Quand des médias "scientifiques" mettent en pâture le chalutage....
En véritables racleurs de bas-fonds, ces médias instrumentalisent les travaux de scientifiques en recherche de compréhension. C’est notamment le cas de Futura Sciences à l'égard de Pere Puig et ses collègues de l'Université de Barcelone qui viennent de publier dans la revue « Nature » leurs premiers travaux sur l’impact du chalutage au large des côtes catalanes...
Le chalutage est devenu un sujet hautement sensible depuis que Maria Damanaki, commissaire européenne à la pêche, a décidé d’interdire le chalut dans les grands fonds. Pour beaucoup de pêcheurs, cette interdiction ouvrirait la voie à la prohibition de tous les arts trainants y compris la drague utilisée par les petits métiers de la coquille saint-jacques ainsi que par les ostréiculteurs, éleveurs d’huîtres en eaux profondes...
Futura Sciences, fossoyeur des grands fonds !
L’article de Futura Sciences publié le 10 septembre 2012 : Les chalutages profonds ravagent les fonds marins, s’inscrit dans le lynchage médiatique de la pêche au chalut...
« Une étude publiée dans la revue Nature par Pere Puig de l’Institute of Marine Sciences de Barcelone vient de confirmer ce que de nombreuses personnes pensaient. La pêche au chalut perturbe également les fonds marins profonds. Elle y réalise un véritable travail de terrassement, détruisant directement ou indirectement, par le dépôt de sédiments, les reliefs complexes sources d’abris pour la vie.... Sans surprise, les chaluts de fond causeraient de gros dégâts environnementaux en eaux profondes. La mise en mouvement des sédiments provoquée par les filets modifierait profondément la physionomie des grands fonds, notamment dans les canyons sous-marins méditerranéens.... »
Futura Sciences veut enterrer définitivement le chalutage dans les grands fonds, le chalutage tout court...
Les scientifiques cherchent à comprendre le labourage des fonds marins...
Futura Sciences va dans le sens du mouvement « anti-chalutage », alors que Pere Puig et ses collègues cherchent à comprendre l’impact du chalutage sur les fonds marins qu'ils comparent au labourage en agriculture. Les scientifiques sont beaucoup plus nuancés dans leurs premières conclusions (d’après les articles de la revue Nature et de l’Université de Barcelone) :
« Les conséquences écologiques et les effets sur la biodiversité marine de cette pêcherie sont évidentes dans certaines parties du monde, comme dans les fonds avec des coraux d'eau froide qui sont détruits lors du chalutage. Toutefois, sur les fonds meubles, certaines espèces commerciales, du moins dans nos eaux, ne semblent pas être affectées de manière critique, puisque ces zones sont exploitées depuis des décennies... »
« Le chalutage de fond a été comparé à la coupe à blanc des forêts. D’après nos résultats, il vaudrait mieux comparer le chalutage à une activité agricole intensive. Le chalutage répété sur le même terrain, par le déplacement et la redistribution des sédiments, favorise en fait la mise à niveau de la surface et il produit des effets morphologiques similaires à ceux du champ labouré par un agriculteur. »
« L'interdiction devrait être évaluée au cas par cas plutôt que comme une approche globale, car une pêche durable peut apparaître dans certains zones où les dommages géologiques et de l'écosystème sont faits... »
Comment Futura Sciences, site internet dont l’audience est très importante sur le web (comparable celle d’Ouest France), peut se prétendre de la science ? Futura Sciences instrumentalise les travaux de scientifiques, Pere Puig et ses collègues de l’Université de Barcelone, toujours en quête d’informations complémentaires...
Philippe Favrelière
Autres articles :
- The End of the Line : Avis de forte tempête médiatique sur la pêche française !
- Les pêcheurs britanniques anticipent l'interdiction de la drague à coquilles
- Pêche durable ou destructrice : Les mousquetaires n'ont pas choisi le bon cheval !
- Pêcheurs artisans et communautés côtières menacés par la "modernisation" de la pêche
Pour aller plus loin dans la réflexion...
Le 26 Août 2014
La connaissance des engins de pêche permet de minimiser les impacts sur les fonds marins
Le contexte prime : les meilleures pratiques croisent le type d'engin de pêche, l'habitat et la gestion de la pêcherie
Dans le volume 2 des Séries Scientifiques du Marine Stewardship Council (MSC), une étude montre que la bonne gestion et la conservation des pêcheries et des zones de pêche exigent une compréhension globale des méthodes et engins de pêche.
Source : Marine Stewarship Council
Dans le volume 2 des Séries Scientifiques du Marine Stewardship Council (MSC), une étude montre que la bonne gestion et la conservation des pêcheries et des zones de pêche exigent une compréhension globale des méthodes et engins de pêche.
Source : Marine Stewarship Council
Les
engins de pêche utilisés pour capturer les espèces benthiques et
démersales ont un impact variable sur les fonds marins. Comprendre les
impacts directs et indirects des pratiques de pêche sur les habitats
benthiques est important afin d’assurer la viabilité des océans de la planète.
Dans
le volume 2, Chris Grieve et al. explore les meilleures pratiques de
mesure, de gestion et d'atténuation des impacts benthiques de la pêche.
L'examen porte sur un grand nombre d'engins de pêche les plus largement
utilisés. Les auteurs y donnent une description de chaque engin et de
son interaction avec l'environnement.
Historiquement,
l'amélioration des engins de pêche visait à maximiser les captures.
Aujourd’hui, pour répondre aux préoccupations de l'industrie et des ONG,
la recherche se concentre davantage sur des modifications d’engins
visant à minimiser les impacts sur les fonds marins et les prises
accessoires.
Dans
l’article, Analyse des impacts sur les habitats des engins de pêche
mobiles et statiques qui interagissent avec les fonds marins, les
auteurs écrivent : «Les travaux de recherche sur les habitats benthiques
sont en plein essor et
deviennent disponibles pour les décideurs et les gestionnaires de
ressources. La prise de conscience de la nécessité de gérer activement
les composants complexes des écosystèmes marins et de comprendre les
impacts directs et indirects de la pêche augmente".
La
classification des types d’engin de l’Organisation Mondiale de
l’Alimentation et de l’Agriculture (FAO) est en cours d’actualisation
pour intégrer les récents développements dans ce domaine et sera
prochainement publiée. Parmi les améliorations récentes, nous pouvons
citer les avancées en technologie de la fibre, la mécanisation de la
manutention des engins, l'amélioration des performances des navires et
la motorisation, le traitement informatique pour la conception des
engins, les aides à la navigation et la détection de poissons.
Cette analyse, ainsi que trois documents publiés dans le volume 2 des Séries Scientifiques, guident le MSC dans son développement stratégique sur les meilleures pratiques mondiales.
D'autres
documents publiés sur la réduction des prises accessoires et les
recommandations pour la gestion des stocks de saumon ont également joué
un rôle important dans l'orientation de la Révision du Référentiel
Pêcherie, un processus qui permet au Référentiel MSC de répondre aux
meilleures pratiques scientifiques actuelles.
Dr
David Agnew, directeur de l’équipe Référentiel du MSC déclare : «Pour
vraiment apprécier les impacts mondiaux de la pêche, il est nécessaire
d’augmenter la connaissance scientifique. Au MSC, nous révisons
régulièrement nos Référentiels pour assurer leur rigueur et pertinence.
Grâce à nos Séries Scientifiques, nous continuons de partager de
nouvelles connaissances et contribuons à l'effort mondial de recherche
sur la pêche durable ".
Le
portail de recherche halieutique a été lancé en Novembre 2013 pour
partager les connaissances scientifiques qui alimentent le Référentiel
MSC. Le résultat de la révision du Référentiel sera publié le 1er Août
2014, intégré aux Exigences de certification des pêcheries MSC 2.0
Cliquer Ici
pour télécharger le document "Review of habitat dependent impacts of
mobile and static fishing gears that interact with the sea bed"
Pour plus d’informations : MSC
Pour plus d’informations : MSC
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Le 6 Février 2014
Golfe de Gascogne : le chalutage enrichit la grande vasière
Source de la carte : CDPM 29 : Concertation pour une pêche durable dans la grande vasière
Lors de la Journée Mondiale des pêcheurs, le 22 novembre 2013 à Saint Pierre Quiberon, Mr Tourret, président de l’Institut Maritime de Prévention (IMP) a prononcé un discours sur le chalutage et les rejets qui va à l’encontre des idées véhiculées aujourd’hui et promues par la réforme de la Politique Commune des Pêches.
En voici la transcription :
«
Au cours de ma formation à Bordeaux à l’école des Affaires Maritimes
j’ai dû réaliser un stage de 10 jours en embarquement au port de
Lorient, sur un bateau qui s’appelait l’Atlanta, dont le patron
s’appelait Tonnerre, Groisillon évidemment. On me fait toutes les
recommandations nécessaires, j’embarque donc avec mon ciré, mes bottes,
ma cuillère, mon couteau et une caisse de muscadet. Je vous rappelle
simplement que j’arrive de Toulon. A Toulon, il y a un poisson qui est
très estimé qui est le sévereau (=chinchard), un très bon poisson.
J’embarque
sur l’Atlanta, premier coup de chalut, on remonte au moins 500 kg de
chinchards sur le pont. Les matelots passent alors l’ensemble des
chinchards par-dessus bord, à grands coups de pelle. Je n’arrive pas à
comprendre comment on peut louper autant de vente, les autres prises
étant tout de même commercialisées. Il s’agit d’un chalutier classique à
pêche sur le côté, et j’ai alors une première perception du risque que
représente la mer, la hauteur de bordée sur ces bateaux classiques
étant à 35- 40 cm. Les matelots avec une pelle sont en train de jeter
les chinchards par-dessus bord sur un terrain glissant, en faisant vite
car plus on évacue vite, moins on a le risque d’avoir de la carène
liquide, constituée par la masse des poissons sur le pont. Cette
opération de gestion des déchets a déjà une connotation particulière de
prise de risque. Cette prise de risque devient aujourd’hui
systématique avec la réglementation européenne sur les rejets.
Des
années après, en 2003, on me nomme à l’IMP et, en deuxième année, je
commence à réfléchir sur ces questions d’évolution de la Société et sur
la nécessité de gérer les rejets. En 2005-2006, nous proposons à la
région Bretagne de faire une étude particulière sur la dimension sociale
du risque de la gestion des déchets. A l’époque, la région est
sceptique, elle se focalise sur un discours du type ‘moins on en parle,
mieux ça vaut’ car si on en parle, cela veut dire que l’on accepte
l’idée qu’il faut ramener les déchets. On met alors 18 mois pour obtenir
l’autorisation de faire cette étude. Cette étude est réalisée, elle
fournit une vraie réflexion sur les rejets en mer. En faisant cette
étude, on se demande si le fait de ramener les déchets à terre est
pertinent. Évidemment, la vie d’un homme est faite par ce qu’il fait
aujourd’hui, par les réminiscences d’hier et par le croisement entre son
expérience passée et la réalité qu’il constate.
Merci de votre attention
Retournons en
1965, je débarque de l’Atlanta avec cette idée : ‘Bougre, pourquoi
rejette-t-on?’. Je vis cette situation comme néfaste d’un point du vue
économique. En rentrant à l’école à Bordeaux, je parle avec mon
professeur d’océanographie, Mr Persier, directeur du musée
océanographique de Biarritz. Je lui raconte mon expérience lorientaise
avec mes chinchards rejetés à la mer. Il me dit alors que ce n’est pas
grave, et se lance dans un cours personnel. Il m’explique alors que la
grande vasière du golfe de Gascogne, lieu où l’on pêchait à l’époque,
n’est pas un milieu qui existe depuis l’éternité, mais que cette vasière
est une construction de l’homme. Il m’explique que du temps de Jules
César, l’Europe était couverte de forêts, c’était la Gaule chevelue. Le
défrichement de la Gaule s’est fait en plusieurs fois. Il y a eu au
moins deux périodes de défrichement généralisé : le néolithique d’une
part et surtout les défrichements de l’an 1000, lorsque la population de
la Gaule a augmenté de façon considérable, les rivières qui étaient
claires sont alors devenues boueuses. Plusieurs vagues des vases se sont
alors déversées dans le golfe de Gascogne, et ont modifié la géologie
du fond. Il s’y est alors développé un milieu tout particulier qui est
l’état vierge de la grande vasière.
C’est très simple : si on laisse la grande vasière dans l’état où elle est, on va obtenir une forêt de pennatules et on va obtenir un peu ce que l’on pourrait avoir dans la forêt des Landes si elle avait été laissée toute seule. Les bouleaux vont l’emporter sur les pins et l’on obtiendra une forêt impénétrable avec au final une biodiversité très limitée. Il m’explique que la grande vasière est devenue productive à partir du moment où on l’a chalutée. L’idée est que l’on avait quelque chose qui était retourné à l’état de friche, cette friche n’étant pas une réserve de biodiversité, bien au contraire. En aérant ce système de vasière par le passage des chalutiers, on a permis à des décapodes fouisseurs intéressants -pas la petite galathée où il n’y a rien à manger mais la grosse langoustine- de pouvoir s’installer. De plus, avec les rejets, un circuit trophique est créé dans lequel les espèces benthiques, celle du fond, se nourrissent des espèces rejetées. Il y a dans ces fonds un équilibre dû à l’action de l’homme. C’est une histoire très fine à expliquer.
J’ai eu l’occasion ensuite d’évoquer avec André Le Berre (Dédé) un cantonnement de Penmarc’h à Belle île. Lorsqu’il y a 5 ans, au moment où l’on commençait à parler des rejets, j’en reparle avec Dédé, il me dit : « Quand on a rouvert le cantonnement, il n’y avait rien. Nous n’avons rien tiré du cantonnement en lui-même, il n’a servi d’aucune façon à augmenter la densité des poissons ». Tout ceci se croisait, les éléments du puzzle étaient réunis : les matelots en train de rejeter du chinchard à la pelle par-dessus le pavois et prenant des risques, la conversation avec le professeur Percier sur l’origine de la grande vasière, les propos de Dédé sur la non-productivité du cantonnement. On se retrouve alors devant des phénomènes complexes. Le problème est de faire comprendre la complexité à des gens ayant des idées simples, sachant qu’il faut réduire la complexité. D’un côté, il y a Michel Serres qui nous rappelle que le monde est complexe et que l’apanage de la science est dans la compréhension de cette complexité et d’un autre côté, des discours qui vont simplifier au maximum….
C’est très simple : si on laisse la grande vasière dans l’état où elle est, on va obtenir une forêt de pennatules et on va obtenir un peu ce que l’on pourrait avoir dans la forêt des Landes si elle avait été laissée toute seule. Les bouleaux vont l’emporter sur les pins et l’on obtiendra une forêt impénétrable avec au final une biodiversité très limitée. Il m’explique que la grande vasière est devenue productive à partir du moment où on l’a chalutée. L’idée est que l’on avait quelque chose qui était retourné à l’état de friche, cette friche n’étant pas une réserve de biodiversité, bien au contraire. En aérant ce système de vasière par le passage des chalutiers, on a permis à des décapodes fouisseurs intéressants -pas la petite galathée où il n’y a rien à manger mais la grosse langoustine- de pouvoir s’installer. De plus, avec les rejets, un circuit trophique est créé dans lequel les espèces benthiques, celle du fond, se nourrissent des espèces rejetées. Il y a dans ces fonds un équilibre dû à l’action de l’homme. C’est une histoire très fine à expliquer.
J’ai eu l’occasion ensuite d’évoquer avec André Le Berre (Dédé) un cantonnement de Penmarc’h à Belle île. Lorsqu’il y a 5 ans, au moment où l’on commençait à parler des rejets, j’en reparle avec Dédé, il me dit : « Quand on a rouvert le cantonnement, il n’y avait rien. Nous n’avons rien tiré du cantonnement en lui-même, il n’a servi d’aucune façon à augmenter la densité des poissons ». Tout ceci se croisait, les éléments du puzzle étaient réunis : les matelots en train de rejeter du chinchard à la pelle par-dessus le pavois et prenant des risques, la conversation avec le professeur Percier sur l’origine de la grande vasière, les propos de Dédé sur la non-productivité du cantonnement. On se retrouve alors devant des phénomènes complexes. Le problème est de faire comprendre la complexité à des gens ayant des idées simples, sachant qu’il faut réduire la complexité. D’un côté, il y a Michel Serres qui nous rappelle que le monde est complexe et que l’apanage de la science est dans la compréhension de cette complexité et d’un autre côté, des discours qui vont simplifier au maximum….
Extrait du rapport de la Journée Mondiale des pêcheurs organisée par le Collectif Pêche & Développement, le 23 Novembre 2013, cf : http://www.peche-dev.org/
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Le 9 septembre 2013
La pêche profonde au menu de la Commission Pêche du Parlement européen
Le 18 septembre 2013 (à vérifier)
La pêche d’espèces de grands fonds en Europe est-elle durable ? En partie, estime l’Ifremer dans une expertise. Pour l’Institut son interdiction pure et simple n’apparaît pas nécessaire, mais il rappelle que la décision revient au politique.
Fortement décriée par certaines organisations écologistes, cette pêche pourrait en effet être interdite par une réglementation européenne. L’Institut a ainsi publié le 19 juin sur son site une expertise, reprise dans le marin de cette semaine, qui porte sur la définition des pêches profondes, la situation des ressources exploitées, les impacts sur l’environnement et les modalités de gestion. Autant de sujets qui font débat.
Pêche dans l'Atlantique du Nord-Est : conditions spécifiques pour la pêche des stocks d'eau profonde, dispositions relatives à la pêche dans les eaux internationales de l'Atlantique du Nord-Est et abrogeant le règlement (CE) n° 2347/2002
Rapporteur : Kriton Arsenis
Cliquer Ici pour télécharger le document avec les amendements des eurodéputés
Pêches profondes dans les eaux européennes : expertise et travaux menés par l’Ifremer
La pêche dite profonde est souvent présentée comme une aberration écologique compte tenu des dommages causés par les engins de pêche aux fonds marins et aux populations exploitées, et comme une activité non contrôlée et mal connue scientifiquement.
Outre le fait qu’il est nécessaire d’éviter toute généralisation (les situations pouvant être très diverses selon les régions du monde et les types/modalités d’exploitation) et qu’il faut considérer la pêche comme une activité de cueillette qui n’est donc pas exempte de tout impact sur l’environnement (aucune activité humaine ne pouvant être considérée comme totalement dénuée d’impact), l’Ifremer fait ici le point sur son expertise et les travaux de recherche que mènent ses équipes sur la définition des pêches profondes, sur la situation des ressources exploitées, sur les impacts sur l’environnement et sur les modalités de gestion.
Définition des pêches profondes
La définition de la pêche profonde fait encore débat. Faut-il considérer la pêche profonde comme l’activité de pêche au-delà d’une certaine profondeur ou comme l’activité qui cible des espèces dites profondes ? L’organisation mondiale pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) définit comme profondes les eaux dont les profondeurs sont supérieures à 200 m tandis que le Conseil International pour l'Exploration de la Mer (CIEM) utilise une limite à 400 m. Une définition qui repose sur un critère strictement bathymétrique engloberait des activités très différentes : en effet, en plus de la pêche des espèces profondes, il existe des pêcheries d’espèces du plateau continentale (baudroies, merlus, cardines) jusqu’à 600 voire 1000 m.
A l’inverse, dans les eaux européennes, les pêches profondes sont légalement définies par une liste d'espèces capturées qui comprend la lingue bleue, pêchée de 400 à 1300 m ainsi que le phycis de fond, le grenadier de roche et le sabre noir, pêchés par 750 à 1500m. A ces profondeurs, on trouve aussi l'empereur et des petits squales, qui étaient commercialisés avant leur interdiction sous l'appellation "siki". Au-delà de 1500 m l'activité de pêche est aujourd’hui quasi-inexistante en Europe parce que l'abondance des ressources y est plus faible.
Dans le cadre du projet européen DEEPFISHMAN, l’Ifremer a développé une approche originale pour définir les pêches profondes en combinant le critère profondeur et la proportion de biomasse des populations de poissons de part et d’autre de cette profondeur ; sont ainsi considérées comme espèces profondes les espèces pour lesquelles plus de 50% de la biomasse se situe au-delà de 200 m. Les espèces actuellement listées dans les annexes I et II du règlement européen encadrant les pêches profondes (CE 2347/2002) sont globalement en phase avec cette définition, à l’exception notable du congre et le petit sébaste qui ne satisfont pas ce critère ; l’application de ce critère conduirait à inclure le flétan noir, le brosme et le sébaste du nord dans les espèces profondes. Suite...
Autres documents d'analyse :
- Newscientist : Are there ecological merits to trawling the seabed?
- Ifremer : Doit-on interdire la pêche en eaux profondes ?
- When does fishing lead to more fish? Community consequences of bottom trawl fisheries in demersal food webs
P. Daniel van Denderen1,2⇑,
Tobias van Kooten1 and
Adriaan D. Rijnsdorp1,2
+ Author Affiliations
(1) Wageningen Institute for Marine Resources and Ecosystem Studies (IMARES), PO Box 68, 1970 AB IJmuiden, The Netherlands
(2) Aquaculture and Fisheries, Wageningen University, PO Box 338, 6700 AH Wageningen, The Netherlands
Abstract
Bottom trawls are a globally used fishing gear that physically disturb the seabed and kill non-target organisms, including those that are food for the targeted fish species. There are indications that ensuing changes to the benthic invertebrate community may increase the availability of food and promote growth and even fisheries yield of target fish species. If and how this occurs is the subject of ongoing debate, with evidence both in favour and against. We model the effects of trawling on a simple ecosystem of benthivorous fish and two food populations (benthos), susceptible and resistant to trawling. We show that the ecosystem response to trawling depends on whether the abundance of benthos is top-down or bottom-up controlled. Fishing may result in higher fish abundance, higher (maximum sustainable) yield and increased persistence of fish when the benthos which is the best-quality fish food is also more resistant to trawling. These positive effects occur in bottom-up controlled systems and systems with limited impact of fish feeding on benthos, resembling bottom-up control. Fishing leads to lower yields and fish persistence in all configurations where susceptible benthos are more profitable prey. Our results highlight the importance of mechanistic ecosystem knowledge as a requirement for successful management.
Les Pêches et la biodiversité marine (d'après un scientifique canadien)
Pratiquement tout engin de pêche perturbera l’habitat marin dans une certaine mesure. La façon dont les habitats réagissent, dépend de leur sensibilité ainsi que du type et de l’intensité de la pêche. En général, les engins de pêche remorqués comme les chaluts et les dragues sont la principale cause de la destruction de l’habitat reliée à la pêche.
Toutefois, le premier passage d’un engin de pêche dans un habitat où il n’y a jamais eu de pêche auparavant a un impact plus grand que les passages subséquents. Ce fait est important, puisqu’il indique que le maintien relativement constant de la pêche dans certaines zones aura moins d’impact que le déplacement et la redistribution des pêches au fil du temps… Source : Société Royale du Canada 2012 : Le maintien de la biodiversité marine au Canada : relever les défis posés par les changements climatiques, les pêches et l'acquaculture
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Rosa García-Orellán raconte la vie d’un ancien capitaine de pêche basque, des années 1950 jusqu’en 2008
Le capitaine de pêche et la morue : De l’âge d’or à une pêche symbolique
El capitán de pesca y el bacalao
Rosa García-Orellán,
Everest, León, 200 p.,
La vie et les sentiments des pêcheurs sont le fil conducteur de cet ouvrage. Il convient donc de commencer cette brève présentation par une citation de Lázaro : « À bord, on ne dort que d’un œil, et cela dure tout au long de la campagne de pêche. On ne peut se permettre un relâchement de la concentration ou de la discipline. Sinon, lorsqu’on est distrait, on risque de mettre tout le monde en danger : ça on le sait ! Ceux qui ne sont pas des familiers de la mer ignorent ce qui se passe là-bas et comment on travaille à bord. Toutes ces heures, sombres et noires, vous avez beau en parler, on ne les voit pas. Et, qui plus est, il est très difficile de les ressentir, de les voir… La mer, nous la respectons ! »
Depuis 2004, année de la première publication du livre Les hommes de Terre-Neuve, on voyait arriver la fin du chalutage industriel en bœufs pour la morue. Cette technique de pêche dans laquelle deux bateaux manoeuvrent le même filet a connu son âge d’or au cours des années 1960. Des 330 pages et des 306 récits et tranches de vie que contient cet ouvrage émergent 74 voix qui décrivent les circonstances du développement de ces activités de pêche, qui parlent pour trois générations et replacent donc dans leur contexte plus de soixante-dix ans de ce travail.
Les capitaines de la flotte espagnole fonctionnaient en équipe à la recherche des bancs de poissons, tout comme leurs homologues portugais, français ou russes. En 2006, Rosa García -Orellán, qui avait écrit Les hommes de Terre-Neuve, rencontre Lázaro Larzabal, ancien capitaine de la flotte morutière espagnole, atypique en ce sens qu’il patrouillait les Grands Bancs seul. Il n’avait jamais travaillé en équipe et il faisait seul ses propres innovations.
En décrivant son expérience tout au long de cette biographie, Rosa García-Orellán apporte une nouvelle vision du monde de la pêche au temps de Lázaro Larzabal...
La biographie de Lázaro parle (aussi) de l’exploitation des ressources marines, fait entendre la voix des pêcheurs racontant leur activité et l’état de la mer, la voix des armateurs exprimant leurs besoins pour que leurs entreprises restent rentables, et la voix des biologistes et de l’Administration pour compléter le tableau.
Pour ce qui est de l’exercice de la pêche et du chalutage, « les pêcheurs sont comme les agriculteurs : ils veulent que les champs soient fertiles pour faire de bonnes récoltes ». Ils considèrent que, une fois les fonds marins débarrassés des coraux, les bancs de poissons pourront y arriver. Cela peut donner lieu à d’intéressantes confrontations entre les positions des biologistes et celles des pêcheurs. Il est aussi beaucoup question des raisons ayant entraîné l’effondrement les pêcheries de morue sur les Grands Bancs de Terre-Neuve. On a évoqué plusieurs causes, mais il ne faut pas confondre le fait que les populations de cabillaud ne se reconstituent pas avec la surpêche ayant entraîné l’effondrement.
Pour le biologiste espagnol Antonio Vasquez, c’est surtout l’écosystème qui a changé ; et (autre possibilité) ce serait l’écosystème qui ne permettrait pas la reconstitution d’une espèce qui s’est effondrée. Il y a également le point de vue du biologiste canadien George Rose qui affirme que « le changement climatique constitue peut-être une plus grande menace que la surpêche. Nous pourrions trouver des solutions à la surpêche, ce qui n’est pas le cas pour le changement climatique à l’allure où le réchauffement planétaire se produit »....
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Le 12 septembre 2012
Par Stéphane Foucart
Dures journées pour la pêche profonde. Alors que le Parlement européen se prépare à examiner la proposition présentée en juillet par la Commission de Bruxelles, visant à bannir progressivement les chaluts et les filets maillants de fond en Atlantique du Nord-Est, de récents travaux accablent de nouveau ces engins de pêche.
Une étude publiée dans la dernière édition de la revue Nature évalue l'impact du chalutage profond pratiqué au cours des dernières décennies en Méditerranée du Nord-Ouest. En raclant les fonds marins, les chaluts terrassent les talus continentaux et déplacent des millions de tonnes de sédiments : cette pêche "est devenue un important facteur d'évolution des paysages sous-marins" et ce, "à grande échelle". Dans la foulée de la proposition de la commissaire à la pêche, Maria Damanaki, nul doute que ces résultats seront enrôlés dans la bataille qui voit s'affronter les défenseurs de la pêche profonde à ses opposants.
Car, depuis le mois de juillet, cette bataille se tient aussi sur le terrain de la science. En France, les acteurs de la filière, de même que l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer), affirment que la proposition de Bruxelles est infondée. Face à eux : les ONG (à l'exception de France Nature Environnement), les biologistes de la conservation, mais aussi de nombreux experts de la gestion des ressources halieutiques, assurent que la science impose l'arrêt de cette pratique.
Que dit la science ? L'essentiel des études publiées dans les revues scientifiques suggèrent que les cycles reproductifs des espèces profondes sont trop longs pour que celles-ci puissent être exploitées de manière à la fois durable et rentable. Cette opinion, largement partagée, a été résumée dans une analyse publiée en mars dans la revue Marine Policy, conduite par une quinzaine de chercheurs internationaux, dont Daniel Pauly, professeur à l'université de Colombie-Britannique (Canada), reconnu comme l'un des meilleurs spécialistes du sujet.
"Stabilisation de stocks, mais à des niveaux très bas"
Ray Hilborn, professeur à l'université de Washington, non moins reconnu, assure de son côté que "la plupart des poissons profonds ont une croissance lente et une durée de vie longue, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne peuvent pas être durablement exploités, cela signifie que nous ne pouvons en prélever qu'une très petite fraction chaque année". Cela s'applique-t-il à la situation actuelle dans l'Atlantique du Nord-Est ? Pascal Lorance, chercheur à l'Ifremer, le pense. "Les choses ont beaucoup changé, assure-t-il. Jusqu'en 2003, les taux de capture d'espèces profondes étaient clairement non durables dans cette zone, mais depuis, l'effort de pêche y a été divisé par quatre."
L'Ifremer en prend pour preuve le dernier avis du Centre international pour l'exploration de la mer (CIEM), l'organisme chargé de prodiguer aux Etats des recommandations scientifiques sur les niveaux de prises à ne pas dépasser. Dans les zones travaillées par les armements français, le CIEM recommande ainsi pour 2013 une augmentation des prises pour le grenadier et le sabre noir. Tom Blasdale, président du groupe de travail du CIEM sur les pêcheries profondes, assure que "pour certaines espèces, nous avons de bons indices que les taux d'exploitation actuels sont au niveau, ou bien au-dessous des niveaux durables".
Un diagnostic contesté par certains, à l'image du biologiste Les Watling. Ce professeur à l'université d'Hawaï, à Manoa (Etats-Unis), estime au contraire qu'"en appliquant les critères de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), certaines espèces profondes de l'Atlantique du Nord-Est, comme le sabre noir ou la lingue bleue, devraient être considérées comme en danger d'extinction". "S'il y a eu stabilisation de certains stocks au cours des dernières années, celle-ci s'est faite à des niveaux très bas, par rapport au stock initial", ajoute M. Watling.... Suite...
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Le 17 septembre 2013
Grands fonds : Laisser le champ libre à l’exploitation minière !
La France a demandé l’extension de sa ZEE au-delà des 200 milles marins... C’est pour pêcher plus loin et plus profond ?
La pêche en eau profonde bientôt interdite ?
TF1 Sciences - 1min 56s – le 17 septembre 2013 à 20h35
Les marins pêcheurs d'eau profonde pourraient voir très prochainement leur activité interdite par l'Union européenne. Leurs filets qui plongent dans les entrailles des océans sont accusés de détruire un milieu fragile et encore méconnu. Source : La pêche en eau profonde bientôt interdite ? sur WAT.tv
Métaux sous-marins : quel contrôle de leur exploitation ?
Cet été la communauté internationale a accordé deux nouveaux permis d'exploration minière, au Japon et à la Chine, sur des sommets sous-marins situés dans les eaux internationales. Au cœur du dispositif d'autorisation figure une agence internationale très peu connue, l'AIFM. Mais ses pouvoirs sont-ils suffisants pour concilier exploitation industrielle et préservation de la biodiversité ?
Source : Novethic par Thibault Lescuyer
Source : Novethic par Thibault Lescuyer
Les fonds sous-marins font l’objet d’une forte attention, notamment parce qu'ils contiennent des terres rares. En juillet deux nouveaux permis d’exploration ont été accordés dans la « zone », ainsi que l'ONU définit les sous-sols dans les eaux internationales. Ils complètent ceux déjà octroyés à une quinzaine de pays par l’Agence internationale des fonds marins (AIFM) pour rechercher des gisements polymétalliques. Pour l’instant, ces permis ne sont qu’exploratoires. « Pour qu'une extraction ait lieu, il faut une certaine concentration de minerais. Or les sociétés chinoises et japonaises en sont encore probablement au stade des indices. Et les permis de l'AIFM ne concernent que l'exploration, mais pas l'extraction », précise Yves Fouquet, responsable du laboratoire Géochimie et Métallogénie à l'Ifremer. Une chose semble certaine : « Certains gisements peuvent contenir jusqu'à 5% de cuivre alors que le taux des mines terrestres est de l'ordre de 0,5% », ajoute le géologue.
Le seul problème est que cette nouvelle frontière pour les métaux en est une aussi pour la faune et la flore. Dans ces contrées abyssales le niveau de connaissance est « inégal, mais généralement insuffisant pour définir a priori les plans de préservation de l'environnement et de la biodiversité en cas d'exploitation », constate une récente étude de l'IFREMER (1). Et ce alors qu'on a découvert par endroit «une vie exubérante et extraordinaire ».
Greenpeace demande un moratoire sur l'exploration
Face à cette incertitude, Yves Fouquet invoque l'intérêt des missions d'exploration, avec l'idée que « pour contrôler, il faut connaître ». Mais des ONG comme Greenpeace dénoncent la précipitation des industriels. « Avant d'explorer les métaux sous-marins, il faut d'abord protéger les écosystèmes marins les plus vulnérables », estime François Chartier, chargé de campagne Océans à Greenpeace. L'ONG appelle à un moratoire, sur toute exploration tant que des réserves marines n'ont pas été instaurées sur 40% des océans (contre 1% actuellement) et qu'un accord mondial sur la protection de la biodiversité en haute mer n'a pas été conclu (2).
Des industriels rassurants
Champion français de l'ingénierie et des infrastructures en eaux profondes, Technip juge important de préserver la biodiversité, mais sans partager les craintes de Greenpeace. Dans le cas du projet Solawara 1 par exemple, auquel participe Technip, « la biodiversité semble très pauvre, voire inexistante, d'après les études menées par les organisations qui envisagent l'exploitation» précise Julien Denègre, Business Development Manager chez Technip. Situé en Papouasie Nouvelle-Guinée et non dans la « zone », Solwara est cependant le projet d'extraction en eaux profondes (1 700 m) le plus avancé à ce jour. Selon Julien Denègre, toutes les précautions et même des clauses de restauration des écosystèmes sont prévues par les acteurs qui gèrent l'exploitation.
Les promoteurs de l'extraction invoquent aussi le fait que les mines sous-marines pourraient avoir moins d'impact que sur terre. Ainsi « extraire les nodules polymétalliques (sortes de gros caillous posés au fond des plaines abyssales) pourrait être beaucoup moins dommageable que l'extraction en surface », argumente Sheryll Murray, députée anglaise à l'origine d'une proposition de loi sur le « seabed mining »... De plus, les projets dans la « zone » devront faire l'objet d'études d'impact préalables et d'un contrôle par l'AIFM.
L'AIFM, ange gardien du patrimoine minier commun
L’AIFM ? Cette agence, instituée par la Convention de l'ONU sur le droit de la mer, a la lourde responsabilité de réguler l'exploitation des sous-sols internationaux, dont les richesses sont considérées, depuis 1982, comme le « patrimoine commun » de l'humanité. Regroupant 160 membres environ, mais pas les Etats-Unis, l'AIFM a établi les codes miniers et c'est elle qui instruit les demandes de concessions. Son rôle deviendra crucial si les explorations débouchent sur des extractions : car le demandeur devra alors spécifier deux zones d'égale valeur minière sur sa concession pour qu'une, au choix de l'AIFM, soit réservée au bien commun. Mais les mécanismes restent à préciser pour qu’il ne se transforme pas en usine à gaz comment s'assurer que les deux zones sont bien d'égale valeur, par exemple ?
L'autre défi de l'AIFM sera son rôle de gendarme, via une agence d'inspection à créer. Il y a « un besoin critique de discussions pour financer et mettre en place une agence » chargée de « vérifier la conformité des activités d'exploration et d'exploitation », déclarait en juillet son secrétaire général, le Ghanéen Nii A Odunton.
(1) Les ressources minérales marines profondes, sous la supervision d'Yves Fouquet et Denis Lacrois, éditions Quae 2012.
(2) Depuis le sommet Rio+20, des négociations sont en cours à l'ONU pour faire modifier la Convention sur le droit de la mer et y intégrer, notamment, des clauses sur la protection de la biodiversité.
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Sciences. Les origines de la vie au fond des abysses
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Le 26 septembre 2013
Les scientifiques décodent la vie des Abysses...
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L'IFREMER : alibi officiel des lobbies industriels de la pêche profonde
d'après Bloom
Avec un sulfureux papier de position politique, infondé scientifiquement, l'Ifremer est devenu l'alibi officiel des lobbies et se retrouve au centre du débat entre pêcheurs industriels, cabinets ministériels et ONG
Avec un sulfureux papier de position politique, infondé scientifiquement, l'Ifremer est devenu l'alibi officiel des lobbies et se retrouve au centre du débat entre pêcheurs industriels, cabinets ministériels et ONG
C'est désolant pour les nombreux chercheurs excellents de l'IFREMER dont le travail se trouve entaché par une sombre affaire politico-industrielle – et soi-disant – scientifique.
Explication de texte : lors de la Conférence environnementale, la députée Isabelle Thomas a brandi un "dossier d'actualité" de l'Ifremer au statut bâtard, totalement infondé scientifiquement et qui ne pèse pas plus que n'importe quel blog sur le Web, sauf qu'en l'occurrence, c'est sur le site de l’Ifremer que cet article a été posté. Cela "en jette". Alors que contient ce document pour qu'il soit si fréquemment mis en avant par les lobbies de la pêche industrielle et leurs défenseurs politiques ? Pour voir le plaidoyer de l'Ifremer pour le chalutage profond.
Ce document ne représente ni l’état des connaissances actuelles ni l’avis des chercheurs de l’Ifremer sur la pêche profonde au chalut. En revanche, on y trouve un certain nombre de déclarations parfaitement fausses d’un point de vue scientifique et qui ne survivraient pas un instant à la relecture d’une revue scientifique sérieuse. Notons d’ailleurs que l’IFREMER s’est bien gardé de traduire ce document compromettant en anglais, mais BLOOM s’en est chargé. Voir Ici
Ce document n’a donc pas d’autre vocation que de répondre aux besoins politiques du cabinet de Frédéric Cuvillier et des élus de Bretagne siégeant à la Commission de la pêche du Parlement européen (Alain Cadec – UMP et Isabelle Thomas – PS) : ces quelques individus œuvrent ensemble pour faire dérailler, depuis le début, le règlement ayant vocation à protéger les écosystèmes marins les plus vulnérables du monde. Mais sans aucune munition scientifique, la tâche n’est pas aisée. Voilà ce à quoi ce document bâtard de l’Ifremer a cherché à pallier. Mais comme les ifremériens pro-pêche industrielle au chalut ne passeraient pas les fourches caudines de la relecture scientifique anonyme, ils ont opté pour la seule solution possible : un article Web, en français uniquement, sans relecture ni même approbation au sein de l’Ifremer.
Les propos scientifiquement erronés qui y sont tenus ont été épinglés par la revue « Nature » dans un éditorial qui met nommément en cause l’Ifremer et le sulfureux rôle politique que la science joue en France dans ce dossier. Voir : http://www.nature.com/news/deep-sea-trawling-must-be-banned-1.13656
Ce n'est pas sans rappeler un autre contexte français de création de fausses controverses sur le climat...
Morceaux choisis :
Morceaux choisis :
"La durabilité de l'exploitation de ces stocks (grenadier, sabre et lingue bleue) est aujourd’hui établie" => FAUX.
Nulle part n’est-il fait mention de « durabilité » pour les espèces profondes. Au contraire, à chaque fois que la durabilité monospécifique est envisagée pour une ou deux espèces de poissons profonds, elle est immédiatement contre-balancée par la non durabilité de l’exploitation d’un point de vue écosystémique (soit espèces capturées accidentellement, soit habitats marins).
"Les observations ont montré que les rejets sont largement dominés par deux espèces : le mulet noir et la grande argentine, auxquelles il faut parfois ajouter la chimère, pour lesquelles les scientifiques n’expriment pas de préoccupations." => FAUX.
Un éditorial de Nature montre au contraire que le mulet noir a chuté à seulement 6% de son abondance de 2002, ce qui le rend éligible à un statut d’espèce menacée d’extinction selon les critères de la Liste Rouge de l’UICN. Voir : http://www.nature.com/news/deep-sea-trawling-must-be-banned-1.13656
Mais encore :
"Les connaissances des poissons et écosystèmes profonds augmentent rapidement. L’aire de répartition, la longévité et la croissance des poissons profonds exploités sont aujourd'hui bien connues",
"Les écosystèmes profonds ont été étudiés et cartographiés, ce qui permet d'identifier les zones les plus vulnérables et de les protéger"
et autres perles de ce genre…
Le décodage a été fait 1000 fois par BLOOM de ces mensonges assumés et très regrettables.
Il sera intéressant de voir comment le nouveau président de l'Ifremer, François Jacq, se positionnera par rapport à ce dossier peu reluisant pour la recherche française. Rupture avec son prédécesseur Jean-Yves Perrot ou complaisance renouvelée envers les cabinets ministériels ?
Pendant ce temps... Aux antipodes, les pêcheries en eaux profondes sont reconnues "Pêche durable" : Hoki de Nouvelle-Zélande, ou en cours d'évaluation "Pêche durable" : Grenadier d'Australie
En Nouvelle-Zélande, les quotas de pêche sont même en très forte hausse : Deepwater species TACC increase announced
Face à ces constats, Martine Valo du quotidien Le Monde : L'interdiction de la pêche en eau profonde n'est pas pour demain
Moules, crabes, crevettes… La vie prolifère au tréfonds des océans. Plus de 500 espèces répertoriées. Le scientifique breton François Lallier a percé quelques-uns de leurs secrets.
Source : Ouest France par Bernard Le Solleu
Au mois d’août, il était en plein Atlantique, au sud des Açores, à bord du Pourquoi Pas, à la tête d’une trentaine de scientifiques. Leur mission : explorer les sources hydrothermales sous-marines, véritables oasis de vie où pullulent moules, crevettes, crabes et vers par milliers. Cette semaine, il était devant l’Académie des sciences, invité à exposer ses découvertes (1).
Au mois d’août, il était en plein Atlantique, au sud des Açores, à bord du Pourquoi Pas, à la tête d’une trentaine de scientifiques. Leur mission : explorer les sources hydrothermales sous-marines, véritables oasis de vie où pullulent moules, crevettes, crabes et vers par milliers. Cette semaine, il était devant l’Académie des sciences, invité à exposer ses découvertes (1).
François Lallier, professeur à l’université Pierre et Marie Curie à Paris, dirige un laboratoire d’écologie à la station biologique de Roscoff (Finistère). Il a déjà plongé une douzaine de fois sur ces sources à bord du sous-marin Nautile. « C’est tout simplement fascinant », dit-il. Comment, dans la nuit des abysses, loin de toute source de lumière, de toute photosynthèse, la vie peut-elle se développer ?
Depuis 1977, date de la découverte de la première oasis sous-marine, les chercheurs ont progressé. La clé de cette vie, c’est la chimiosynthèse. François Lallier est l’un des grands spécialistes « de la symbiose chez les eucaryotes », ces « cellules à noyau » associées à des bactéries, il y a plus d’un milliard d’années. À la base du développement de la vie, « elles ont inventé à peu près tout ce qu’on peut faire en terme de métabolisme : respiration chez les hommes et les animaux et photosynthèse chez les plantes ».
Applications médicales ?
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Commentaires
Voici deux phrases, pour commencer :
"certaines espèces commerciales, du moins dans nos eaux, ne semblent pas être affectées de manière critique, puisque ces zones sont exploitées depuis des décennies...
une pêche durable peut apparaître dans certains zones où les dommages géologiques et de l'écosystème sont faits..."
En d'autres termes, on nous dit : "vous voyez que le chalutage de fond n'a pas d'effets néfastes puisqu'il reste des poissons là où il est pratiqué depuis longtemps". Et puis on nous dit : "de toutes façons, s'il est néfaste, le mal est déjà fait et il n'y a plus qu'à continuer là où on a commencé".
Qui nous dit qu'il n'y aurait pas dix fois plus de poissons dans ces mêmes zones si les fonds n'étaient pas sans cesse labourés ? Et sur quoi se basent ces auteurs pour prétendre que les altérations des écosystèmes marins sont de toutes façons irréversibles ?
Autre phrase :
"Le chalutage de fond a été comparé à la coupe à blanc des forêts. D’après nos résultats, il vaudrait mieux comparer le chalutage à une activité agricole intensive. Le chalutage répété sur le même terrain, par le déplacement et la redistribution des sédiments, favorise en fait la mise à niveau de la surface et il produit des effets morphologiques similaires à ceux du champ labouré par un agriculteur. »
Le chalutage de fond ne serait ainsi fondamentalement pas plus dommageable à la pêche que le labourage à l'agriculture ? A qui pourrait-on faire croire cela ?
L'agriculteur homogénéise le sol, notamment par le labourage, avec pour conséquence une perte de biodiversité qui lui est bénéfique (il élimine les mauvaises herbes et les animaux sauvages qui ne trouvent refuge que dans des habitats complexes). Les végétaux qu'il exploite n'ont besoin, pour prospérer, que des substances nutritives inertes présentes dans le sol, de l'air et de la lumière. Et il ne lui viendrait pas à l'idée de labourer à n'importe quel moment du cycle de la végétation annuelle.
Le pêcheur exploite des animaux qui se nourrissent de matière vivante (végétale ou animale) et non pas des matière inertes (minérales) des fonds marins. Détruire, même partiellement, la vie sur les fonds marins, par des passages répétés de chaluts, ne peut que réduire la production de végétaux et d'animaux (benthos) qui participent à l'alimentation des poissons.
En conclusion, le labourage détruit une vie végétale et animale que l'agriculteur à intérêt à faire disparaître, alors que le chalutage détruit une vie végétale et animale que les pêcheurs auraient intérêt à protéger.
Bref, s'il n'y a que les affirmations que j'ai citées pour défendre le chalutage de fond… alors il y a du souci à se faire pour le chalutage de fond !
Cordialement
Pour ce qui concerne l'article de Stéphane Foucart, publié dans le journal Le Monde du 11 septembre 2012, je regrette qu'il ne soit donné ci-dessus qu'un extrait où ne figure pas ce que je considère être des informations essentielles.
Dans la fin de l'article du Monde, on cite des propos de Tom Blasdale, président du groupe de travail du CIEM sur les pêcheries profondes. Ce dernier précise : "Sur vingt-sept stocks d'espèces évalués par les experts du CIEM, vingt-cinq ne sont pas assez connus pour permettre une évaluation analytique complète". Et il ajoute : "Le CIEM a adopté une approche de précaution, ne recommandant une augmentation des prises en 2013 que sur quatre stocks – avec statu quo ou une réduction pour les autres".
Quelle différence avec ce qu'on avait pu lire dans la grande presse jusqu'ici ! Des journalistes, des scientifiques, des hommes politiques et diverses autres personnes interrogées ne se sont en effet pas gênés pour travestir les conclusions du CIEM !
Ayant soigneusement lu les publications du CIEM sur ce sujet, j'avais déjà eu l'occasion de m'insurger contre cette désinformation partisane qui avait été faite, en rendant compte de façon tout à fait partielle (et donc incorrecte !) des conclusions de cet organisme.
Le 22 juillet de cette année, j'avais écrit ici :
"Ainsi, pour certains, le CIEM aurait soi-disant dressé un tableau encourageant de l'état des stocks de poissons d'eau profonde, permettant d'envisager leur exploitation durable sur la base des prélèvements actuels. J'ai pris la peine de lire les avis du CIEM sur cette question et je trouve au contraire qu'il donne des avis qui vont très majoritairement vers une réduction des prélèvements, pour 2013 et 2014. "
Heureusement qu'il y a des journalistes comme Stéphane Foucart. Et honte à ceux qui ont diffusé une information biaisée !
L'intégralité de l'article de Stéphane Foucart est actuellement consultable ici :
http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/09/10/bataille-scientifique-autour-de-la-peche-profonde_1757919_3244.html
Cordialement
"En outre, estime Claire Nouvian, responsable de l'association Bloom, très engagée contre la pêche profonde, "le fait qu'il pourrait y avoir eu une stabilisation de deux ou trois espèces sur deux ans n'est pas significatif au regard de la centaine d'espèces non valorisées [rejetées par-dessus bord] concernées par ces pêches". "On ne tient pas compte de la destruction de l'ensemble de l'écosystème, ajoute-t-elle. Alors que l'approche écosystémique est théoriquement une obligation du droit européen."
Sur vingt-sept stocks d'espèces évalués par les experts du CIEM, vingt-cinq ne sont pas assez connus pour permettre une "évaluation analytique complète", poursuit M. Blasdale. Ils ont été soumis à une "règle d'exploitation" (une formule mathématique) pour déduire des indices disponibles une recommandation de captures. Selon M. Blasdale, le CIEM a adopté une "approche de précaution", ne recommandant une augmentation des prises en 2013 que sur quatre stocks – avec statu quo ou une réduction pour les autres.
Cependant, les données utilisées par le CIEM, de même que sa méthodologie, sont contestées. Notamment, dit en substance M. Watling, la "règle d'exploitation" est récente et n'a pas encore été soumise à la communauté scientifique, pas plus qu'elle n'a été confrontée à des simulations.
La science sera-t-elle déterminante dans le débat ? Une étude internationale à paraître dans la revue Ocean & Costal Management permet d'avoir une idée de la réponse. Dans le cas de la pêche profonde, les recommandations du CIEM ne sont souvent pas respectées par les Etats de l'Union européenne, qui autorisent des quotas supérieurs dans 60 % des cas.
De plus, ces mêmes quotas restent souvent lettre morte. "Dans 50 % des cas, les quotas ont été dépassés au cours de la période 2002-2011, concluent les auteurs. Les prises déclarées étaient en moyenne 3,5 fois supérieures pour les espèces profondes et, dans certains cas, elles ont été 10 à 28 fois supérieures à ce qui était convenu." "