Overfishing : what everyone needs to know
Ray HILBORN, avec Ulrike HILBORN. Overfishing : what everyone needs to know. Oxford University Press, 2012, 150 p.
Alain Le Sann du Collectif pêche et développement décrypte le livre de Ray Hilborn, l’un des plus grands spécialistes des pêches aux Etats-Unis.
La surpêche en question(s) : pour en finir avec la pensée unique
En 2006, une étude sur l’état de la pêche dans le monde fit sensation en affirmant que les poissons risquaient de disparaître en 2048 si on prolongeait les évolutions des stocks et la pression de pêche. Cette étude fut contestée, en particulier par Ray Hilborn qui proposa à l’un des auteurs de l’étude, Boris Worms, de reconsidérer les données qui avaient abouti aux conclusions catastrophistes. Ce travail aboutit à une publication qui remit largement en cause les analyses et conclusions de l’étude précédente, mais la presse et les ONG environnementalistes n’en tinrent aucun compte et continuent à diffuser les conclusions alarmistes. Le summum a été atteint en ce début juin 2012 avant les réunions décisives sur la réforme de la PCP et le sommet de RIO+ 20 (articles dans Paris Match et les quotidiens, infos sur le Web, communiqués, reportage sur France 5, diffusion du film «the end of the line »).
Ray Hilborn est l’un des plus grands spécialistes des pêches aux Etats-Unis. A la différence des prophètes de « l’Aquacalypse », il travaille pour améliorer la situation des pêches de manière pragmatique et avec succès ; son expérience concerne aussi bien les pêches industrielles que les pêches artisanales, au Nord comme au Sud ; il est l’un des grands spécialistes du saumon du Pacifique. Pour essayer de briser la pensée unique catastrophiste et désespérante, il a publié en mars 2012 un livre pédagogique pour faire le point sur la surpêche et les problèmes de gestion. Une approche simple, avec questions et réponses, pour clarifier une question compliquée.
La surpêche, notion complexe
La surpêche est une réalité complexe, à multiples facettes. Il existe en effet plusieurs types de surpêche. La surpêche biologique intervient lorsque la pression de pêche est supérieure au rendement biologique maximal ; le stock n’est pas nécessairement menacé d’effondrement. Cette surpêche biologique présente elle-même plusieurs aspects :
- Surpêche de recrutement, la biomasse reproductrice est jugée trop faible pour que le stock se renouvelle suffisamment.
- Surpêche de croissance, la surpêche concerne plutôt les jeunes individus, mais, en contrepartie, les individus restant ont généralement une croissance plus rapide car ils disposent de plus de nourriture si les conditions naturelles sont normales. On perd malgré tout de la biomasse potentielle car l’effort de pêche est trop important.
- Enfin, un stock en état de surpêche peut être aussi en phase de restauration si les captures permettent de maintenir un surplus générateur de croissance pour le stock, c’est le cas actuellement de la sole du Golfe de Gascogne par exemple. Cette surpêche biologique concerne environ 30% des stocks bien connus dans le monde. Ce sont surtout des pêcheries des pays développés. Il existe bien des stocks mal connus, mais ils ne sont pas tous menacés et, de plus, les stocks majeurs sont mieux connus et suivis. La tendance dans les pays développés est à une baisse de la pression de pêche et le nombre de stocks surpêchés diminue rapidement, même en Europe. Ray Hilborn rappelle qu’on ne peut se fier aux données de captures pour évaluer un stock car il existe des stocks sous-pêchés et il y a, à l’inverse, des rejets. On est donc loin des données catastrophiques de 75% de stocks surpêchés, menacés d’épuisement.
L’autre aspect de la surpêche, c’est la surpêche économique. Elle intervient lorsque l’effort de pêche dépasse un niveau qui ne permet pas de dégager la rente maximale. Ce niveau d’effort est inférieur à celui qui permet d’atteindre le rendement biologique maximal. 60% des stocks bien connus dans le monde sont dans ce cas suivant la base de données établie par Ray Hilborn. Le problème est alors économique et non pas biologique, il n’y a pas de menace d’effondrement lié à la pêche, ni d’épuisement général des fonds marins. Les stocks épuisés concernent 15% des stocks connus et bien suivis, dont certains en cours de restauration. Le déferlement médiatique sur les menaces d’épuisement des océans est donc peu justifié au vu des données actuelles qui montrent plutôt une tendance au rétablissement des stocks. Il traduit surtout une volonté de sortir de la surpêche économique pour dégager la rente maximale. C’est un choix possible, mais il n’est pas le seul et ceci mérite un vrai débat de société plus que des diktats de lobbies fondés sur des données discutables.....
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L'article intégral d'Alain Le Sann dans l'Encre de Mer
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