en ont publié quelques-uns sur leur site. Nous ne l'avons pas fait parce qu'ils sont très techniques et difficilement lisibles. Pour l'instant, ces documents restent la propriété de l'ICIJ. Nous tenons surtout à pouvoir continuer à y accéder afin de poursuivre nos enquêtes.

Contribuable écœuré : A combien évaluez-vous le manque à gagner cumulé pour l'Etat français ?

Le manque à gagner pour le budget de l'Etat est de plus de 50 milliards d'euros chaque année.

Arthur : Les informations que vous nous avez fourni sont-elles vérifiées ?

Nous avons travaillé dans la plus grande rigueur en vérifiant chacune des informations que nous avons publiées. Au moment de l'étude des documents, nous avons dû les analyser, les comparer et, parfois, échanger avec nos confrères à l'étranger.

Jean Michel : Pourquoi avoir jeté en pâture et en premier le nom du trésorier de la campagne du président ?

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Offshore Leaks n'est pas donné à tous les médias

Source : La Tribune de Genève par Matthieu Hoffstetter, Pascal Schmuck.

Le 4 avril 2013

Dans la sélection des médias qui ont pu décortiquer puis publier ce jeudi les documents Offshore Leaks, l'Europe et l'Amérique latine se taillent la part du lion (respectivement 21 et 7 médias), tandis que l'Amérique du Nord (2), l'Afrique (2) et l'Océanie (0) sont moins présents. En Asie, les régions du Sud et du Sud-Est (Pakistan, Inde, Thaïlande, Malaisie, Philippines) sont représentées, mais le Moyen-Orient, la Chine et l'Asie centrale sont absents.

Tous, ils représentent un réseau de plus de 80 journalistes réunis sous la bannière du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) basé à Washington. Un titre se distingue toutefois, The Guardian, qui a été le premier à divulguer des noms de personnes impliquées. Des identités qui ont ensuite été reprises par d'autres médias (associés au Consortium ou non), mais sans qu'aucun autre nom ne soit dévoilé.

En tout cas, les noms qui sont sortis pour le moment semblent destinés à ferrer l'attention du grand public. Elus, familles de dirigeants politiques, personnalités du monde de l'art et du négoce: les profils et les origines géographiques sont divers.

Des liens avec la politique

Un lien semble toutefois apparaître: tous ont ou ont eu par le passé un lien financier avec un parti politique. Un lien qui demande à être confirmé d'ici ce week-end: 2,5 millions de fichiers et les comptes de 120'000 sociétés offshore figureraient dans les dossiers Offshore leaks. Soit plus de 160 fois le volume concerné par les révélations Wikileaks.

A l'échelle française, on note un absent de marque: le journal en ligne Mediapart. A la pointe dans l'affaire Cahuzac, le site d'investigation ne figure pas dans la liste des médias validés par l'ICIJ. Selon son concurrent Rue89, «Mediapart était candidat, mais n'a pas été retenu». En France, seul le quotidien Le Monde a pu travailler sur ces documents.

Le précédent Wikileaks

Une situation qui rappelle l'affaire Wikileaks: le quotidien du soir avait également été choisi pour divulguer les informations issues des télégrammes de la diplomatie américaine. Cependant, d'autres médias n'ont pas eu cette chance: en Suisse, Le Temps et la Neue Zürcher Zeitung avaient pris part aux révélations en 2010, mais ce sont Le Matin Dimanche et la SonntagsZeitung qui pourront lever le voile sur les documents ce week-end.

Même cas de figure dans d'autres pays européens. En Allemagne, le quotidien Süddeutsche Zeitung et la radio Norddeutscher Rundfunk (NDR) se substituent au magazine Der Spiegel. En Espagne, le site internet El Confidencial remplace El Pais. (Newsnet)

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Les stratégies de communication de guidage des opinions publiques

En prenant l'exemple du lobbying des ONGE sur la réforme de la Politique Commune de la Pêche

Source : Blue Charity Business (à partir de la page 34)

Comme évoqué dans le modèle US, ces mouvements travaillent par campagnes de lobbying appuyées sur des outils de communication très performants. Mais ce n’est pas tout, ils utilisent des agences de communication très renommées : Fenton Communication, Communication inc., et des outils de communications tels qu’Oceans inc. ou des films tels que « The End of the line »

Ces campagnes utilisent toujours les mêmes stratégies de communication :

Stratégie 1 : s’appuyer sur la science et le dire-d’expert pour développer le « science-based lobbying ». Médiatisation des résultats scientifiques dans les quotidiens nationaux. Jeu sur l’émotion et sur l’indignation.

Stratégie 2 : construire un réseau de relais et communiquer par communiqué de presse calés dans un timing coordonné. (simultanéité des informations à l’échelle européenne, réseaux relais journalistes environnementalistes « éduqués », dépêche AFP reprise en boucle par les blogs environnementalistes in extenso et justifiée par la science financée par les fondations), soutiens de personnalités célèbres.

Stratégie 3 : multiplier l’image de David Contre Goliath, du petit gentil qui abat le grand méchant. Petite ONG contre gros lobbys pêche, petits pêcheurs contre gros industriels, etc. Donner l’impression au citoyen de participer à un combat.

Stratégie 4 : Mettre en tension l’opinion puis apporter la solution. Des années de message de surpêche viennent de trouver une porte de sortie en septembre 2012, de nouveaux partenariats et des droits de pêche sécurisés.

Stratégie 5 : maîtriser le calendrier et établir des synergies entre les ONGE européennes.
Les parutions presse sont coordonnées au niveau européen et avec les échéances de négociations. Cf. tableau suivant également.

Stratégie 6 : ultra simplifier les problématiques et laisser le flou sur les non-dits. Association de concepts qui n’ont rien à voir mais indétectables pour des non spécialistes : Un pêcheur artisan est uniquement un très petit pêcheur artisan, et donc les autres sont industriels ; associer systématiquement l’idée du Fonds Européen Pêche, outil financier, à un article parlant de surpêche ; Systématiquement associer l’image de la surpêche à un article parlant des océans (ex : acidification) même si la thématique ne le jus tifie pas ; essayer de souder des chiffres tels que 85% des stocks sont sur ou pleinement exploités par la FAO (en fait 35% sont surexploités et 50% sont au Rendement Maximum Durable selon la FAO). 


Pour aller plus loin....
Le collectif à l'origine de l'«Offshore Leaks»

Source : Le Figaro

Les données sur les sociétés offshore révélées par ce consortium ne sont pas les premiers scoops de cette organisation, créée en 1997 et qui rassemble 160 reporters.

• Qu'est-ce que l'ICIJ ? L'International Consortium of Investigative Journalists est un réseau indépendant de journalistes d'investigation travaillant sur des dossiers internationaux, basé à Washington aux Etats-Unis. Il émane de l'association à but non lucratif Center for Public Integrity, fondée en 1989 par le producteur du magazine d'information américain de CBS «60 Minutes», Charles Lewis.

• Quelle est sa mission ? Sur son site l'ICIJ se fixe comme objectif de répandre «le journalisme de chien de garde» et de creuser les «problématiques qui ne s'arrêtent pas aux frontières: criminalité, corruption et transparence du pouvoir». Concrètement, les journalistes de l'ICIJ ainsi que ses spécialistes informatiques, ses avocats et ses vérificateurs fournissent à des confrères du monde entier des données et des outils d'analyse. Les projets sur lesquels travaille l'ICIJ peuvent regrouper de 3 jusqu'à 86 rédacteurs (comme pour Offshore Leaks). Ensuite pour diffuser ses découvertes, l'ICIJ s'associe avec de nombreux médias étrangers qui publient ses conclusions. Les partenaires habituels de l'ICIJ sont Le Monde, El Mundo, BBC, Le Soir, The Age, Stern, The Guardian…

• Qui est membre de l'ICIJ ? Le réseau totalise 160 plumes répartis dans 60 pays. Son dirigeant, le journaliste australien Gerard Ryle, qui a apporté dans ses bagages le disque dur d'Offshore Leaks, est secondé par huit permanents. Entrer dans l'ICIJ se fait sur invitation du consortium. Vu l'ampleur d'Offshore Leaks, l'ICIJ a préféré plutôt que de mobiliser une petite cellule de membres s'adresser à des journalistes du monde entier, à qui a été donnée une liste de noms à identifier.

• Quelles ont été les révélations l'ICIJ ? L'ICIJ a signé des enquêtes sur le trafic de tissus humains, sur la surpêche et le pillage des océans (deux sujets publiés en France par Le Monde), sur les pratiques des multinationales du tabac, sur le scandale de l'amiante dans les pays en voie de développement et sur les retombées des conflits afghan et irakien pour les entreprises américaines. L'ICIJ a remporté plusieurs prix journalistiques.

• Comment est-il financé ? Le consortium fonctionne grâce aux dons de particuliers et de fondations comme Adessium Foundation, Pew Charitable Trusts ou Open Society Foundations de George Soros. L'ICIJ a quelques détracteurs qui l'accusent d'être plutôt orientée à gauche. En 2012, le site Web d'informations politiques Politico citait deux exemples où des organisations soutenant les projets de l'ICIJ avaient pris parti sur les sujets abordés. Pew Charitable Trusts, qui a projeté le documentaire né des travaux de l'ICIJ sur la pêche, faisait ainsi partie d'un collectif d'ONG appelant à la sauvegarde du thon rouge.

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Paradis fiscaux : Offshore leaks : un gros pétard mouillé ?


Ce que nous a révélé jusqu'ici l'Offshore leaks, c'est du vent, écrit Bilan. Le magazine économique suisse s'interroge : qui est derrière cette liste et à qui profite cette opération ?

Source : Courrier International par Myret Zaki |

5 avril 2013

Un dessin de Walenta            Un dessin de Walenta           

"Offshore Leaks". Un beau matin d'avril, l’opération ainsi baptisée nous tombait du ciel, sous forme d’annonces coordonnées de plusieurs journaux internationaux, à grand renforts de teasers et de mises en appétit sensationnelles. On allait nous révéler les dessous du monde opaque de l’évasion fiscale internationale. De grands noms d’évadés fiscaux illustres allaient sortir. Des personnalités de haut rang seraient compromises.

Mais concrètement, seule la taille de l’opération était au centre des premiers articles : le nombre de documents concernant des sociétés offshore (2,5 millions !), le nombre de sociétés offshore dévoilées (122 000 !), le nombre de Gigaoctets que pèsent les données (260 !). Des chiffres se voulant impressionnants, des promesses d’informations plus que juteuses.

Un seul nom en France, un mort en Suisse

L’opération, qui portait déjà un nom très vendeur à sa sortie, faisant opportunément référence au fameux site Wikileaks, est organisée en tous points à la manière de la sortie d’un iPhone 6 par Apple, sauf qu’ici, c’est le Consortium international des journalistes d’investigation qui en est à l’origine, même si les données en elles-mêmes lui sont tombées rôties dans la main, il y a un an, lorsqu’il a reçu un paquet anonyme contenant un disque dur de données volées. La distillation des informations par les journaux, opération soigneusement concertée, semble suivre un planning bien préparé, chaque journal sortant au même instant un article sur l’opération, mais qui pour l’heure laisse perplexe en termes d’apport concret d’informations.

S’agit-il d’un pétard mouillé ? Il est peut-être prématuré d’émettre un avis à ce stade. Mais jusqu’ici, ce qu’on a, disons-le, c’est du vent. Sur les 130 noms français dévoilés, il n'y en a qu'un de connu : celui de Jean-Jacques Augier, le trésorier de la campagne présidentielle de François Hollande, sur lequel on a uniquement des révélations à ce stade bénignes : il a ouvert durant les années 2000 deux sociétés aux Iles Caïmans, ce qui en soi n’a rien d’illégal à moins de prouver qu’il les a utilisées pour cacher des revenus non déclarés ou de l’argent d’origine criminelle.

Pour la Suisse, on a pour l’instant le nom d’un mort, le photographe Gunter Sachs, qui aurait détenu entre 1993 et 2007 deux sociétés offshore aux Iles Cook, ainsi que cinq trusts. Clairement, l’héritier de la fortune de la famille von Opel a recouru à des arrangements permettant, si ce n’est d’évader entièrement les impôts, du moins clairement de les minimiser. Il est toutefois certain que des vivants aussi recourent à ces structures, mais les connaîtra-t-on ?

Pour le reste, surgissent de-ci de-là des mentions de dentistes américains, d'anciens politicaillons asiatiques, de collectionneuse d’art espagnole. Rien de fracassant. Au demeurant, pour mettre les choses en perspective, soulignons que les 120 000 sociétés offshore dévoilées par cette "méga-opération" pâlissent quand on sait que les seuls trois Etats américains du Delaware, du Wyoming et du Nevada renferment plus de 700 000 sociétés offshore. Aura-t-on la moindre information pertinente sur ces juridictions-là qui figurent parmi les plus opaques au monde ?

Hyperventilation

Par ailleurs, il manque l’essentiel. Lorsqu’on dévoile ainsi une base de données volée à des intermédiaires financiers des Iles Vierges Britanniques et de Singapour, la première chose que l’on attendrait d’un consortium de journalistes d’investigation, c’est qu’il nous informe sur l’identité du voleur. Qui donc a piraté ces données ? D’où vient ce mystérieux disque dur, arrivé dans un paquet anonyme? Avant de s’enthousiasmer et d’avaler tout droit ces informations, il convient de s’interroger sur qui a intérêt à les livrer ainsi en pâture, et qui sera balancé aux médias, et qui sera éventuellement protégé. Comment le lecteur peut-il être sûr qu’un gouvernement intéressé n’est pas derrière cette opération ? A l’époque des enquêtes sur les activités d’Al Qaïda en Suisse, par exemple, des renseignements étaient directement faxés par le gouvernement américain à certaines rédactions, sans que cela ne soit mentionné dans les articles.

Dans le cas présent, si le Consortium international de journalistes d’investigation s’est engagé à ne pas divulguer la source, qu’il le dise clairement. Mais il manquera toujours, aux lecteurs, cette information essentielle. Dans le cas de Wikileaks, au moins, on savait qui étaient les opérateurs du site. Dans le cas du livre d’Antoine Peillon sur UBS France, sur lequel j’ai pourtant émis un certain nombre de critiques, il avait le mérite de n’avoir pas fait secret du fait que la plupart de ses informations provenaient des services de renseignements français.

Dans le cas des CD volés au Liechtenstein et à la banque HSBC à Genève, et des données sorties de la banque Julius Baer aux Caïmans, on connaissait l’identité des "agents" ayant fait sortir les informations : Heinrich Kieber, Hervé Falciani, et Rudolf Elmer. Quant à Offshore Leaks, on attend toujours de savoir de qui provient ce disque dur, information totalement passée à la trappe. Mais surtout, après toute cette hyperventilation, lorsqu’on en viendra aux informations concrètes, qu’est-ce qui en sortira, au final ?

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Le 7 Juillet 2014

Comprendre le crime organisé en Afrique

En Afrique, le crime organisé touche aussi les produits issus de la pêche

Les points clés
De nouveaux outils sont nécessaires pour analyser le crime organisé
Des structures gouvernementales financées par le crime
Porte ouverte au crime dans les États les plus faibles
Besoin de solutions axées sur le développement

Source : IRIN - New York - 7 juillet 2014 

Les préoccupations croissantes concernant le rôle du crime organisé dans l’instabilité et la pauvreté sur le continent africain ont motivé une quête d’outils analytiques et un appel à de plus amples recherches pour comprendre les forces contextuelles en jeu et savoir comment s’y attaquer au mieux.

Si à l’origine les débats sur le crime organisé se concentraient principalement sur le monde développé, puis sur l’Amérique latine et l’Asie centrale, l’attention s’est maintenant tournée vers l’Afrique. « Alors que les analystes mettaient en doute l’existence d’un problème de crime organisé en Afrique, ce sujet est désormais considéré comme une préoccupation typiquement africaine », peut-on lire dans le rapport Unholy Alliances: Organized Crime in Southern Africa (Alliances infâmes : le crime organisé en Afrique méridionale), publié par la Global Initiative against Transnational Organized Crime (Initiative mondiale contre le crime organisé transnational) et Rosa Luxemburg Stiftung et qui se fonde sur les discussions d’un comité d’experts qui se sont réunis plus tôt cette année. Le rapport remarque que sur le nombre croissant de mentions et de résolutions faites par le Conseil de sécurité des Nations Unies ces huit dernières années, 80 pour cent concernaient l’Afrique.

Les experts du comité ont suggéré de ne pas « montrer du doigt » le continent ni les États qui le composent, car « les États les plus développés du monde trouvent leur origine dans la corruption et le crime organisé ». En outre, à l’heure où l’on cherche des solutions, « le rôle des pays occidentaux et de leurs entreprises en Afrique doit être au premier plan en tant qu’exploitants et consommateurs ».

L’attention portée à l’Afrique coïncide avec la prise de conscience, au cours des dix dernières années, non seulement que le crime organisé menace le développement, mais que des solutions axées sur le développement sont nécessaire pour le combattre.

Le crime organisé sur le continent fait partie de « l’histoire de son indépendance », est-il écrit dans le rapport. La fin de la guerre froide et les coupures dans l’aide au développement ont ouvert la voie au financement criminel des structures gouvernementales. En outre, « la démocratie multipartite et la nécessité de financer les processus électoraux ont constitué un point particulièrement vulnérable qui a permis aux réseaux de gagner en influence et en légitimité ».

La demande croissante en Asie et au Moyen-Orient de biens tant licites qu’illicites a alimenté le trafic en Afrique. « Le marché florissant des drogues à usage récréatif et des produits de la flore et de la faune sauvages ont entraîné la croissance, la professionnalisation et la militarisation des réseaux criminels en Afrique. Parallèlement, la demande de drogues à usage récréatif dans les pays du Golfe et l’instabilité en Afrique du Nord ont attiré le trafic vers l’est », précise le rapport. Avec la hausse de la consommation d’amphétamines sur les marchés émergents du Golfe et d’Asie, la production de drogue n’est plus réduite à des zones géographiques spécifiques. En Afrique méridionale, les itinéraires de contrebande d’armes des guerres d’indépendance sont maintenant empruntés par les trafiquants d’espèces sauvages et autres biens illicites.

Selon Mark Shaw, directeur de la Global Initiative against Transnational Organized Crime, outre quelques exemples tels que les gangs du Cap-Occidental en Afrique du Sud ou les caractéristiques du crime organisé au Nigeria, les définitions classiques du crime organisé ne s’appliquent pas à l’Afrique. « Ce n’est pas quelque chose que l’on peut mettre dans une boîte et qui se produit indépendamment de l’État et des institutions commerciales. Sur le continent, le crime organisé et bien plus manifestement lié à ces institutions. »


Une « économie de la protection »

M. Shaw invoque la notion d’« économie de la protection » pour illustrer comment les différents acteurs interagissent dans les pays dont le gouvernement dispose de faibles capacités. Il identifie trois éléments clés intrinsèques à l’économie de la protection : premièrement, le recours à la violence ou à des « personnes armées » pour assurer la sécurité du transport de marchandises de contrebande, qui peuvent aller de soldats des forces de sécurité elles-mêmes à des milices, en passant par les gangs et les sociétés de sécurité privées ; deuxièmement, la corruption, dont les pots-de-vin versés à certains fonctionnaires ; et troisièmement, l’investissement des groupes criminels dans les communautés pour assurer leur légitimité et faciliter les opérations : paiements à des partis politiques ou financement d’équipements locaux, par exemple.

« Cela permet de mieux comprendre le crime organisé dans le contexte particulier d’un État faible ou incapable d’assurer la sécurité. Vous pouvez alors observer le large éventail d’acteurs gouvernementaux, d’entreprises, de réseaux criminels ou de communautés et comprendre leurs interactions », a ajouté M. Shaw, qui croit que chaque réseau criminel majeur opérant sur le continent comporte ces trois éléments à divers degrés. Là où l’État est particulièrement faible, « l’économie de la protection est plus prononcée », a-t-il précisé.

Si le phénomène d’économie de protection n’est pas réservé à l’Afrique, il est manifestement présent dans de nombreux pays du continent. L’implication de l’État varie selon les pays. En Guinée-Bissau, l’État participe complètement à l’économie de la protection, tandis qu’au Mali, certains acteurs locaux du crime organisé ont des liens avec l’État. En Libye, où de larges portions du territoire échappent au gouvernement, « la protection est offerte par des prestataires privés, souvent liés à certaines milices ».

Lorsque le crime, l’État et la politique sont imbriqués de cette manière, les réponses classiques fondées sur la loi et l’ordre – telles que la saisie des produits de contrebande et l’arrestation des coupables (souvent ceux qui se trouvent au bas de l’échelle hiérarchique) – ne sont pas une solution, a remarqué Stephen Ellis, chercheur au Centre d’études africaines de Leiden, aux Pays-Bas.

Des frontières qui s’estompent entre les sociétés légitimes et illégitimes

M. Ellis cite comme exemple les efforts vains pour combattre le trafic de drogue en Afrique de l’Ouest. Selon lui, les contingents chargés de défendre la loi et l’ordre ont généralement le sentiment de ne pas pouvoir lutter de manière adéquate contre le crime organisé, parce qu’ils « n’ont pas les bons outils. La nature du problème a changé, mais de manière difficile à comprendre », a-t-il ajouté, remarquant que les frontières entre les sociétés légitimes et illégitimes se brouillent, notamment dans les États dits défaillants ou faillis. « La notion d’État “failli” est un terme que je n’aime pas, a ajouté M. Ellis, car cela ne correspond pas nécessairement à ce qui se passe sur le terrain. » Il s’agit cependant d’un outil utile pour identifier les pays dont le gouvernement n’a pas le monopole de la violence, a-t-il convenu. D’après le classement de Foreign Policy, sur 50 États en déliquescence, 32 se trouvent en Afrique.

« De nombreuses personnes impliquées dans des activités illégales peuvent bénéficier d’une grande légitimité au niveau local », a dit M. Ellis. « Ces personnes peuvent avoir joué un rôle politique officiel, notamment à l’époque des États à parti unique. »

Selon un récent rapport de la Commission Ouest-Africaine sur les Drogues, les activités des trafiquants dans la région sont facilitées « par un large éventail de personnes, parmi lesquelles des hommes d’affaires, des hommes politiques, des membres des forces de sécurité et de l’appareil judiciaire, des hommes d’église, des chefs traditionnels et des jeunes ». Comme les élections dépendent de financements privés dans la plupart des pays de la région, l’argent de la drogue y contribue souvent.

« [les activités des trafiquants sont facilitées] par un large éventail de personnes, parmi lesquelles des hommes d’affaires, des hommes politiques, des membres des forces de sécurité et de l’appareil judiciaire, des hommes d’église, des chefs traditionnels et des jeunes »

Les exemples d’implication de l’État et d’hommes politiques dans le crime organisé sur le continent sont légion – du braconnage d’éléphants et commerce de l’ivoire qui impliquent de nombreux pays, dont le Zimbabwe, le Soudan, la République démocratique du Congo, la Tanzanie et le Mozambique, à l’exploitation des mines de diamant au Zimbabwe en passant par le trafic d’armes en Afrique du Sud, le commerce de corne de rhinocéros (Afrique du Sud et Mozambique), la contrebande et le trafic d’armes et de drogue en Libye et au Sahel, le trafic de drogue et l’exploitation forestière illégale en Guinée-Bissau, le trafic d’ivoire, d’or et de diamant en République centrafricaine, etc. La liste est interminable.

M. Shaw pense que l’outil d’analyse de l’économie de la protection permet de « déterminer les coûts de [ces] économies [...] et de mesurer les progrès réalisés à leur égard ». Selon le rapport de Global Initiative, « la prise en compte des économies de la protection et de leur fonctionnement est un outil analytique qui incite à s’intéresser à un éventail plus large de problèmes et d’acteurs et l’on peut donc considérer qu’il accroit la probabilité d’une amélioration des interventions ». Selon M. Shaw, on peut faire augmenter les coûts de protection qu’impliquent la participation au crime organisé en renforçant le risque d’exposition par des enquêtes persistantes de la part des médias, par exemple, ou en aidant les communautés à devenir plus résilientes à l’introduction de groupes criminels en menant des projets de développement efficaces.

Un terrain dangereux pour les journalistes

Enquêter sur le crime organisé est plus facile à dire qu’à faire. Une étude du Comité pour la protection des journalistes (CPJ) montre que 35 pour cent des journalistes tués depuis 1992 couvraient des affaires de crime organisé et de corruption, ce qui est souvent plus dangereux pour les journalistes que de couvrir des conflits. « Les lignes entre les groupes politiques et criminels sont floues dans beaucoup de pays, ce qui accroît le risque pour les reporters », précise le Comité.

« Les groupes criminels opèrent de plus en plus comme des forces politiques armées, et les groupes politiques armés opèrent de plus en plus comme des bandes criminelles à but lucratif. Des journalistes ont été attaqués alors qu’ils effectuaient des reportages sur une complicité entre de grandes figures criminelles et des fonctionnaires de gouvernement, et ils ont été ciblés tandis qu’ils faisaient des investigations sur des histoires de crime ou de corruption aussi bien en temps de paix que de guerre », a expliqué le CPJ.

Les acteurs du développement se voient de plus en plus souvent obligés de lutter contre le crime organisé, à mesure qu’ils reconnaissent à quel point ce phénomène est présent à tous les niveaux de la société et se nourrit de la pauvreté, sabotant les programmes de développement. Au Sahel, par exemple, les communautés dépendent des gains du crime organisé de la même manière qu’en Somalie elles dépendent des gains de la piraterie ou que les villageois du Mozambique dépendent du braconnage de cornes de rhinocéros. En l’absence de solutions alternatives, les communautés pauvres demeureront à la solde du crime organisé.

Selon un récent rapport de Safer World intitulé Identifying approaches and measuring impacts of programs focused on Transnational Organized Crime (Identifier les approches et mesurer les impacts des programmes axés sur le crime organisé transnational), le crime organisé transnational devient rapidement un problème clé dans le domaine du développement et les approches basées sur le développement pour lutter contre ces crimes sont de plus en plus nombreuses. « Le principal moteur du [crime organisé transnational] est la demande de produits illicites dans les pays riches et développés. Pourtant, les impacts sont ressentis bien plus profondément par les communautés des pays plus pauvres dont les institutions sont faibles. » Selon le rapport, « l’existence de liens entre les différents niveaux du système dans lequel opère le crime organisé transnational permet également de penser que des stratégies globales faisant appel à différentes approches ont des chances d’avoir un plus grand impact. »



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Le 23 septembre 2014

Urgent : Relecture de la filière pêche sous l'angle géopolitique...

La relecture de la filière pêche sous l'angle géopolitique est urgente. 


La France détentrice de la plus vaste superficie maritime, après les USA, est fondée à mettre en œuvre, une politique courageuse de protection de ses zones maritimes. Le contrôle des AMP, la cohabitation entre l'activité halieutique, son maintien, et l'exploitation pétrolière en mer profonde nécessite de fortes avancées diplomatiques. Les alliés traditionnels de la France comme les USA ont plus intérêt à participer à la préservation des océans, à nos côtés, qu'à servir de cadre à des manigances fumeuses et gravement destructrices.

Décryptage de Richard Honvault - Conseiller municipal (UDI/Nouveau Centre) de Boulogne-sur-Mer et Secrétaire national du Nouveau Centre en charge de la pêche, de la mer et de l'économie portuaire

La pêche en eau profonde, un nouvel enjeu géopolitique ?

Source : Huffingtonpost / 23/09/2014

Une vaste opération, à caractère géostratégique, est menée pour confisquer de vastes espaces maritimes et océaniques au bénéfice exclusif des intérêts américains. Cette manipulation est relayée en France et dans le monde par des ONG en relation étroite avec les acteurs américains de cette entreprise.

D'après l'excellente enquête de Yan Giron sur le trust caritatif américain PEW et l'article de Stéphane Foucart paru dans Le Monde Planète le 9/07/2014, se dessine un nouvel eldorado et les prémices d'une guerre économique violente, au détriment des océans, sous bannière écologique. La France, 2ème espace maritime mondial, après les USA, doit-elle laisser faire?

Le 10 décembre 2013, les eurodéputés rejettent l'interdiction de la pêche en eau profonde mettant en échec l'association Bloom un puissant lobby écologique. La méthode de Bloom, dirigé par Claire Nouvian, illustre la stratégie de communication dite "création de certitudes" visant à contredire les rapports scientifiques d'Ifremer, favorables à la pêche en eaux profondes, par des contre rapports légitimant cette interdiction et par une pétition de 300 scientifiques, tous liés au trust caritatif PEW !

1/3 des pétitionnaires sont étudiants ou doctorants d'institutions scientifiques américaines directement financées par PEW et les 2/3 restants sont des bénéficiaires via des réseaux comme Sea Around Us doté à plus de 20 millions de dollars, par PEW.

Au nom de la défense de l'environnement et de la faune maritime, la pêche de grand fond serait interdite dans des Aires Marines Protégées (AMP) ce qui faciliterait de futures extractions minières offshore au profit d'intérêts politico-économiques américains. Les trusts caritatifs comme PEW sont au cœur du lobby des ONG visant à la création des AMP dans le monde.

En 2009, le Royaume-Uni, ciblé par les lobbies écologiques américains, a adopté le "Marine and Coastal Access Act" (loi d'accès maritime et côtier) qui instaure une catégorie spécifique d'AMP, les MCZ (marine conservation zone) ou zones de préservation de la biodiversité des fonds marins. Prévue en 2013, l'officialisation par le gouvernement britannique des 127 MCZ, est différée.

La communauté maritime française craint que ces MCZ ne menace gravement l'activité des flottes de pêche. La sanctuarisation de plus de 50% des zones, interdisant de fait la pêche induit la disparition du droit de pêche, de 5 000 emplois directs et de notre souveraineté maritime. Interrogé sur ce point, par Hervé Morin, (question parlementaire JO du 18/12/2012), le ministre des transports, F Cuvillier s'est voulu rassurant (réponse p7578, JO du 16/07/2013). Depuis lors, aucun point d'étape n'a été communiqué par les services de l'État.

Le PEW Charitable Trusts est intervenu, sur la réforme communautaire de la pêche et son interdiction en grand fond. Ciblant le parlement européen et l'opinion publique de l'UE, PEW est à la base d'un consortium d'ONG, regroupant OAK Fundation, Adessium (Hollandaise), le WWF, Greenpeace et Birdlife international, mobilisant 140 millions de dollars. L'argumentaire scientifique est établi par l'université de Colombie britannique pour un coût de 2à millions de dollars payé entièrement par PEW.

Les cartes établies par "Blue Lobby" pointent la superposition d'enjeux (pêche, défense, commerce, terres rares marines) dans les zones visées, attirant les appétits américains. Des lobbies réclamant la création de ses AMP, financés ou en lien avec les administrations et les compagnies pétrolières américaines, affirment que l'exploitation pétrolière serait un mode durable de financement de la préservation des mers citant les études d'impact financées par ces industriels liés à PEW!

La famille PEW qui a fait fortune dans le pétrole, créé, dans les années 80, son trust caritatif le "PEW Charitable Trusts" avec un capital de 5 milliards de dollars placé sur les marchés financiers internationaux, générant des gains annuels de 300 millions de dollars, défiscalisés (conformément aux lois US) et affectés au programme d'actions du trust. Classé 12ème aux USA, ce trust serait devenu organisateur et financeur du lobby "Océan" d'autres ONG.

Le prisme écologique du PEW Charitable Trusts est lié au recrutement de Joshua Reichert organisateur reconnu des larges campagnes de lobbying environnemental depuis 1991. En 2011, la part « Océan » représentait 50% des activités de puissance (lobby auprès des élus) et 32% du total des activités du trust, soit 100 millions de dollars par an.

Les trusts, tel que PEW, cherchent à investir tous les espaces régaliens nationaux ou internationaux en opacifiant les liens de dépendances publics/privés.

De 2009 à 2013, PEW génère du lobbying afin que les USA ratifient la Convention des Nations Unis sur les droits de la mer. La campagne de PEW ou American Sovereignty Campaign, à destination des représentants du Congrès, défend l'extension et la protection des plateaux continentaux US (faciliter l'exploitation pétrolière), des voies maritimes et des câbles sous-marins mais aussi le survol des espaces maritimes et la lutte contre la piraterie des mers. A ce jour, la Convention n'a pas été ratifiée par le Congrès américain.

Les liens entre PEW et l'administration Obama sont nets ; Léon Panetta, président de la PEW Océans Commission, a pris la direction de la CIA de 2009 à 2011. En 2013, il retourne à la Joint Ocean Commission Initiative JOCI; l'application de l'Act de Conservation sur les pêcheries, confiant les pêcheries aux Etats, implique les ONG (Walton (Walmart), Moore (Intel), Packard, Oak Fondation) dans le financement de la pêche.

Les trusts caritatifs américains interviennent aussi en Asie Pacifique via des AMP de grande ampleur, définies par le programme Global Ocean Legacy de PEW pour limiter l'emprise spatiale des flottilles de pêche chinoises et asiatiques. PEW est en synergie d'objectifs politico-industriels avec des institutions telles que la Banque Mondiale via la Global Ocean Commission et la High Seas Alliance.

La relecture de la filière pêche sous l'angle géopolitique est urgente. La France détentrice de la plus vaste superficie maritime, après les USA, est fondée à mettre en œuvre, une politique courageuse de protection de ses zones maritimes. Le contrôle des AMP, la cohabitation entre l'activité halieutique, son maintien, et l'exploitation pétrolière en mer profonde nécessite de fortes avancées diplomatiques. Les alliés traditionnels de la France comme les USA ont plus intérêt à participer à la préservation des océans, à nos côtés, qu'à servir de cadre à des manigances fumeuses et gravement destructrices....

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