Le mépris de l'Europe pour les pêcheurs artisanaux du monde entier

Depuis quelques années, la pêche artisanale a acquis une reconnaissance mondiale qui s’est concrétisée à Bangkok en octobre 2008 par une conférence internationale sur la pêche à petite échelle, organisée par la FAO en association avec des organisations internationales comme ICSF. Cette reconnaissance devait être actée par l’adjonction d’un chapitre supplémentaire relatif à la pêche artisanale dans le code de conduite pour une pêche responsable de la FAO au cours de la réunion annuelle de la commission des pêches (COFI) début mars 2009 à Rome. La Commission Européenne ne soutient pas cette initiative internationale au grand désarroi des pêcheurs artisanaux européens et au grand mépris de tous les pêcheurs artisanaux du monde entier, et de tous ceux, animateurs, conseillers et militants qui défendent les droits de ces millions de travailleurs et travailleuses de la pêche.

Partout dans le monde, la pêche artisanale tient une place considérable dans le développement des économies littorales, elle joue un rôle essentiel dans l’équilibre des écosystèmes côtiers et dans la souveraineté alimentaire des populations les plus pauvres. Pourtant, les communautés de pêcheurs font partie des populations les plus défavorisées.

Année après année, avec le soutien des organisations de la société civile, les pêcheurs artisanaux se sont organisés pour défendre leurs droits notamment pour l’accès à la ressource. Le Collectif National de la Pêche Artisanale du Sénégal, la Confédération Nationale de Pêche Artisanale du Chili, etc… Ces organisations qui regroupent plusieurs centaines de milliers de pêcheurs à petite échelle et de pêcheurs autochtones, sont maintenant présentes partout dans le monde. En France, les organisations qui représentent le mieux ces petits métiers sont les prud’hommies en Méditerrannée.

En Europe, la pêche artisanale a été le plus souvent englobée dans des structures professionnelles monolithiques. Mais depuis la création des Conseils Consultatifs Régionaux (CCR) et la mise en place d'ateliers spécifiques, on s’aperçoit que les pêcheurs se regroupent par affinités. Dans le CCRS (Conseil Consultatif Régional du Sud de l'Europe) qui réunit les pêcheurs depuis Brest en France jusqu’à Gibraltar, en passant par l’Espagne et le Portugal, le groupe « pêche traditionnelle » est devenu le plus important. Il rassemble tous les petits métiers si présents sur toutes nos côtes : les coquillards, les caseyeurs, les ligneurs, les courreaulleurs, les fileyeurs, les pêcheurs à pied…

Ces pêcheurs français, espagnols et portugais qui sortent en mer le plus souvent à la journée ou à la marée, se reconnaissent dans la grande famille mondiale des petits métiers à la pêche et ne pas reconnaître leurs spécificités comme c’est le cas de la Commission Européenne c’est vraiment les mépriser.

Argumentaire de l’UE

Les positions de l’UE exprimées clairement lors des 25ème, 26 ème,et 27ème sessions du COFI (Comité des pêches de la FAO) sur ce sujet devraient être maintenues. C’est à dire :
  • La position de l’UE est négative en ce qui concerne l’intégration dans le Code de conduite de nouveaux articles sur la pêche à petite échelle, mais elle est en faveur d’une application effective de tous les principes du Code. Une telle application effective améliorerait les perspectives des activités de la pêche à petite échelle dans une démarche de développement durable.
  • La position de l’UE soutient, dans un processus global, l’élaboration de directives techniques sur la pêche à petite échelle comme contribution à la sécurité alimentaire et à la réduction de la pauvreté, et dans ce contexte, elle accueille favorablement le soutien apporté par la FAO à des actions devant être menées au niveau régional, national et international.

En conclusion, l’UE recommande :

  • d’appliquer les dispositions qui existent déjà dans la législation internationale, ainsi que les accords (déclarations des NU, conventions, lois, traités qui lient les états…)
  • de s’assurer que la bonne gouvernance est appliquée avec la consultation et la participation des parties prenantes, dans la transparence et la responsabilité.
  • que le potentiel de la pêche à petite échelle soit mieux considéré, étant donné qu’elle contribue à la sécurité alimentaire, qu’elle est génératrice d’emplois, et qu’elle est peu gourmande en énergie (changement climatique).
Fin de la note (Extraits d’un document de travail sur l’élaboration de la position de l’Union Européenne au COFI du 2-6 mars 2009)

Voir aussi sur le sujet :
Tableau : Comparatif Pêche artisanale / Pêche industrielle (Pauly et Jacquet)

Photographie de Philippe FAVRELIERE : Artisanaux chiliens à la pêche de l'espadon

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