Les aires marines protégées !!!!
D’un côté, la pêche pirate, les accords de pêche et les sociétés transnationales pillent les ressources halieutiques africaines. De l’autre, les organisations environnementales présentent les aires marines protégées comme un remède à la surexploitation des ressources.
Au cours du Sommet mondial sur le développement durable en 2002 à Johannesburg, les dirigeants du monde avaient convenu d'appliquer d'urgence des plans d'action nationaux et régionaux afin de mettre en œuvre le plan d’action international de la FAO « pour prévenir, décourager et éliminer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée au plus tard en 2004 ».
Lors du Sommet de Johannesburg, les gouvernants avaient aussi affirmé le rôle des aires marines protégées dans la conservation de la biodiversité, en fixant pour objectif la mise en protection de 20 à 30% de la surface maritime à l’horizon 2012. Rôle réaffirmé en 2003 au Congrès Mondial sur les Aires Protégées à Durban.
Près de 10 ans après, il faut se rendre à l’évidence, la pêche pirate sévit de plus belle sur les côtes africaines. Dans le même temps, les accords de pêche entre les pays africains et l’Union Européenne n’ont de partenariat que le nom et les transnationales prospèrent sur terre comme en mer sans contreparties financières pour l’Afrique. Face à ce pillage généralisé, les organisations environnementales internationales arrivent en sauveur ; elles « poussent » les pays africains à sanctuariser leurs zones côtières avec la création d’aires marines protégées « contribuant au maintien de la biodiversité et des ressources marines et côtières » en Afrique de l’Ouest.
La pêche pirate en augmentation épuise les ressources africaines
Selon le Centre technique européen pour la coopération agricole et rurale (CTA), la pêche illicite a augmenté au cours des 10 dernières années. Elle touche tout particulièrement les pays de l’Afrique occidentale dans la zone de pêche du centre-est de l’océan Atlantique. Cette région couvre les eaux territoriales d’environ 15 pays africains, du Maroc au nord à l'Angola au sud.
La majorité des navires et des entreprises impliqués dans la pêche illégale battent pavillon des pays comme la Chine, la Russie, l'Indonésie et le Panama mais aussi de l'Union européenne (UE) et d’autres pays industrialisés, tels que le Portugal, l'Italie et le Japon.
En Guinée, pays africain parmi les plus pillés, la pêche illégale représente les deux tiers des prises légales enregistrées dans le pays. Un rapport du ministère britannique pour le Développement international (DFID) a estimé que la Guinée perdait plus de 34.000 tonnes de poissons chaque année du fait de la pêche illégale, pendant que les pêcheurs guinéens attrapaient légalement environ 54.000 tonnes de poissons par an.
La pêche illégale n’épargne aucune zone de pêche dans le monde. Cependant, les pays du Sud sont les plus exposés au danger de la pêche illégale, "avec une estimation totale des prises (illégales) en Afrique de l'ouest de 40 pour cent supérieures aux prises déclarées", selon MRAG, un cabinet-conseils basé à Londres. Outre les dommages environnementaux liés à la surexploitation des ressources qui a décimé plusieurs espèces de poissons, les pertes économiques causées par la pêche illégale s'élèvent à au moins un milliard de dollars par an pour les pays d'Afrique subsaharienne .
Dans un communiqué de presse du 27 octobre 2009, la Commission européenne indiquait qu'environ 10% des importations de produits de la mer de cette région (environ 1,7 milliard de dollars) seraient d'origine illégale. Ce n’est pas pour autant que l’Europe met en place des mesures pour éradiquer la pêche illégale. Au contraire, L’UE subventionne des organisations coupables de pêche illégale" (IPS). L’Union européenne a pendant des années accordé des subventions à hauteur d’un milliard d’euros par an à des sociétés de pêche industrielle basées dans ses Etats membres, y compris aux sociétés qui ont été prises en flagrant délit de pêche illégale dans les eaux africaines.
« Le fait que l’UE subventionne les navires qui pêchent dans les eaux africaines constitue déjà un problème parce que, ce faisant, les contribuables européens ne font qu’aggraver la difficulté des pauvres africains à assurer leur subsistance », a déclaré Isabella Loevin, membre de la commission pêche au Parlement européen (PE). « Mais que les subventions aillent aux navires européens qui violent le droit international est une chose extrêmement embarrassante et contraire à l’éthique », a ajouté Loevin.
Des accords de pêche qui n’ont de partenariat que le nom !
Des accords de pêche de nouvelle génération au début des années 1990, puis des accords de partenariat dans le domaine de la pêche au début des années 2000… Les accords de pêche entre l’Union Européenne et les pays africains changent de noms mais ils gardent le même objectif : Autoriser la flotte lointaine européenne à exploiter les ressources halieutiques africaines….
La Commission européenne indique : « Grâce à ces accords, la flotte européenne a accès aux excédents de ressources que les partenaires de l’Union ne peuvent ou ne veulent utiliser. Lorsque les accords concernent des pays d’Afrique et du Pacifique, une part non négligeable de l’aide financière européenne est spécifiquement consacrée au soutien de la politique nationale de la pêche sur la base du principe de durabilité. L’attribution et la gestion de ce financement sont décidées d’un commun accord entre le pays partenaire et l’Union européenne. »
En France, le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) reste sur la même ligne que l’Europe, il n’émet pas d’objection en matière de pêche lointaine et de relations avec les pays africains dans un rapport présenté en avril 2010 : Les enjeux des accords de pêche Union Européenne / Pays africains - Projet d’avis (CESE avril 2010). Ce document ne donne pas du tout la parole à l'autre partie prenante des accords et aux ONG qui travaillent dans ces pays africains. Le CESE ne parle pas de l’opposition de plus en plus forte des communautés de pêcheurs en Afrique vis-à-vis de ces accords qui n’ont de partenariat que le nom. En compétition directe avec la pêche artisanale locale, l’ampleur des volumes pêchés par les navires industriels européens et asiatiques constitue un vrai danger pour la sécurité alimentaire des pays africains.
Actuellement, ces accords de partenariat dans le domaine de la pêche (APP) concernent une quinzaine de pays africains et du Pacifique : Guinée Conakry, Madagascar, Seychelles, Maroc, etc. Certains pays comme le Sénégal, l’île Maurice et l’Angola ont refusé en 2006 de reconduire leurs APP avec l’Europe, s’estimant lésés. Dans le cas du Sénégal, la surexploitation des ressources halieutiques par les chalutiers européens notamment espagnols menaçait la sécurité alimentaire du pays, et les dirigeants avaient cédé face à la pression de la population, encouragée par une série de rapports accablants d’ONG (Action aide, Greenpeace, Cape…).
« Mais la Commission est tenace : parallèlement à la redéfinition de certains APP, elle pousse à la mise en place d’accords de partenariat économique (APE) beaucoup plus larges, visant à libéraliser les échanges avec l’Union. Ils comportent notamment un volet pêche, considéré par beaucoup d’observateurs comme « pire » que les APP anciens ou actuels. Que l’Union tente notamment d’imposer au Sénégal ! En cours de négociation, ces APE visent à l’ouverture réciproque des marchés, et notamment à la suppression progressive des droits de douane….. Les ONG, et même le rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter, dénoncent le caractère néfaste des APE…. » (1)
Depuis quelques années, le secteur de la pêche africain tend à se libéraliser avec le poids grandissant des sociétés transnationales. D’une part, les sociétés de pêche étrangères créent des joint ventures avec des prête-noms dans les pays africains. « Ce que l’on dénomme dans le milieu la « sénégalisation » des navires, en raison d’un phénomène initialement repéré au Sénégal pour son ampleur. C’est-à-dire la multiplication de navires battant pavillon sénégalais mais dont les capitaux et la direction sont essentiellement européens. » D’autre part, l’Union Européenne se désengage financièrement au dépend des armateurs de pêche pour le paiement de la contrepartie aux accords de pêche.
D’un côté, la pêche pirate, les accords de pêche et les sociétés transnationales pillent les ressources halieutiques africaines. De l’autre, les organisations environnementales présentent les aires marines protégées comme un remède à la surexploitation des ressources.
Au cours du Sommet mondial sur le développement durable en 2002 à Johannesburg, les dirigeants du monde avaient convenu d'appliquer d'urgence des plans d'action nationaux et régionaux afin de mettre en œuvre le plan d’action international de la FAO « pour prévenir, décourager et éliminer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée au plus tard en 2004 ».
Lors du Sommet de Johannesburg, les gouvernants avaient aussi affirmé le rôle des aires marines protégées dans la conservation de la biodiversité, en fixant pour objectif la mise en protection de 20 à 30% de la surface maritime à l’horizon 2012. Rôle réaffirmé en 2003 au Congrès Mondial sur les Aires Protégées à Durban.
Près de 10 ans après, il faut se rendre à l’évidence, la pêche pirate sévit de plus belle sur les côtes africaines. Dans le même temps, les accords de pêche entre les pays africains et l’Union Européenne n’ont de partenariat que le nom et les transnationales prospèrent sur terre comme en mer sans contreparties financières pour l’Afrique. Face à ce pillage généralisé, les organisations environnementales internationales arrivent en sauveur ; elles « poussent » les pays africains à sanctuariser leurs zones côtières avec la création d’aires marines protégées « contribuant au maintien de la biodiversité et des ressources marines et côtières » en Afrique de l’Ouest.
La pêche pirate en augmentation épuise les ressources africaines
Selon le Centre technique européen pour la coopération agricole et rurale (CTA), la pêche illicite a augmenté au cours des 10 dernières années. Elle touche tout particulièrement les pays de l’Afrique occidentale dans la zone de pêche du centre-est de l’océan Atlantique. Cette région couvre les eaux territoriales d’environ 15 pays africains, du Maroc au nord à l'Angola au sud.
La majorité des navires et des entreprises impliqués dans la pêche illégale battent pavillon des pays comme la Chine, la Russie, l'Indonésie et le Panama mais aussi de l'Union européenne (UE) et d’autres pays industrialisés, tels que le Portugal, l'Italie et le Japon.
En Guinée, pays africain parmi les plus pillés, la pêche illégale représente les deux tiers des prises légales enregistrées dans le pays. Un rapport du ministère britannique pour le Développement international (DFID) a estimé que la Guinée perdait plus de 34.000 tonnes de poissons chaque année du fait de la pêche illégale, pendant que les pêcheurs guinéens attrapaient légalement environ 54.000 tonnes de poissons par an.
La pêche illégale n’épargne aucune zone de pêche dans le monde. Cependant, les pays du Sud sont les plus exposés au danger de la pêche illégale, "avec une estimation totale des prises (illégales) en Afrique de l'ouest de 40 pour cent supérieures aux prises déclarées", selon MRAG, un cabinet-conseils basé à Londres. Outre les dommages environnementaux liés à la surexploitation des ressources qui a décimé plusieurs espèces de poissons, les pertes économiques causées par la pêche illégale s'élèvent à au moins un milliard de dollars par an pour les pays d'Afrique subsaharienne .
Dans un communiqué de presse du 27 octobre 2009, la Commission européenne indiquait qu'environ 10% des importations de produits de la mer de cette région (environ 1,7 milliard de dollars) seraient d'origine illégale. Ce n’est pas pour autant que l’Europe met en place des mesures pour éradiquer la pêche illégale. Au contraire, L’UE subventionne des organisations coupables de pêche illégale" (IPS). L’Union européenne a pendant des années accordé des subventions à hauteur d’un milliard d’euros par an à des sociétés de pêche industrielle basées dans ses Etats membres, y compris aux sociétés qui ont été prises en flagrant délit de pêche illégale dans les eaux africaines.
« Le fait que l’UE subventionne les navires qui pêchent dans les eaux africaines constitue déjà un problème parce que, ce faisant, les contribuables européens ne font qu’aggraver la difficulté des pauvres africains à assurer leur subsistance », a déclaré Isabella Loevin, membre de la commission pêche au Parlement européen (PE). « Mais que les subventions aillent aux navires européens qui violent le droit international est une chose extrêmement embarrassante et contraire à l’éthique », a ajouté Loevin.
Des accords de pêche qui n’ont de partenariat que le nom !
Des accords de pêche de nouvelle génération au début des années 1990, puis des accords de partenariat dans le domaine de la pêche au début des années 2000… Les accords de pêche entre l’Union Européenne et les pays africains changent de noms mais ils gardent le même objectif : Autoriser la flotte lointaine européenne à exploiter les ressources halieutiques africaines….
La Commission européenne indique : « Grâce à ces accords, la flotte européenne a accès aux excédents de ressources que les partenaires de l’Union ne peuvent ou ne veulent utiliser. Lorsque les accords concernent des pays d’Afrique et du Pacifique, une part non négligeable de l’aide financière européenne est spécifiquement consacrée au soutien de la politique nationale de la pêche sur la base du principe de durabilité. L’attribution et la gestion de ce financement sont décidées d’un commun accord entre le pays partenaire et l’Union européenne. »
En France, le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) reste sur la même ligne que l’Europe, il n’émet pas d’objection en matière de pêche lointaine et de relations avec les pays africains dans un rapport présenté en avril 2010 : Les enjeux des accords de pêche Union Européenne / Pays africains - Projet d’avis (CESE avril 2010). Ce document ne donne pas du tout la parole à l'autre partie prenante des accords et aux ONG qui travaillent dans ces pays africains. Le CESE ne parle pas de l’opposition de plus en plus forte des communautés de pêcheurs en Afrique vis-à-vis de ces accords qui n’ont de partenariat que le nom. En compétition directe avec la pêche artisanale locale, l’ampleur des volumes pêchés par les navires industriels européens et asiatiques constitue un vrai danger pour la sécurité alimentaire des pays africains.
Actuellement, ces accords de partenariat dans le domaine de la pêche (APP) concernent une quinzaine de pays africains et du Pacifique : Guinée Conakry, Madagascar, Seychelles, Maroc, etc. Certains pays comme le Sénégal, l’île Maurice et l’Angola ont refusé en 2006 de reconduire leurs APP avec l’Europe, s’estimant lésés. Dans le cas du Sénégal, la surexploitation des ressources halieutiques par les chalutiers européens notamment espagnols menaçait la sécurité alimentaire du pays, et les dirigeants avaient cédé face à la pression de la population, encouragée par une série de rapports accablants d’ONG (Action aide, Greenpeace, Cape…).
« Mais la Commission est tenace : parallèlement à la redéfinition de certains APP, elle pousse à la mise en place d’accords de partenariat économique (APE) beaucoup plus larges, visant à libéraliser les échanges avec l’Union. Ils comportent notamment un volet pêche, considéré par beaucoup d’observateurs comme « pire » que les APP anciens ou actuels. Que l’Union tente notamment d’imposer au Sénégal ! En cours de négociation, ces APE visent à l’ouverture réciproque des marchés, et notamment à la suppression progressive des droits de douane….. Les ONG, et même le rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter, dénoncent le caractère néfaste des APE…. » (1)
Depuis quelques années, le secteur de la pêche africain tend à se libéraliser avec le poids grandissant des sociétés transnationales. D’une part, les sociétés de pêche étrangères créent des joint ventures avec des prête-noms dans les pays africains. « Ce que l’on dénomme dans le milieu la « sénégalisation » des navires, en raison d’un phénomène initialement repéré au Sénégal pour son ampleur. C’est-à-dire la multiplication de navires battant pavillon sénégalais mais dont les capitaux et la direction sont essentiellement européens. » D’autre part, l’Union Européenne se désengage financièrement au dépend des armateurs de pêche pour le paiement de la contrepartie aux accords de pêche.
Les Aires Marines Protégées, une privatisation de l’espace maritime ?
Le concept d’Aire Marine Protégée (AMP) a été initié, au niveau international en 1995, par la Convention sur la diversité biologique qui recommande de protéger par des mesures spécifiques les zones marines et côtières menacées. En 2002, le Sommet mondial sur le développement durable a lui aussi recommandé la création de zones maritimes protégées en vue d'assurer une forte réduction du rythme actuel de perte de biodiversité, cet objectif a également été adopté lors du Congrès mondial des aires protégées de l'UICN en 2003.
Depuis, plusieurs équipes de chercheurs ont annoncé la disparition des poissons au milieu du XXIe siècle en liaison avec la surpêche. Face à ce scénario catastrophique, les AMP sont maintenant présentées comme un rempart à la surexploitation de la ressource. Elles font partie des réformes libérales en vogue en matière de gestion des pêcheries au même titre que les quotas individuels transférables à la différence près que les QIT sont une privatisation de la ressource alors que les AMP sont une privatisation de l’espace côtier.
« Dans le cadre de la réunion du comité préparatoire au sommet Rio +20, le programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) a présenté, lundi 17 mai 2010 à New York, l'aperçu du rapport « Green Economy », dont la version complète sera rendue publique à la fin de l’année. Dans cette partie, les rapporteurs expliquent que la désertification des mers n’est pas une fatalité. Selon le Pnue, il est possible non seulement d’éviter l’effondrement des populations de poissons exploitées, mais surtout de préserver à moyen et long terme une activité de pêche durable… en réduisant la flotte mondiale de bateaux de pêche… Le Pnue suggère aussi de réformer la gestion des pêcheries et de généraliser certaines pratiques, comme les quotas négociables (QIT ndlr). L’ONU milite également pour le développement des aires marines protégées, afin d’empêcher l’épuisement des stocks, et de leur permettre de récupérer et de développer à nouveau. » (2)
Ces réformes libérales sont ensuite véhiculées sur le terrain par les ONG environnementales internationales notamment en Afrique de l’Ouest. Philippe Favrelière (modifié le 1 juin 2010)
(1) L’Europe pêche en eaux troubles (Politis)
(2) La disparition du poisson n’est pas une fatalité (journal de l’environnement)
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Commentaires
Clairement, le déséquilibre est difficile à enrayer.
Une piste? Programme Smartfish
Christelle