8 mars. Journée internationale de la femme : Avenir incertain


8 mars. Journée internationale de la femme

En 2010, le réseau européen AKTEA qui regroupe les organisations de femmes de la pêche et de l’aquaculture, protestait contre l’absence de toute référence à la contribution des femmes dans le Livre Vert sur la réforme de la Politique Commune de la Pêche (PCP)... En février 2014, le réseau AKTEA interpelle de nouveau la Commission européenne et le Parlement européen afin que les instruments financiers qui accompagnent la PCP prennent mieux en compte les femmes : « Malgré l’attention portée par le législateur européen et par la Commission, nous constatons que les femmes sont rapidement écartées des stratégies nationales et des plans d’actions qui en découlent. Cette marginalisation des femmes est pleinement démontrée par l’évaluation à mi-parcours du Fonds européen pour la pêche (FEP) qui montre que peu de femmes ou d’organisations de femmes ont été associées aux processus d’élaboration des plans stratégiques et d’orientations nationales pour le FEP... »

Pêche artisanale : Perte d'une grande dame... inoubliable.

Chandrika Sharma lors d'une réunion internationale des pêcheurs au Brésil... Photo Alain Le Sann - 2006

Chandrika Sharma a disparu dans l’avion de la Malaysian Airlines, dans la nuit du 7 au 8 mars 2014, le jour où le monde célèbre la journée internationale de la femme...

Source : Cdpm 29 par René-Pierre Chever

Chandrika était depuis plus de 15 ans l’infatigable secrétaire et animatrice d’ICSF (Collectif International d’appui aux pêcheurs artisans). Elle a joué un rôle majeur dans la défense des pêcheurs artisans dans toutes les instances internationales, en particulier dans l’avancée du dossier « Pêche artisanale » à la FAO (Food and Agriculture Organization) et dans la défense des droits humains des pêcheurs dans la CBD (Convention sur la Diversité Biologique).

Elle défendait avec constance et efficacité, sans jamais élever la voix, mais avec fermeté, les intérêts des femmes dans la pêche. L’une de ses dernières interventions se trouve dans le film « Chronique des oubliées » sur la marginalisation des femmes pêcheurs en Inde. Ce film sera présenté au prochain festival « pêcheurs du Monde » à Lorient. Le festival sera dédié à sa mémoire.

Elle a consacré sa vie à la défense des pêcheurs artisans, hommes et femmes, dans la discrétion mais avec une efficacité extraordinaire, toujours avec un large sourire, sans jamais se plaindre malgré la fatigue. Cette fois encore elle se rendait à une réunion de la FAO à Oulan Bator (Mongolie).

Une grande dame…inoubliable.

Alain Le Sann

« Derrière chaque bateau, il y a une femme, une famille, une communauté »

Le réseau européen AKTEA, qui regroupe les organisations de femmes de la pêche et de l’aquaculture, note que le livre vert 2010-2020, préparé par la Commission européenne et soumis à la discussion des acteurs européens, ne fait aucune référence au principe de l’égalité entre les femmes et les hommes. Selon les articles 2 et 3 du Traité européen, ce principe doit être pris en compte dans l’ensemble des politiques européennes. Il faut souligner que si le précédent Livre Vert (2000) mentionnait le mot « femme » une seule fois, le nouveau texte ne le mentionne pas du tout... (Extrait de la Réponse du réseau européen AKTEA au livre vert « Réforme de la Politique Commune de la Pêche »)

Avenir incertain

Des ressources financières et de gestion en baisse menacent la continuité de réseaux comme AKTEA qui ont joué un si grand rôle pour mettre en évidence la contribution des femmes aux pêches européennes

Créé en 2006, AKTEA est le réseau européen des organisations de femmes de la pêche. Ces femmes ont des activités diverses : certaines aident leurs compagnons pêcheurs, d’autres récoltent des coquillages, d’autres réparent les filets. Grâce à une action soutenue, ces organisations sont devenues des parties prenantes importantes dans la filière pêche et sont parvenues à influer sur les politiques relatives à ce secteur.

Les femmes de la pêche européenne se font maintenant les avocates des aspects sociaux de ce secteur et tiennent une place importante dans la gestion de la ressource. Certaines sont membres de Conseils consultatifs régionaux et donnent leurs avis à la Commission européenne. Les autorités considèrent souvent que les femmes ont l’esprit plus ouvert que les hommes dans les débats sur des questions cruciales concernant la pêche. Or, au bout de vingt années d’activité, il se trouve que ces organisations sont confrontées à de sérieuses difficultés. Ces structures fonctionnent sur la base du bénévolat, ce qui ne leur permet pas de construire des projets sur le long terme. Elles ont besoin d’un appui financier et de gestion de la part des autorités pour contribuer pleinement au développement d’une politique de pêche durable. Sans un tel soutien, elles cesseront d’exister.


Aujourd’hui, comme d’autres organisations de ce secteur, AKTEA est confronté à de nombreuses difficultés. L’avenir d’AKTEA était donc au centre de l’ordre du jour de son assemblée générale annuelle qui avait lieu le 15 octobre 2013 à Bruxelles. Le réseau a de plus en plus de mal à poursuivre ses activités habituelles. Depuis trois ans, il n’avait pas tenu sa réunion annuelle, il n’avait pas publié son bulletin semestriel. Le chapitre de la communication entre les membres (toujours un véritable défi étant donné la diversité des langues parlées en Europe) représente des dépenses importantes.

Lors de la dernière assemblée annuelle, on demandait aux participantes de répondre aux deux questions suivantes : Avons-nous encore besoin de ce réseau ? Si oui, pour faire quoi ? De l’avis général, il était clair que les membres souhaitaient que le réseau continue à vivre ; premièrement parce qu’AKTEA est le seul forum où les femmes de la pêche de différents pays européens peuvent échanger leurs expériences, deuxièmement parce que le réseau joue un rôle important pour promouvoir et rendre plus visible la contribution des femmes aux pêches de l’Union Européenne.

Pour ses membres, le réseau AKTEA est une précieuse source d’information sur les institutions et politiques européennes. Pour ces raisons, les organisations en faisant partie décidaient de rédiger une déclaration à l’adresse des décideurs, de la Commission et du Parlement de l’UE, pour expliquer le rôle et l’importance d’AKTEA pour les femmes de la pêche et pour chercher des financements indispensables à la continuation du réseau. Pour obtenir un appui financier de la part d’institutions européennes, il faut d’abord convaincre les décideurs de l’UE de l’intérêt d’AKTEA. La déclaration dira qu’il contribue à la construction de l’UE en offrant un espace où les femmes, en tant que citoyennes européennes, apprennent à mieux connaître l’Europe et les États membres.

La mise en œuvre de politiques européennes relatives à l’égalité entre hommes et femmes a ouvert la porte à des fonds structurels UE pour les femmes. Le Fonds européen pour la pêche (FEP) actuel et le prochain Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) ont commencé à accorder plus d’attention aux initiatives des femmes au niveau de l’entreprise de pêche et de l’action collective. Dans le cadre de l’entreprise de pêche, les femmes peuvent faire une demande de financement pour aider à la diversification de leurs activités. Au niveau collectif, des fonds sont disponibles pour le réseautage. Dans la pratique cependant, peu de pays prêtent attention aux mesures introduites par le FEP en faveur de l’égalité hommes-femmes, et les initiatives de femmes financées par les fonds structurels sont peu nombreuses. Ce manque d’attention oblige les organisations féminines à s’interroger sur leur rôle, sur leur existence et leur acceptation dans l’espace public.

Les Actions envisagées pour appliquer la stratégie européenne en matière d’égalité entre hommes et femmes pour la période 2010-2015 qui accompagnent la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions (COM 2010 491, SEC 2010-1080) évoquent aussi les femmes de la pêche. Il est notamment proposé « d’aider les États membres à promouvoir l’égalité des sexes dans les programmes du FEP en tirant les leçons de l’évaluation à mi-parcours », et de « créer un réseau pan-européen de femmes actives dans le secteur de la pêche et les régions côtières afin d’améliorer la visibilité de ces femmes et d’établir une plateforme pour l’échange des meilleures pratiques ». Lors du processus de consultation pour la feuille de route européenne sur l’égalité, le réseau AKTEA a fait état de ces propositions d’action. Bien que ces propositions aient été acceptées par la Commissaire européenne chargée de la pêche au cours d’une audition publique (2010) à la commission Pêche du Parlement européen, les organisations des femmes de la pêche attendent toujours. Cette longue attente aura des effets préjudiciables à la fois pour AKTEA et pour les organisations nationales qui ont contribué à améliorer les droits des femmes dans la filière pêche et à formuler des politiques de la pêche soucieuses des aspects sociaux.

Les femmes de la pêche aimeraient croire que cette dernière demande de soutien financier trouvera un écho plus favorable que les appels précédents auprès des autorités. La triste vérité est que, en l’absence d’une aide adéquate, la majorité des organisations de pêcheurs disparaîtront bientôt.

Katia Frangoudes (Katia.Frangoudes@univ-brest.fr) et Marja Bekendam (Info@hoekman-bekendam.nl), réseau AKTEA (Source : Yemaya - décembre 2013)

Déclaration du réseau européen AKTEA regroupant les organisations des femmes de la pêche, adressée au Parlement européen et à la Commission européenne.

Nous, organisations de femmes de la pêche en Europe, avons créé en 2006 le réseau européen AKTEA pour revendiquer nos droits, échanger des expériences et des informations afin de mieux connaître les combats et les revendications menés par les femmes de la pêche au niveau des Etats membres.

AKTEA agit pour rendre visibles nos actions et nos revendications en tant que femmes, mais aussi en tant que membres des communautés de pêches, auprès des institutions européennes. Nous sommes un réseau bénévole, au même titre que la plupart des organisations membres. C’est dans ce but que nous nous adressons directement aux institutions européennes car nous voulons que les instruments financiers qui accompagnent la Politique Commune des Pêches prennent mieux en compte les femmes. Malgré l’attention portée par le législateur européen et par la Commission, nous constatons que les femmes sont rapidement écartées des stratégies nationales et des plans d’actions qui en découlent. Cette marginalisation des femmes est pleinement démontrée par l’évaluation à mi-parcours du FEP qui montre que peu de femmes ou d’organisations de femmes ont été associées aux processus d’élaboration des plans stratégiques et d’orientations nationales pour le FEP.

Pour éviter une nouvelle marginalisation lors de la mise en place du FEAMP, AKTEA propose l’utilisation d’indicateurs sur le genre au moment des différentes évaluations. Ces indicateurs nous permettront de connaître le degré d’intégration des femmes dans les processus de mise en place des fonds, mais aussi le nombre de projets financés qui sont portés par des femmes ou destinés aux femmes. Les femmes méritent d’être prises en considération par l’ensemble des axes du FEAMP et pas seulement par un seul axe comme pour le FEP (axe 4). Les organisations des femmes de la pêche revendiquent les mêmes droits que les hommes pour accéder à ces fonds, non seulement en tant que conjointes collaboratrices ou pêcheuses mais aussi en tant qu’organisations nationales ou locales.

Le réseau AKTEA fonctionne depuis 7 ans sans financement. Il doit maintenant être soutenu par des financements européens. C’est ce que prévoit le plan stratégique européen sur l’égalité des chances qui mentionne le soutien financier d’un réseau européen des femmes de la pêche par la DG MARE. Lors de l’Assemblée Générale d’AKTEA du 15 Octobre 2013 à Bruxelles, nous avons décidé à l’unanimité de maintenir le réseau AKTEA car c’est notre seule source d’information accessible en provenance de l’Europe et notre moyen de lobbying pour être visibles et faire connaître nos revendications au niveau européen. AKTEA est l’unique endroit où nous pouvons nous rencontrer et échanger sur nos droits et sur l’égalité des chances entre femmes et hommes, mais aussi sur la situation du secteur de la pêche et des communautés dans lesquelles nous vivons.

Nous vous adressons cette déclaration car nous voulons continuer à être des actrices dans la construction européenne et dans le maintien du secteur de la pêche, mais pour cela nous devons pérenniser notre réseau en demandant simplement la mise en application des dispositions énoncées par la DG MARE dans le plan stratégique européen sur l’égalité des chances.

AKTEA réseau Européen des organisations de femmes de la pêche agit en faveur de :
  • la promotion de la visibilité du rôle des femmes dans la pêche et l’aquaculture
  • la promotion de la reconnaissance de la contribution des femmes dans ces secteurs
  • la promotion de la participation des femmes dans le processus de décision lié au secteur de la pêche
  • la promotion des échanges d’expériences, des problèmes et solutions, parmi les femmes de la pêche en Europe.
  • la promotion de l’intégration de femmes et des organisations des femmes au sein du cadre institutionnel et politique de la pêche et d’aquaculture en Europe.
  • la promotion de l’amélioration de la confiance en soi de femmes
  • la promotion du développement durable de la pêche et de l’aquaculture et la survie des communautés de pêches et littorales.

Source : http://www.fishwomen.org/

Autres articles :

Pour aller plus loin

Le 27 Février 2015

Femmes de mer - 42 Portraits de Femmes travaillant dans les secteurs de la pêche et l’aquaculture



A l’occasion du Salon International de l’Agriculture, Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, et Pascale Boistard, secrétaire d’Etat chargée des Droits des femmes, ont présenté l’ouvrage « Femmes de mer ».

Cet ouvrage met à l’honneur le travail des femmes et leur place dans l’ensemble de la filière de la pêche et de l’aquaculture. Il présente de manière détaillée 42 portraits de femmes mais aussi les différents métiers qu’elles exercent tant à bord des navires de pêche et dans la production aquacole qu’à des postes administratifs et de secrétariat.

Conçu dans le cadre du plan d’action du gouvernement en faveur de l’égalité femmes-hommes et de la mixité des métiers, ce livre nous invite à partager la vision de ces femmes sur leurs conditions de travail, les difficultés auxquelles elles sont exposées, leur savoir-faire et leur parcours personnel.

La richesse et la diversité de la pêche et de l’aquaculture françaises se tissent au quotidien par l’activité de femmes et d’hommes passionnés par leur métier. Ils sont à la source de près de 100 000 emplois indirects. Avec une consommation de produits aquatiques de 35kg par habitant et par an, et un chiffre d’affaires de 1,7 milliard d’euros pour la pêche et l’aquaculture, ces secteurs représentent un des piliers de l’économie maritime française.

Cliquer Ici pour télécharger : Femmes de mer - 42 Portraits de Femmes travaillant dans les secteurs de la pêche et l’aquaculture

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7 mai 2015

« La seule place pour les seins d'une femme à bord d'un bateau est sur la proue »

Alex Cope, réserve de Millbrook


Le Tribunal canadien des droits de la personne donne raison à une pêcheuse autochtone de la réserve de Millbrook, en Nouvelle-Écosse, qui avait déposé une plainte pour discrimination sur la base de son sexe.

Source : Radio Canada

Stacey Marshall Tabor rêve de devenir capitaine de bateau de pêche au homard depuis longtemps. Elle a commencé à travailler comme membre d'équipage sur un des bateaux de la réserve en 2000 et a décroché un brevet de capitaine, peu après, pour obtenir de l'avancement. Mais selon le Tribunal des droits de la personne, ses demandes pour obtenir une licence de capitaine ont été rejetées pendant des années par le conseil de bande de la réserve, uniquement parce qu'elle est une femme.

En fait, selon la décision du Tribunal, des hommes moins compétents qu'elle ont obtenu des postes de capitaine au cours des années 2000. Même son mari a reçu un poste de responsabilité, en dépit du fait que sa seule expérience dans le domaine des pêches consistait à préparer des équipements et à peindre des bouées. Le Tribunal note également, dans sa décision, qu'elle a fait l'objet de commentaires dérogatoires d'un membre en vue du conseil de bande, qui lui a dit à plus d'une reprise que la « seule place pour des seins de femme à bord d'un bateau est sur la proue, comme figure de proue ».

Discrimination systématique

La Première Nation de Millbrook a nié, dans sa défense, avoir rejeté la candidature de Mme Tabor parce qu'elle est une femme. Elle précise que sa candidature a été considérée au même titre que celles de deux candidats masculins. L'homme qui a obtenu une licence de capitaine lors de sa dernière demande en 2008 était plus compétent qu'elle, a soutenu la réserve.

Le Tribunal, toutefois, a conclu que la candidature de Mme Tabor n'a jamais été sérieusement considérée et que son rejet s'inscrivait dans une tendance plus large, au sein de la réserve, consistant à refuser systématiquement aux femmes des postes de responsabilité au sein de l'industrie des pêches. Le Tribunal n'impose pas de remède pour l'instant, puisque les deux parties ont fait état de leur désir de trouver un terrain d'entente. Il demandera toutefois aux parties de lui faire un compte rendu sur l'état de leurs négociations.

Ironie du sort, la plaignante, Stacey Marshall Tabor, est la nièce de Donald Marshall fils, celui-là même qui a défendu avec succès les droits de pêche des communautés micmaques.

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Le rôle des femmes dans la filière des produits de la mer

La dernière publication GLOBEFISH, traite d’un sujet malheureusement trop peu traité et abordé : le rôle des femmes dans la filière des produits de la mer. Parce que la moitié des travailleurs de la mer sont en fait … des travailleuses ; invisibles, mal payées mais indispensables à la filière.

Le travail qu’a mené Marie Christine Monfort au cours des mois passés, repose sur la littérature scientifique (sociologues, anthropologues…) et sur l’examen de la situation des connaissances sur le sujet dans six pays, dont la France.

« L’attention portée aux femmes, très présente aux Nations Unies, pointe son nez à Bruxelles et descend lentement mais sûrement dans nos filières, pour plus de visibilité, de reconnaissance et d’équité... »

Marie Christine Monfort (économiste-consultante dans la filière des produits de la mer)

Cliquer Ici pour accéder à la publication de Globefish :  "The role of women in the seafood industry"



Vol 119 - The role of women in the seafood industry

One in two seafood workers is a woman. This worldwide desktop study, the first of its kind, presents what is known, and what remains to be investigated in this crucial component of the seafood industry.

Globefish Research Programme, Vol. 119

Author: Marie Christine Monfort

Language: English

Women participate to all segments of the seafood industry, including fishing, farming, trading and selling, monitoring and administrating. But the widespread lack of consideration for their role and work in the seafood industry are, in many respect, disadvantageous to them and ultimately bar them from fully and equitably participate to the industry.

The primary aim of this report is to increase consciousness of business leaders and policy makers, to enlarge their knowledge and sensitization about the value women bring to the seafood industry, and to encourage them to consider each time they develop a new project or a policy: “Have we not overlooked women?”

Price: € 30.00

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Le 17 mars 2014

PCP. Femmes dans la pêche

Mesures spécifiques dans le cadre de la politique commune de la pêche pour développer le rôle des femmes

La pêche européenne

Femmes dans la pêche: un rôle méconnu

Cliquer Ici pour télécharger ce Dossier n° 17 - Juillet 2003

Rapport concernant des mesures spécifiques dans le cadre de la politique commune de la pêche pour développer le rôle des femmes

30 janvier 2014          

(2013/2150(INI))

Commission de la pêche

Commission des droits de la femme et de l'égalité des genres

Rapporteurs: Dolores García-Hierro Caraballo, Raül Romeva i Rueda

Cliquer Ici pour accéder aux documents du Parlement Européen (rapport, résolution et texte adopté)

(Réunions conjointes de commissions – article 51 du règlement)
                        PROPOSITION DE RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN
                        EXPOSÉ DES MOTIFS
                        RÉSULTAT DU VOTE FINAL EN COMMISSION

Exposé des motifs

Le présent rapport a pour objet de renforcer les connaissances, les recommandations et les initiatives de la commission de la pêche et de la commission des droits de la femme en rapport avec le rôle socioéconomique joué par les femmes dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture, dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche.

Parmi les actions spécifiques mises en œuvre ces dernières années par la commission de la pêche du Parlement européen en ce qui concerne le développement de l'égalité entre les hommes et les femmes dans la politique commune de la pêche figurent notamment la résolution du Parlement européen sur les réseaux de femmes dans la pêche, l'aquaculture et les activités de diversification (2004/2263(INI)) de la commission de la pêche, le Fonds européen pour la pêche pour la période 2007-2013 et, surtout, l'audition organisée en 2010 par la commission de la pêche sur "Les femmes et le développement durable dans les zones de pêche", durant laquelle les conditions difficiles auxquelles sont confrontées les femmes dans le monde de la pêche et la nécessité de promouvoir l'implication des femmes dans tous les aspects de la politique de la pêche ont été soulignées.

L'audience commune de la commission de la pêche et de la commission des droits de la femme sur le rôle des femmes dans la pêche et l'aquaculture européennes, qui s'est tenue le 14 octobre 2013, a été l'occasion d'analyser la situation des femmes dans le secteur de la pêche, leur rôle dans la création de nouvelles possibilités dans les communautés côtières, les nouvelles actions visant à soutenir la création de réseaux de femmes et les échanges de bonnes pratiques, la prise en considération de la dimension de genre dans les diverses étapes de mise en œuvre du Fonds européen pour la pêche, en particulier à l'axe 4 de celui-ci, et les perspectives d'avenir dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche.

En ce qui concerne la réforme en cours de la politique commune de la pêche, il convient de mentionner le rapport sur la pêche artisanale à petite échelle et la réforme de la politique commune de la pêche (2011/2292(INI)), qui reprend les concepts particulièrement importants pour le rôle des femmes dans le secteur de la pêche, ayant trait à l'amélioration des conditions sociales et professionnelles des femmes et à leur rôle économique, social et culturel, ainsi que la communication générale sur la réforme de la politique commune de la pêche (2011/2290(INI)). Celle-ci souligne la nécessité d'accorder une plus grande reconnaissance juridique et sociale aux femmes du secteur de la pêche, ainsi que l'importance de leur travail et le rôle qu'elles jouent dans l'économie familiale, y compris celle des couples non mariés.

Malgré l'importance socioéconomique des femmes dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture, les plans, les programmes et la législation en matière de pêche font rarement concrètement référence à l'existence de conditions équitables d'accès aux emplois liés à la pêche pour les femmes.

Le travail des femmes dans la pêche et les activités connexes se fait souvent de manière invisible, comme complément au travail de leur partenaire, dans un contexte économique de plus en plus difficile pour les entreprises familiales. Les femmes se trouvant dans cette situation ne touchent pas de salaire fixe et ne bénéficient pas de prestations sociales. Signalons également que certaines femmes exercent cette activité comme unique moyen de subsistance.

La rareté des informations statistiques disponibles au sujet du rôle des femmes dans le monde de la pêche, ainsi que les difficultés rencontrées pour y accéder, représentent un obstacle majeur pour évaluer les tâches exercées par les femmes et la contribution économique de celles-ci. Il est par conséquent difficile de connaître en détail la réalité de la situation professionnelle des femmes du secteur de la pêche et de l'aquaculture lorsque les informations fournies ne sont pas ventilées par genre ou par type d'activité à l'intérieur du secteur de la pêche et sont davantage axées sur la production de poisson.

La nouvelle politique commune de la pêche doit contribuer à la protection de l'environnement marin et, en particulier, à l'atteinte d'un bon état écologique en 2020, comme le prévoit la directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre d'action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin (directive-cadre "stratégie pour le milieu marin"). Pour ce faire, il convient de prendre en considération la contribution des femmes travaillant dans le secteur de la pêche artisanale, vu son importance pour la réalisation des objectifs de la directive de par le travail respectueux du milieu marin effectué par les femmes.

Il convient également de garder à l'esprit le fait que les femmes et les jeunes sont les principales victimes en période de récession ou de crise économique telle que celle que nous connaissons actuellement et qu'ils sont les premiers à voir se détériorer leurs perspectives d'emploi, leur rémunération et leurs conditions de travail.

Il existe actuellement en Europe quelques associations et organisations de femmes du monde de la pêche ayant pour but de défendre leurs droits et d'obtenir des conseils et qui leur permettent de rester en contact, de parvenir à une meilleure coordination et de pouvoir accéder aux aides existantes. On dénombrait en 2008 dans l'Union 18 organisations actives au niveau local ou régional, 4 organisations nationales, un réseau national, 3 réseaux transnationaux et 1 réseau européen.

En Europe, le plus vaste réseau de femmes est le réseau AKTEA: ses objectifs sont notamment d'améliorer la visibilité du rôle des femmes dans la pêche, l'aquaculture et les autres activités connexes, de sensibiliser l'opinion à la contribution des femmes à ces secteurs, d'impliquer les femmes dans les processus décisionnels de ces secteurs, d'échanger des expériences, etc.

La formation est l'un des aspects clés du développement et de la professionnalisation de tout secteur professionnel. Les tâches exécutées par les femmes dans la pêche artisanale doivent être régulées au moyen de formations officielles favorisant la continuité du métier dans la société. Il y a lieu également de souligner la nécessité, pour les femmes du secteur de la pêche, d'apprendre à utiliser les outils informatiques nécessaires aux activités spécifiques des entreprises ou de l'économie familiale et relatifs à la gestion.

Le futur Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) pour la période 2013-2020 est actuellement en cours d'élaboration. Il constituera le principal outil d'aide au financement dans le secteur européen de la pêche et de l'aquaculture.

Dans le cadre de ce nouveau FEAMP, les États membres devront garantir l'accès des jeunes et des femmes du secteur de la pêche à une formation permanente, afin qu'ils puissent mieux se valoriser sur le marché du travail de la pêche et assurer leur promotion et leur présence dans tous les organismes représentatifs.

De même, ils devront garantir les aides à la promotion et au maintien des associations de femmes dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture qui promeuvent un renforcement de leur présence, leur confiance et leur reconnaissance sociale.

Il convient également de souligner l'importance de la participation des chercheuses dans le domaine de l'environnement marin, surtout en ce qui concerne l'emploi des femmes dans le secteur de la pêche et l'état des ressources, essentielles à une exploitation durable de la pêche, en anticipant les incidences éventuelles du changement climatique.

D'après l'article 79 du FEAMP, sont notamment admissibles à une aide les types d'opérations liés aux analyses scientifiques et à la mise en œuvre de la PCP, les programmes d'échantillonnage nationaux pluriannuels, les campagnes scientifiques de recherche sur le milieu marin, etc. Soulignons toutefois l'importance que le nouveau FEAMP assure la collecte et l'analyse continues de données relatives à l'emploi des femmes dans le secteur de la pêche et l'aquaculture et leur contribution socioéconomique à ce secteur. Le respect de cette exigence favoriserait en outre le respect des conditions générales figurant à l'annexe III du FEAMP, réclamant l'application et l'exécution effectives d'une stratégie explicite visant à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes garanties, entre autres, par un système de collecte et d'analyse de données et d'indicateurs ventilés par sexe permettant l'élaboration de politiques d'égalité fondées sur des éléments probants.

Le nouveau FEAMP devra par ailleurs encourager l'octroi d'aides à toutes les femmes qui contribuent de manière invisible, par leur travail, à l'économie familiale, sous le statut de conjointe, de partenaire de vie, etc.

Le nouveau règlement de base de la politique de la pêche énonce à l'article 2 ses principes généraux et établit, à l'article 7, des objectifs pour l'exploitation durable des ressources ainsi que des mesures visant à atténuer l'incidence négative des activités de pêche sur la biodiversité et les écosystèmes marins. Pour atteindre ces objectifs, il est essentiel de mettre en valeur les activités des pêcheuses de coquillages, qui exploitent les ressources halieutiques de manière durable, dans le respect des populations et de leur régénération, et qui sont conscientes qu'en dépassant les limites de ce milieu, elles ne disposeront plus à l'avenir de ressources pour exercer leur profession.

La nouvelle politique commune de la pêche devra poursuivre la réalisation des objectifs relatifs au principe d'égalité, à la reconnaissance historique du rôle socioéconomique des femmes dans le monde de la pêche, à la lutte contre la discrimination fondée sur le genre, aux mesures sociales et aux aides nécessaires pour lutter contre le chômage, à la promotion de l'inclusion des femmes dans les comités et conseils consultatifs et de leur participation aux associations ainsi qu'à l'élaboration des instruments financiers et des mesures et aides sociales nécessaires lors des périodes de repos biologique des travailleuses.

En résumé, les femmes qui travaillent dans le secteur de la pêche demeurent confrontées à de nombreux besoins. Il est nécessaire de réglementer leurs conditions de travail et de leur garantir une situation égale à celle des hommes, de faire en sorte que les générations futures soient attirées par les conditions de travail du secteur et de reconnaître la contribution des femmes au développement durable de la pêche. Pour ce faire, il est essentiel que cette réforme de la politique commune de la pêche pose les bases nécessaires à l'élaboration des aides, lignes directrices, plans et programmes de formation, ainsi qu'à la reconnaissance et à l'obtention des droits nécessaires pour assurer un avenir meilleur et plus stable aux travailleuses du secteur de la pêche.

Résolution du Parlement européen
 
Jeudi 27 février 2014 - Strasbourg    

Mesures spécifiques dans le cadre de la politique commune de la pêche pour développer le rôle des femmes

Cliquer Ici pour accéder aux Textes adoptés

Résolution du Parlement européen du 27 février 2014 concernant des mesures spécifiques dans le cadre de la politique commune de la pêche pour développer le rôle des femmes (2013/2150(INI))

Le Parlement européen ,

  vu les dispositions législatives applicables au Fonds européen pour la pêche, notamment les règlements (CE) n°  2328/2003, (CE) n° 861/2006, (CE) n° 1198/2006 et (CE) n° 791/2007 du Conseil, qui établissent les règles et les accords relatifs aux interventions structurelles de l'Union dans le secteur de la pêche,

  vu la directive 2010/41/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 concernant l'application du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante, et abrogeant la directive 86/613/CEE du Conseil(1) ,

  vu sa position du 6 février 2013 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la politique commune de la pêche(2) ,

  vu sa position du 12 septembre 2012 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture(3) ,

  vu la proposition de la Commission et les positions adoptées par le Parlement et le Conseil au sujet du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (COM(2011)0804),

  vu la proposition de la Commission et les positions adoptées par le Parlement et le Conseil au sujet de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil définissant les règles de participation au programme-cadre pour la recherche et l'innovation «Horizon 2020» (2014-2020) et les règles de diffusion des résultats (COM(2011)0810),

  vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Stratégie pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2010-2015» (COM(2009)0491),

  vu sa résolution du 15 décembre 2005 sur les réseaux des femmes: pêche, agriculture et diversification(4),

  vu sa résolution du 22 novembre 2012 sur la petite pêche côtière, la pêche artisanale et la réforme de la politique commune de la pêche(5),

  vu sa résolution du 22 novembre 2012 sur la dimension extérieure de la politique commune de la pêche(6),

  vu sa résolution du 12 septembre 2012 sur la réforme de la politique commune de la pêche – communication globale(7),

  vu l'audition sur les femmes et le développement durable des zones de pêche, organisée par la commission de la pêche le 1er  décembre 2010,

  vu l'audition sur la promotion du rôle des femmes dans la pêche et l'aquaculture européennes, organisée le 14 octobre 2013 au Parlement européen par la commission de la pêche et la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres,

  vu l'article 48 de son règlement,

  vu les délibérations communes de la commission de la pêche et de la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres conformément à l'article 51 du règlement,

  vu le rapport de la commission de la pêche et de la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres (A7-0070/2014),

A.  considérant que le travail effectué par les femmes dans les secteurs de la pêche et de l'aquaculture n'est pas reconnu et reste globalement invisible, bien qu'il apporte une valeur ajoutée considérable sur le plan économique et qu'il contribue à l'amélioration de la viabilité sociale, économique et environnementale de nombreuses localités et régions européennes, en particulier dans les régions dépendantes de la pêche;

B.  considérant que, dans les États membres de l'Union, plus de 100 000 femmes travaillent dans le secteur de la pêche, dont 4 % dans le secteur de la capture et dans des emplois liés à l'activité des navires de pêche, tels que la réparation des filets, le déchargement des embarcations ou le conditionnement des produits, 30 % dans celui de l'aquaculture (principalement la pêche aux coquillages à pied) et environ 60 % dans l'industrie de la transformation;

C.  considérant la pénibilité des travaux traditionnellement effectués par les femmes dans les secteurs de la pêche et de l'aquaculture, notamment la pêche aux coquillages à pied, la vente traditionnelle de poisson, ambulante ou dans des infrastructures appropriées, la fabrication et la réparation de filets de pêche et le déchargement et la classification du poisson, ainsi que l'emballage dans des conditions climatiques particulièrement difficiles;

D.  considérant que les statistiques sous-estiment fortement la situation professionnelle réelle des femmes dans certains de ces secteurs, que la crise économique généralisée ainsi que le taux de chômage élevé dans certains États membres ont contribué à augmenter davantage ces chiffres et que le nombre de femmes travaillant dans le secteur de la pêche s'est accru, notamment dans la pêche aux coquillages à pied, dans le but de compléter, voire d'assurer, le revenu des ménages;

E.  reconnaissant la contribution apportée par les femmes aux activités ayant trait à la pêche et à l'aquaculture, en particulier à celles relatives à la fabrication et à la réparation des engins de pêche, au déchargement et à la classification du poisson, à la gestion de l'approvisionnement des navires en produits, au traitement, à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation du poisson, ou à la gestion des entreprises de pêche;

F.  considérant que le Parlement, au paragraphe 30 de sa résolution du 22 novembre 2012 sur la petite pêche côtière, la pêche artisanale et la réforme de la politique commune de la pêche, invite les États membres à prendre en considération l'importance des rôles économique, social et culturel des femmes dans l'industrie de la pêche de manière à leur permettre d'accéder aux prestations sociales et souligne que la participation active des femmes aux différentes activités connexes à la pêche contribue au maintien et à la survie du secteur de la pêche, au maintien des traditions et des pratiques spécifiques et à la protection de la diversité culturelle des différentes régions;

G.  considérant que le Parlement, dans sa position du 12 septembre 2012, plaide pour l'encouragement de la participation des femmes aux organisations de producteurs du secteur de la pêche et de l'aquaculture;

H.  considérant que le Parlement, au paragraphe 31 de sa résolution du 22 novembre 2012 sur la petite pêche côtière, la pêche artisanale et la réforme de la politique commune de la pêche, demande au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) d'apporter un financement afin d'encourager la participation des femmes au secteur de la pêche, de soutenir les associations de femmes, d'assurer une formation professionnelle pour les femmes et d'améliorer le rôle des femmes dans le secteur de la pêche en soutenant à la fois les activités pratiquées à terre et les activités liées à la pêche, tant en amont qu'en aval;

I.  considérant que le Parlement, au paragraphe 39 de sa résolution du 22 novembre 2012 sur la petite pêche côtière, la pêche artisanale et la réforme de la politique commune de la pêche, demande à la Commission et aux États membres d'adopter des mesures pour garantir que les femmes puissent jouir du même niveau de salaire et d'autres droits sociaux, économiques et liés à l'emploi, y compris les assurances couvrant les risques auxquels elles sont exposées en travaillant dans le secteur de la pêche et la reconnaissance de leurs pathologies spécifiques en tant que maladies professionnelles, ainsi que les mesures destinées à appliquer les coefficients de réduction afin d'anticiper l'âge de départ à la retraite en raison de la pénibilité du travail (travail de nuit, travail dangereux, horaires soumis au rythme de la production ou aux possibilités de pêche);

J.  reconnaissant que les statistiques relatives à la main-d'œuvre, et notamment celles ventilées en fonction des genres dans certaines activités, ainsi que celles portant sur la pêche artisanale et la petite pêche côtière, l'aquaculture extensive et les activités connexes, restent moins nombreuses que celles relatives aux captures, aux débarquements, au tonnage, etc.;

K.  considérant que les données statistiques relatives à l'Union et aux États membres concernant la main-d'œuvre dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture ainsi que dans les secteurs connexes ne sont ni complètes, ni harmonisées ou sont ventilées par des indicateurs qui ne permettraient pas d'évaluer la contribution des femmes dans ces secteurs;

L.  considérant qu'en dépit de leur travail et de leur considérable apport économique, les femmes du secteur de la pêche et de l'aquaculture ne jouissent ni d'une protection sociale et syndicale adéquate, ni d'un statut professionnel approprié;

M.  considérant que les femmes subissent une discrimination économique dans le secteur de la pêche et qu'à travail égal, elles sont moins rémunérées que les hommes;

N.  considérant que, bien souvent, le travail des femmes dans le secteur de la pêche ne bénéficie d'aucune reconnaissance juridique et ne donne droit à aucune protection sociale adaptée aux risques et aux problèmes de santé spécifiques et caractéristiques de ces activités;

O.  considérant que, au paragraphe 42 de sa résolution du 22 novembre 2012 sur la petite pêche côtière, la pêche artisanale et la réforme de la politique commune de la pêche, le Parlement invite la Commission et les États membres à prendre des mesures pour favoriser une reconnaissance accrue, tant au niveau juridique que social, du travail des femmes dans le secteur de la pêche, pour garantir que les femmes qui travaillent à temps complet ou à temps partiel pour des entreprises familiales ou qui aident leur conjoint, contribuant ainsi à assurer leur propre viabilité économique ainsi que celle de leur famille, bénéficient d'un statut légal ou de prestations sociales équivalentes à celles réservées aux travailleurs indépendants, conformément à la directive 2010/41/UE, et pour qu'elles se voient garantir des droits sociaux et économiques, notamment une rémunération égale à celles des hommes, des allocations de chômage en cas de cessation (temporaire ou définitive) d'activité, le droit de percevoir une pension de retraite, de concilier vie familiale et vie professionnelle, de prendre un congé de maternité, de bénéficier de la sécurité sociale et de soins de santé gratuits, et de disposer d'une protection de la sécurité et de la santé au travail, ainsi que d'autres droits sociaux et économiques, notamment une assurance couvrant les risques en mer;

P.  considérant que, dans sa résolution du 12 septembre 2012, le Parlement a jugé nécessaire que le rôle des femmes dans le secteur de la pêche fasse l'objet d'une plus grande reconnaissance et soit mieux valorisé tant au niveau juridique que social, que les femmes jouissent des mêmes droits que les hommes et que les conjointes et les partenaires de vie des pêcheurs soutenant l'entreprise familiale bénéficient d'un statut juridique et de prestations sociales équivalents à ceux des indépendants;

1.  exhorte la Commission à élaborer un programme statistique ciblant spécifiquement les régions dépendantes de la pêche, en accordant une attention particulière à la pêche côtière artisanale, aux méthodes de pêche artisanales et aux canaux de commercialisation propres à ce secteur, ainsi qu'au travail et aux conditions sociales et syndicales des cueilleuses de fruits de mer, des remmailleuses de filets et des travailleuses artisanales de la pêche et des activités connexes, dans le but d'évaluer les besoins propres aux activités des femmes et d'améliorer la reconnaissance sociale de ces professions à forte pénibilité;

2.  estime nécessaire d'améliorer la collecte et l'analyse d'informations statistiques au sujet de l'emploi dans le secteur de la pêche, ventilées par sexe, type d'activité et type d'emploi (indépendant, salarié, à temps complet, à temps partiel, occasionnel), afin de pouvoir évaluer la contribution des femmes au secteur de la pêche et de l'aquaculture;

3.  demande instamment à la Commission d'étendre la compilation d'informations ventilées par sexe au secteur des captures et d'introduire de nouveaux indicateurs comme l'âge, les niveaux d'éducation et de formation et l'activité de conjoints ou de partenaires;

4.  juge nécessaire d'instaurer des définitions claires concernant les indicateurs statistiques utilisés pour la collecte de données sur l'emploi de la main-d'œuvre dans la pêche, l'aquaculture et les domaines connexes; estime, en outre, qu'il y a lieu d'élaborer une série d'indicateurs statistiques au niveau de l'Union, et demande aux États membres de fournir, en temps utile, des données complètes concernant ces indicateurs;

5.  invite instamment la Commission et le Conseil à reconnaître, tant sur le plan juridique que social, le rôle joué par les femmes dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture et dans le développement durable des zones dépendantes de la pêche, dans le but d'éliminer tous les obstacles économiques, administratifs et sociaux qui entravent leur participation dans des conditions équitables;

6.  demande instamment à la Commission et au Conseil d'inciter les États membres à réglementer et à reconnaître comme maladies professionnelles les lésions aux articulations ou à la colonne vertébrale et les maladies rhumatismales provoquées par les rudes conditions météorologiques dans lesquelles les pêcheuses de coquillages, les remmailleuses de filets, les femmes qui déchargent les embarcations et conditionnent les produits, celles qui travaillent dans des entreprises de transformation, les femmes chargées du traitement, les pêcheuses et les négociantes doivent travailler, ainsi que les affections liées à la manipulation de poids excessifs;

7.  invite instamment la Commission à reconnaître que le travail des femmes contribue à l'amélioration de la traçabilité des produits de la pêche, ce qui améliore l'information du consommateur et assure des normes de qualité et de sécurité plus élevées pour les produits de la pêche et de l'aquaculture tout en améliorant les possibilités économiques, gastronomiques et touristiques offertes par les zones de pêche;

8.  appelle à la création (dans le cadre du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche et/ou d'autres instruments) de mécanismes de soutien spécifiques pouvant être activés en cas d'urgence (catastrophes naturelles) ainsi que de mécanismes de compensation financière permettant de venir en aide aux pêcheurs et aux pêcheuses ainsi qu'à leurs familles pendant les interdictions temporaires de pêche, en particulier dans les régions où la pêche est la seule source de revenus;

9.  juge nécessaire d'encourager et de soutenir financièrement la création d'associations de femmes via des réseaux aux niveaux national et européen, dans le but d'accroître la visibilité du rôle de la femme dans le secteur de la pêche, de sensibiliser la société à la contribution des femmes dans ce secteur, de faciliter les échanges d'expériences et de leur permettre de faire connaître leurs besoins et leurs revendications à tous les niveaux, des administrations locales jusqu'aux institutions européennes;

10.  invite instamment la Commission et les États membres à faciliter l'accès au financement aux organisations de femmes dans le secteur de la pêche, de l'aquaculture et les secteurs connexes, afin qu'elles puissent mettre en œuvre leurs initiatives, consolider leurs organisations et créer des liens avec d'autres organisations de femmes en vue d'échanges d'expériences et de bonnes pratiques;

11.  estime qu'il y a lieu de favoriser et de renforcer la participation effective des femmes aux organes de consultation et aux conseils consultatifs, de décision, représentatifs, régionaux ou confréries, en garantissant leur participation aux processus décisionnels tant dans le secteur public que dans le secteur privé dans les mêmes conditions que les hommes;

Le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) 2013-2020

12.  observe que seul un État membre de l'Union a profité des possibilités offertes par l'axe 4 du Fonds européen pour la pêche pour financer des projets dont les bénéficiaires sont des femmes, et invite instamment les États membres à utiliser les possibilités offertes par le FEAMP pour :
* appliquer le principe d'égalité des chances, tant au niveau de l'élaboration qu'au niveau du développement ou de la mise en œuvre des programmes opérationnels;
* rendre le secteur de la pêche plus accueillant pour les femmes, en le remodelant et en mettant à sa disposition des équipements appropriés (tels que des vestiaires sur les bateaux ou dans les ports);
* aider les associations de femmes, telles que celles qui réparent les filets, celles qui déchargent les embarcations et celles qui emballent les produits de la pêche, et favoriser leur mise en réseau;
* soutenir les projets visant à atténuer les problèmes liés aux conditions de travail des ramasseuses de coquillages à pied, notamment la conciliation de la vie familiale et professionnelle;
* appuyer les projets visant à promouvoir, à diversifier et à valoriser le rôle des femmes dans la pêche et l'aquaculture;
* favoriser l'accès des femmes et des jeunes filles à la formation grâce au financement de formations spécifiques, à l'enseignement professionnel et à la reconnaissance professionnelle de leur activité. À cette fin, les États membres devraient mettre en place des procédures pour l'obtention de certificats professionnels reconnus officiellement et créent des centres de formation pour les métiers habituellement exercés par les femmes des différents groupes;
* assurer aux jeunes femmes des possibilités d'emploi et favoriser la continuité entre les générations, notamment en développant les activités durables pour le milieu marin;
* promouvoir la formation professionnelle, en particulier pour les femmes travaillant dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture, afin d'améliorer leur accès à des postes de direction et à des postes techniques et de gestion qualifiés liés à la pêche et de garantir l'égalité salariale;
* renforcer le rôle des femmes dans la pêche, en particulier en soutenant les activités pratiquées à terre et les activités associées à la pêche, tant au niveau de la production qu'au niveau de la transformation, de la commercialisation et de la vente;
* favoriser les initiatives entrepreneuriales des femmes, notamment, le cas échéant, la diversification économique de certaines activités liées au secteur de la pêche, telles que la muséologie, les traditions culturelles, l'artisanat, la gastronomie et la restauration;
* favoriser les initiatives entrepreneuriales dans des activités distinctes de la pêche dans les zones côtières qui ont subi des pertes d'emplois à la suite de la réforme du secteur de la pêche;

13.  invite instamment les États membres à faciliter l'accès à des prêts à taux réduit permettant de surmonter les difficultés spécifiques rencontrées par les femmes pour financer les projets susceptibles d'être inclus dans les programmes nationaux mis en œuvre dans le cadre du FEAMP;

14.  demande aux États membres de soutenir les initiatives entrepreneuriales de femmes en facilitant l'accès aux microcrédits et en fournissant une information adéquate sur les possibilités de financement;

15.  invite instamment les États membres à prendre des mesures pour développer et moderniser les infrastructures locales, diversifier les activités économiques et améliorer la qualité de la vie dans les régions tributaires de la pêche, notamment celles qui en dépendent entièrement, afin d'assurer leur développement durable, tout en luttant globalement contre la pauvreté, en particulier lorsqu'elle frappe les femmes et les enfants, et en s'efforçant de prévenir la violence contre les femmes et la violence domestique;

16.  rappelle les positions adoptées dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et l'innovation «Horizon 2020» (2014-2020) au sujet de la promotion de la participation des femmes à l'ensemble des activités de recherche, des projets et des disciplines scientifiques, notamment celles qui se consacrent à la connaissance du milieu marin;

17.  demande aux États membres :
* de reconnaître juridiquement le travail des femmes qui contribuent économiquement au maintien de la cellule familiale et de celles qui le font grâce à leur travail, même non rémunéré;
* de garantir des aides aux femmes, en leur accordant des allocations de chômage en cas de cessation forcée (temporaire ou définitive) d'activité, le droit de percevoir une pension de retraite, de concilier vie familiale et vie professionnelle, de prendre un congé de maternité (quel que soit leur statut au sein de leur couple), de bénéficier de la sécurité sociale et de soins de santé gratuits, et de disposer d'une protection face aux risques liés au travail dans le secteur maritime et de la pêche;

18.  considérant que, au paragraphe 28 de sa résolution du 22 novembre 2012 sur la politique commune de la pêche, le Parlement demande que l'Union européenne réclame, au sein de l'OMC, la pénalisation des pays menant des actions discriminant les femmes et, au paragraphe 45 de ladite résolution, que la Commission, lorsqu'elle négocie des accords de pêche, s'efforce d'obtenir des États côtiers qu'ils dédient une partie minimale de l'aide sectorielle au développement accordée à des projets ayant pour objectif la reconnaissance, la promotion et la diversification du rôle des femmes dans le secteur de la pêche, et garantisse l'application du principe de l'égalité de traitement et d'égalité des chances pour les hommes et les femmes, notamment en ce qui concerne la formation et l'accès au financement et aux prêts;

19.  invite instamment la Commission à faire en sorte que la dimension européenne de genre soit ancrée et garantie dans les accords de partenariat économique concernant la pêche;

Règlement de base sur la politique commune de la pêche

20.  exhorte les États membres à veiller à la réalisation des objectifs de la nouvelle politique commune de la pêche relatifs à l'accès aux ressources halieutiques sur la base de critères environnementaux, sociaux et économiques transparents et en tenant compte des principes d'égalité de traitement et des chances entre hommes et femmes;

21.  prie instamment les États membres de reconnaître le statut professionnel des femmes en cas de cessation temporaire d'activité, y compris lors des périodes de repos biologique;

22.  demande à la Commission et aux États membres de veiller au respect de la directive 2010/41/UE afin que les femmes du secteur de la pêche qui travaillent à temps complet ou à temps partiel pour des entreprises familiales ou qui aident leur conjoint ou partenaire, contribuant ainsi à assurer leur propre viabilité économique ainsi que celle de leur famille, ainsi que celles qui travaillent dans ce secteur pour assurer leur subsistance et n'appartiennent à aucune cellule familiale, bénéficient d'un statut légal et de prestations sociales équivalents à ceux des travailleurs indépendants;

o o o

23.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux gouvernements des États membres.

(1)       JO L 180 du 15.7.2010, p. 1.
(2)       Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0040.
(3)       JO C 353 E du 3.12.2013, p. 212.
(4)       JO C 286 E du 23.11.2006, p. 519.
(5)       Textes adoptés de cette date, P7_TA(2012)0460.
(6)       Textes adoptés de cette date, P7_TA(2012)0461.
(7)       JO C 353 E du 3.12.2013, p. 104.

Dernière mise à jour: 7 mars 2014

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Le 10 mars 2014

Justice économique, sociale, écologique et de genre pour un développement durable

Une déclaration féministe pour l’après 2015. Tandis que les Nations Unies prennent des décisions concernant le développement international de l’après 2015, des femmes de tous âges, de toutes identités, de toutes ethnicités, de toutes les cultures, dans tous les secteurs et régions, se mobilisent pour agir en faveur de la justice écologique, économique, culturelle, sociale, et de genre, pour le développement durable et une paix inclusive. Nous aspirons à des modifications fondamentales et transformationnelles des structures du modèle actuel de développement néolibéral, extractif et exclusif qui perpétue les inégalités de richesse, de pouvoir et de ressources entre les pays, au sein même des pays, et entre les hommes et les femmes. Nous remettons en question le paradigme sécuritaire actuel qui consiste à augmenter les investissements dans le complexe militaro-industriel et qui contribue aux conflits violents entre et au sein des pays.

Source : Social Watch

Nous exigeons une transformation paradigmatique du modèle économique actuel de développement néolibéral qui choisit le profit avant les personnes et qui exacerbe les inégalités, les guerres et les conflits, le militarisme, le patriarcat, la dégradation de l’environnement et le changement climatique. Par contre, nous demandons des modèles économiques et des approches du développement qui soient profondément ancrés dans les principes des droits humains et de la durabilité environnementale, qui tiennent compte des inégalités entre les populations et les états, et qui rééquilibrent les relations de pouvoir en faveur de la justice, pour engendrer la paix, l’égalité, l’autonomie des peuples et préserver la planète.

Ce nouveau processus transformationnel exige la redistribution des charges injustes et inéquitables qui pèsent sur les femmes et les filles lorsqu’elles soutiennent les économies et le bien-être de la société, fardeaux qui s’alourdissent dans des situations de violence et de conflits et durant les crises économiques et écologiques. Cette mutation doit également se préoccuper du type de croissance provoqué et veiller à ce que cette croissance garantisse le bien-être et la durabilité pour tous. Ces transformations doivent également affronter les facteurs interconnectés et structurels des inégalités, et les multiples formes de discrimination basées sur le genre, l’âge, les classes, la caste, la race, l’ethnie, le lieu de naissance, les antécédents religieux ou culturels, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, la santé et les capacités.

Un modèle de développement qui fonctionnera pour les femmes et les filles de tous les âges et de toutes les identités devra être profondément ancré dans l’ensemble des obligations en matière de droits de l’homme, dans les principes de non-régression, de réalisation progressive et dans les Principes de Rio, incluant des responsabilités communes, mais différenciées, ainsi que le respect des Obligations extraterritoriales des États telles qu’elles sont énoncées dans les Principes de Maastricht. Ce modèle exige également que les états aient ratifié et appliqué les traités internationaux relatifs aux droits de la personne, notamment relatifs aux droits économiques et sociaux et aux droits humains des femmes, et aux accords multilatéraux sur l’environnement. Tout cadre de développement durable post-2015 doit avoir pour objectif l’inclusion sociale et l’équité, la sécurité humaine et la paix durable, le respect des droits de la personne pour tous et l’égalité entre les sexes. Cela exige d’examiner le paradigme actuel sécuritaire consistant à investir lourdement dans une paix et une sécurité militarisées ; de respecter la laïcité de l’État lorsqu’elle est intégrée dans les normes nationales ; d’inverser le modèle actuel de surconsommation et de surproduction pour créer un modèle de consommation, de production et de distribution durables ; et de garantir un nouveau plan de viabilité écologique qui applique une approche se souciant de la biosphère et qui pratique le respect des frontières planétaires et la durabilité écologique.

Nous visons à susciter un engagement politique et à surmonter les obstacles financiers et juridiques qui entravent le développement durable, la paix, ainsi que le respect, et la protection des droits humains de la femme. Nous exhortons la communauté internationale à prendre des mesures contre les conditions sociales, économiques et environnementales injustes qui perpétuent les conflits armés, la violence et la discrimination, la féminisation de la pauvreté, la marchandisation des ressources naturelles, et les menaces pesant sur la souveraineté alimentaire qui empêchent les femmes et les filles d’acquérir leur autonomie, de jouir de leurs droits humains et de parvenir à l’égalité des genres. Spécifiquement, nous demandons que :

1. L’égalité des genres soit transversale et que tous les objectifs et stratégies de développement durable la prennent en considération, qu’elle devienne un objectif spécifique pour parvenir à l’égalité des genres, à l’autonomisation des femmes et à la pleine réalisation des droits humains de la femme, contribuant ainsi à la redistribution du pouvoir, des richesses et des ressources, ainsi que de l’information et des technologies. Nous demandons que cessent toutes les formes de violence basées sur le genre, notamment les mariages précoces et forcés, les crimes d’honneur et la violence sexuelle, surtout pendant et après les conflits et les catastrophes naturelles ; nous appelons à la suppression de toutes les formes de discrimination basées sur le genre, l’orientation sexuelle, la race, l’ethnie, les antécédents culturels et la santé ; il faut que les femmes se voient garantir une participation équitable, pleine et efficace à tous les niveaux de la vie publique et politique, dans le domaine des responsabilités et des prises de décisions, y compris dans les processus de paix ; nous demandons que l’on garantisse aux femmes des droits égaux à la propriété foncière ; que l’on garantisse à toutes les femmes l’usage autonome de leur sexualité, de leur corps et de leurs droits génésiques sans stigmatisation, discrimination ou violence ; nous demandons que l’on collecte des données et des statistiques, ventilées, entre autres, par genre, âge, race, ethnie, lieu, invalidité, et statut socioéconomique, afin de guider la formulation, le suivi et l’évaluation des lois, des politiques et des programmes.

2. Les objectifs concernant l’éducation doivent tous inclure des moyens spécifiques pour lutter contre les pratiques sociales, culturelles et communautaires qui empêchent les filles, les adolescentes et les femmes durant leur existence d’accéder à l’éducation, de terminer leurs études et de poursuivre un apprentissage continu ; doivent tous créer des environnements favorables à l’éducation des filles, où la sécurité, l’hygiène et la mobilité sont assurées ; doivent permettre à tous les enfants d’accéder à une éducation de qualité durant la petite enfance, au cours de l’éducation primaire, secondaire, et de l’enseignement supérieur et doivent éliminer les disparités entre les sexes, en mettant l’accent sur le passage entre le primaire et le secondaire, puis entre le secondaire et l’enseignement supérieur afin que les filles, les adolescentes et les jeunes personnes restent à l’école et terminent leurs études ; doivent fournir une éducation scolaire et extrascolaire afin que toutes les femmes soient au courant de leurs droits humains et qu’elles puissent les exercer ; doivent proposer des programmes complets d’éducation sexuelle qui promeuvent des valeurs telles que le respect des droits humains, la liberté, la non-discrimination, l’égalité des genres, la non-violence et la consolidation de la paix ; doivent élaborer des programmes d’enseignement qui tiennent compte de la parité hommes-femmes et qui éliminent les stéréotypes sexistes, le sexisme, le racisme, l’homophobie et qui offrent une formation aux enseignants afin qu’ils fournissent une éducation impartiale et neutre.

3. Tous les objectifs concernant la santé doivent comprendre : la réalisation du droit au meilleur état de santé possible, notamment à la santé sexuelle et reproductive. Les services de santé doivent être intégrés et complets, exempts de violence, de coercition, de stigmatisation et de discrimination, et doivent mettre l’accent sur l’accès équitable, en particulier pour les adolescents, à la contraception, à la contraception d’urgence, à l’information sur la procréation assistée, aux services de maternité, à l’avortement sécurisé, à la prévention et au traitement des IST et à la prévention, au traitement, et aux soins et au soutien fournis en matière de VIH ; ils doivent également proposer des services aux victimes de la violence dans des situations d’urgence et en cas de conflits armés. Tous les services doivent être accessibles, abordables, acceptables et de qualité. Les nouveaux investissements et stratégies en matière de santé et les objectifs et indicateurs doivent être solidement ancrés dans le respect des droits de l’homme, et ne pas ignorer les droits sexuels et génésiques.

4. Pour assurer une justice économique, nous demandons : un environnement international favorable au développement, tenu de défendre les obligations extraterritoriales qu’ont les États de garantir l’application de politiques financières et macroéconomiques qui respectent les droits économiques et sociaux tels qu’inscrits dans le Traité de Maastricht. Les obligations sont les suivantes : des politiques monétaires, de taux de change, fiscales, commerciales axées sur le développement, des mesures fiscales progressives, un mécanisme de rééchelonnement de la dette souveraine, et l’élimination des traités de commerce et d’investissement qui appauvrissent les nations et les peuples ; la remise en cause des cadres internationaux des droits de propriété intellectuelle ; l’élimination des subventions dommageables ; le renforcement des capacités productives à travers une stratégie d’industrialisation inclusive et durable des différents secteurs économiques en créant des sociétés écologiquement saines et qui produisent moins de carbone ; transformer la division du travail basée sur le genre et garantir la redistribution des travaux payés et non payés, tout en assurant des travaux décents et des salaires corrects pour tous ; l’application d’un plancher universel de protection sociale pour les personnes de tous les âges afin qu’elles puissent accéder aux services de base tels que les soins de santé, les soins des enfants et des personnes âgées, l’éducation, l’alimentation, l’eau, l’assainissement, l’énergie, le logement, l’emploi ; la reconnaissance et la prise en compte de la valeur du travail d’assistance et la protection des droits des travailleurs de la santé tout au long de la chaîne mondiale des soins et l’assurance que les femmes auront un accès équitable aux ressources ; la promotion des transferts de technologie, du financement, du suivi, de l’évaluation et de la recherche dans le domaine de la technologie conformément au principe de précaution ; l’augmentation des financements en faveur de l’égalité des genres et des droits humains des femmes et une réorientation des investissements destinés à l’industrie de la guerre vers la sécurité humaine plutôt que vers la sécurité militarisée.

5. Pour promouvoir la justice écologique, nous demandons : que la santé des écosystèmes et des services écosystémiques soit protégée et régénérée et que la valeur intrinsèque de la nature soit reconnue et respectée ; que la nature ne fasse plus l’objet de marchandisation ; que l’on encourage des modes de consommation et de production sûrs, durables et justes en éliminant les substances et les technologies dangereuses ; que l’on garantisse la souveraineté alimentaire et l’accès à l’eau pour tous, en accordant une attention particulière aux petits exploitants agricoles et aux pêcheurs qui sont souvent des femmes, en tant qu’acteurs économiques clés dont le droit à l’utilisation et à la possession de terres et le droit à l’accès aux forêts, aux pâturages, aux terres de parcours, aux rivières, aux lacs, aux mers et aux océans doivent être protégés à travers des normes juridiquement contraignantes, qui concernent également l’accaparement des terres et des ressources ; que le respect des connaissances uniques des populations autochtones et des communautés locales, y compris des communautés agricoles et côtières soit assuré, et que soit garanti le droit de consentement préalable, libre et informé pour tout projet de développement qui risque d’avoir une incidence sur les terres, les territoires et les ressources que ces communautés possèdent, occupent ou utilisent autrement ; que les problèmes d’inégalité, d’exploitation et de pression subies par les femmes vivant dans la pauvreté dans les communautés urbaines et rurales, soient affrontés en inversant par exemple l’urbanisation rapide et insoutenable afin d’éviter la dégradation des écosystèmes et l’exploitation de ressources qui exacerbe les injustices dans les régions urbaines, périurbaines et rurales. La justice écologique exige le renforcement de la Convention des Nations Unies sur le Droit de la mer, le respect des Principes de Maastricht concernant les obligations extraterritoriales des États et une reconnaissance claire des pertes culturelles et écosystémiques que le changement climatique n’a pu éviter ainsi que des crises auxquelles font face les petits états insulaires en développement – plus particulièrement en renforçant le Mécanisme récent établi par la Convention--cadre des Nations Unies sur les changements climatiques qui régit les pertes et les dommages.

En ce qui concerne la gouvernance et la redevabilité et les moyens de mettre en oeuvre des cadres de développement durable, nous demandons que l’on accorde la priorité aux financements publics plutôt qu’aux partenariats public--privé, que l’on encourage la transparence et la redevabilité dans le cadre des activités du domaine public et privé qui sont liées au développement durable. Le secteur privé est intrinsèquement orienté vers le profit et n’est pas obligé d’investir dans les services sociaux et les biens publics mondiaux. Aujourd’hui trente--sept des 100 plus grandes structures économiques du monde sont des entreprises. Le secteur public – qui a pour rôle essentiel de financer les services sociaux dans le but de lutter contre la pauvreté et de financer les biens publics mondiaux – est donc nécessaire à la mise au point d’une stratégie de financement du développement durable. Tous les budgets publics doivent être transparents, faire l’objet d’un débat public, doivent être sensibles au genre, et affecter les ressources requises à la réalisation de ces priorités. Nous devons garantir la participation significative des femmes à la conception, à la réalisation, au suivi et à l’évaluation des objectifs, des politiques, et des programmes de développement ainsi qu’aux efforts de consolidation de la paix ; il faut protéger les défenseur-e-s des droits humains, garantir leur sécurité et leur non-persécution. Il faut assurer au niveau national un recours utile et une réparation aux femmes dont les droits humains ont été violés. Le suivi et l’évaluation doivent comprendre la présentation par les états de rapports sur leurs obligations soumis au Mécanisme d’examen périodique universel, au CEDAW et à son Protocole facultatif, ainsi qu’à d’autres mécanismes relatifs aux droits de l’homme et conformément aux accords multilatéraux relatifs à l’environnement. Il est essentiel que les acteurs non étatiques, plus particulièrement les sociétés transnationales et les partenariats public--privé respectent les réglementations, pratiquent la redevabilité et la transparence pour que le développement soit durable. La justice sera impossible sans des mécanismes efficaces de gouvernance, qui doivent garantir d’une part le respect, le caractère exécutoire et justiciable de tous les droits humains, et d’autre part assurer l’état de droit et la pleine participation d’une société civile respectueuse de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pour souscrire à cette déclaration, veuillez envoyer un courriel indiquant le nom complet de l’organisation ainsi que le pays où elle est active, à : feministspost2015@gmail.com

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Le 20 Mars 2014

Quand l’égalité des droits favorise la sécurité alimentaire

Combler les inégalités entre les sexes dans l’agriculture est pour beaucoup indispensable dans la lutte contre la pauvreté et le renforcement de la sécurité alimentaire. Le changement climatique aggraverait aussi les conséquences de ces inégalités.

Cliquer Ici pour télécharger le document "Women's land and property rights and the post-2015 development agenda

Source : Irin

« Si nous voulons un développement durable, les thèmes du changement climatique, de l’égalité des sexes et de la sécurité alimentaire doivent aller de pair », a souligné Mary Robinson, ancienne Présidente de la République d’Irlande, actuellement à la tête de la Mary Robinson Foundation - Climate Justice, lors d’un récent colloque d’experts organisé à Rome, à l’occasion de la Journée internationale de la femme.

« Les agriculteurs familiaux sont la cheville ouvrière de la production vivrière mondiale, mais figurent malgré tout parmi les populations les plus vulnérables de la planète », a déclaré à cette occasion José Graziano Da Silva, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

« L’avenir de notre sécurité alimentaire dépend en grande partie de la réalisation de leur potentiel inexploité. Les femmes rurales sont un volet important, non seulement en tant qu’agricultrices, mais aussi pour leur rôle dans la transformation et la préparation des aliments, ainsi que sur les marchés locaux », a-t-il ajouté.

Mais, dans de nombreux pays comme la Tanzanie, le mode d’exploitation des terres est archaïque et exclut toujours les femmes de la propriété foncière. Malgré des lois sévères interdisant cette pratique, les femmes agricultrices sont encore victimes de discrimination.

Asha Ramadhani, une agricultrice du district de Mwanga en Tanzanie, tente d’acquérir un lopin de terre dont elle a désespérément besoin pour accroître sa maigre production de céréales. « C’est un processus difficile et frustrant ; comme je suis une femme, ma demande est traitée comme une faveur et non comme un droit », déplore-t-elle.

À cause des mentalités locales concernant la propriété foncière, il est difficile pour les femmes d’avoir accès aux meilleures terres.

Cette divorcée âgée de 44 ans loue depuis trois ans une ferme d’environ un hectare près du village de Mangio, où elle cultive du maïs, des haricots, des légumes et des patates douces.

Si dans ce village, il est possible de louer une parcelle en échange d’une partie de ses récoltes, Mme Ramadhani a beaucoup de mal à payer le propriétaire à cause du climat sec qui ne lui permet pas d’avoir de bons rendements.

« Mon propriétaire demande un quart de mes récoltes à chaque campagne pour payer la location, mais la sécheresse me complique la tâche », a-t-elle déclaré à IRIN.

En Tanzanie, les femmes ne possèdent que 20 pour cent des terres répertoriées par le droit civil. C’est ce que révèle le profil du pays réalisé par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) concernant le droit de propriété et la gestion des ressources en Tanzanie. Le nombre de terres que possèdent les femmes en vertu du droit coutumier serait beaucoup moins élevé encore.

La loi sur la propriété foncière (Land Act) et la loi sur la propriété foncière dans les villages (Village Land Act) de 1999 régissent les droits fonciers des femmes. La Constitution de la Tanzanie consacre également l’égalité de toutes les personnes.

La loi confère aux femmes le droit d’accès, de propriété et de gestion des terres au même titre que les hommes et leur permet de participer aux prises de décision s’y rattachant.

La section 3 (2) du Land Act, ainsi que du Village Land Act, stipule que les droits de toute femme à acquérir, posséder, utiliser et vendre des terres doivent être respectés dans la même mesure et selon les mêmes conditions que pour les hommes.

Les femmes sont également autorisées à posséder ou occuper des terres collectivement avec d’autres personnes, tout en étant protégées contre le transfert illicite de titres fonciers en cas d’utilisation commune des terres.

Mais la législation n’est pas suffisamment appliquée.

Dans tout le district de Mwanga, les femmes pensent qu’il leur est de plus en plus difficile d’avoir accès à la propriété foncière et aux points d’eau, dans un contexte climatique toujours plus sec.

« La plupart des propriétaires de grandes parcelles de terre sont des hommes ; il n’y a presque [aucune] femme propriétaire terrienne, notamment près des points d’eau », a déclaré à IRIN Mme Ramadhani.

La procédure du village pour accéder à la propriété foncière avantage les hommes, a-t-elle affirmé. « Beaucoup de mes amies ont perdu espoir, car chaque fois qu’elles déposent une demande, elles échouent », a-t-elle ajouté.

Les rares femmes qui arrivent à vaincre la paperasserie se retrouvent avec de petites parcelles qui se trouvent en plus éloignées des points d’eau.

Anna Tibaijuka, ministre du Développement des territoires, de l’habitat et de l’établissement humain en Tanzanie, a déclaré à IRIN que les hommes et les femmes devaient avoir les mêmes droits concernant l’accès à la propriété foncière. Selon elle, « il est important que les gens connaissent leurs droits et qu’ils ne se laissent pas marcher dessus ».

« Comportements discriminatoires »

Yefred Mnyenzi, de l’organisation non gouvernementale (ONG) Haki Ardhi qui milite pour un droit foncier équitable en Tanzanie, a déclaré à IRIN que la plupart des femmes accédaient à la propriété foncière grâce à leurs liens de parenté avec des hommes. Il a ajouté que les filles non mariées, les veuves et les femmes divorcées étaient souvent « brimées » par les hommes de leur famille.

« Dans certains cas, les maris utilisent des titres de propriété pour obtenir des prêts sans en parler à leurs épouses, ce qui conduit à des expulsions et à la perte de leur propriété », a-t-il expliqué.

Le manque de connaissances, le système patriarcal, les stéréotypes sociaux et les traditions archaïques sont parmi les obstacles qui empêchent les femmes de faire valoir leurs droits fonciers en Tanzanie. « L’ensemble de la population doit être suffisamment instruit pour pouvoir comprendre ces problèmes », a déclaré M. Mnyenzi.

« Lorsqu’elles sont mariées, les femmes ont généralement peu, voire aucun droit foncier – il ne leur est pas permis, par exemple, d’ajouter leur nom sur les documents de propriété – et elles ont encore moins de droits à la mort de leur mari », d’après le rapport de l’USAID.

« Le droit coutumier donne la priorité aux hommes ou à des groupes dominés par des hommes en matière de propriété et, par conséquent, la capacité des femmes à réclamer ou à hériter de terres est extrêmement limitée », explique le rapport.

Selon M. Mnyenzi, le gouvernement doit décentraliser l’administration des terres pour permettre aux communautés locales de participer à la prise de décision et de devenir financièrement autonomes. L’État doit également lutter contre les coutumes, les croyances et les comportements discriminatoires.

« Dans les situations où les femmes sont reléguées à un statut inférieur au sein de la société du fait de normes culturelles, il nous faut des systèmes de soutien qui leur permettent de posséder et de gérer des terres sans difficulté », a déclaré à IRIN Mary Lusibi, défenseure des droits de la femme dans le cadre du programme tanzanien de réseau de femmes (TGNP, selon le sigle anglais).

Problème sur tout le continent

De telles pratiques discriminatoires ne se limitent pas seulement à la Tanzanie. Les femmes possèdent moins d’un pour cent des terres sur le continent africain, a souligné William Garvelink, conseiller principal au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS, selon le sigle anglais).

« Si le droit législatif ne fait pas de différence entre les sexes, le droit coutumier prime et celui-ci se fonde sur un régime patriarcal. Il est indispensable de garantir les droits de propriété des femmes pour le développement de l’Afrique », a-t-il déclaré.

Les experts demandent que l’égalité des droits fonciers figure au programme des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) post-2015.

« Le programme de développement post-2015 devrait intégrer des objectifs et des indicateurs relatifs aux droits fonciers, aux ressources naturelles et aux autres avoirs productifs qui incluent explicitement les droits des femmes », ont indiqué dans un communiqué 38 organisations internationales.

Selon un rapport de synthèse de consultations thématiques mondiales des Nations Unies sur le programme de développement post-2015, « garantir le respect des droits fonciers pour les femmes est une stratégie indispensable pour garantir l’égalité des sexes et renforcer la capacité d’agir des femmes dans le monde entier ».

« Il existe un lien évident entre l’inégalité entre les sexes, la pauvreté de la société et l’absence de respect, de protection et de mise en oeuvre de ces droits pour les femmes », ont ensuite expliqué les auteures de ce rapport, Mayra Gomez, de l’ONG Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights (Initiative mondiale pour les droits économiques, sociaux et culturels), et Dr Hein Tran, du Landesa Center for Women's Land Rights (Centre Landesa pour les droits fonciers des femmes).

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Le 16 Mai 2014

Arundhati Roy, à propos des ONG

"Les ONG doivent rendre des comptes à leurs financeurs, et non aux gens avec lesquels elles travaillent," selon Arundhati Roy, militante et écrivain indienne, auteure du roman "Le Dieu des Petits Riens" (Photo Wikipedia)

Source : Crisla

Une analyse décapante du rôle des ONG par l’écrivaine indienne. Si elle évoque le rôle de certaines ONG de développement, 10 ans après, elle peut aussi concerner les ONG environnementalistes qui disposent aujourd’hui de fonds bien plus considérables que les ONG de développement…Cette analyse rejoint celle de Naomi Klein sur les BINGOs, les grandes ONG environnementalistes anglo-saxonnes.

Les mouvements de masse ont à faire face à un second danger, la résistance sur le modèle des ONG. Il serait facile de déformer ce que je vais dire en une mise en cause de toutes les ONG. Ce serait un mensonge. Dans les eaux troubles de la mise en place de fausses ONG, créées soit dans le but de siphonner les subventions ou alors d’éviter les taxes (dans les Etats tels que Bihâr, on les considère comme dot), bien sûr, il y a des ONG qui font un précieux travail. Mais il est important d’envisager le phénomène ONG dans un contexte politique plus large. En Inde, par exemple, le plein essor du financement des ONG a commencé à la fin des années 1980 et dans les années 90. Cela correspondait à l’ouverture du marché indien au néolibéralisme. A ce moment-là, l’Etat indien, conforme aux exigences de l’ajustement structurel, réduisait les fonds de développement rural, pour l’agriculture, l’énergie, les transports et la santé publique. Etant donné que l’Etat abandonnait son rôle traditionnel, les ONG se sont lancées dans le travail sur ces mêmes domaines. La différence, évidemment, c’est que les fonds qui leur sont disponibles représentent une part minuscule de la coupe budgétaire actuelle dans les dépenses publiques.

Les ONG avec le plus de fonds sont financées et mises sous tutelle par des agences d’aide et de développement, qui sont, à leur tour, financées par des gouvernements occidentaux, la Banque mondiale, les Nations Unies et certaines sociétés multinationales. Bien qu’elles ne soient pas exactement les mêmes agences, elles font certainement partie du même grand réseau politique qui supervise le projet néolibéral et réclame une réduction des dépenses gouvernementales dans un premier temps. Pourquoi ces agences devraient-elles financer des ONG ? Pourrait-il juste s’agir d’un élan missionnaire démodé ? De la culpabilité ? C’est un peu plus que ça. Les ONG donnent l’impression qu’elles remplissent la place vacante créée par un Etat en retrait. Et elles le font, mais substantiellement, sans conséquences. Leur vraie contribution est qu’elles désarment le mécontentement politique et distribuent en tant qu’aide ou don généreux ce qui devrait revenir de droit aux gens. Elles altèrent le psychisme public. Elles changent les gens en victimes dépendantes et émoussent les contours de la résistance politique. Les ONG forment une sorte de médiateur entre le dirigeant et le public. Entre l’Empire et ses sujets. Elles sont devenues les arbitres, les interprètes, les médiatrices. A long terme, les ONG doivent rendre des comptes à leurs financeurs, et non aux gens avec lesquels elles travaillent. Elles sont ce que les botanistes appellent des espèces indicatrices. C’est presque comme si, plus le néolibéralisme engendre de la dévastation, plus l’explosion des ONG est importante. Rien ne l’illustre de façon plus émouvante que le phénomène des Etats-Unis s’apprêtant à envahir un pays et simultanément préparant les ONG à rentrer et nettoyer les dégâts. Afin de s’assurer que leur financement n’est pas compromis, et que les gouvernements des pays où ils travaillent leur permettront de fonctionner, les ONG doivent présenter leur travail dans un cadre superficiel, plus ou moins coupé de tout contexte politique ou historique, dans tous les cas, d’un contexte historique et politique inopportun. Des rapports apolitiques (et donc, en fait, extrêmement politiques) sur la misère des pays pauvres et les zones de guerre font finalement paraître les gens (noirs) de ces pays (noirs) comme des victimes compulsives. Encore un Indien mal nourri, un autre Ethiopien crevant de faim, un autre Afghan d’un camp de réfugié, un autre Soudanais mutilé … nécessitant l’aide d’un homme blanc. Involontairement, ils renforcent les stéréotypes racistes et réaffirment les exploits, le réconfort et la compassion (le « qui aime bien châtie bien ») de la civilisation occidentale. Ils sont les missionnaires laïques du monde moderne.

Eventuellement – sur une plus petite échelle, mais plus insidieusement – le capital disponible aux ONG joue le même rôle dans les politiques alternatives que les capitaux spéculatifs qui rentrent et sortent des économies des pays pauvres. Ça commence par dicter le programme. Ça change la confrontation en négociation, ça dépolitise la résistance. Cela interfère avec les mouvements populaires locaux qui ont traditionnellement été autonomes. Les ONG ont des fonds qui peuvent employer des locaux qui pourraient autrement être militants dans les mouvements de résistance, mais peuvent désormais sentir qu’ils font quelque chose de bien, immédiat et créatif (en gagnant de l’argent en même temps). Une vraie résistance politique n’offre pas de tels raccourcis. La politique sur le mode ONG menace de changer la résistance en un travail de bureau avec des salariés aux bonnes manières, polis et raisonnables, au travail de 9h à 17h. Avec quelques avantages en plus. La vraie résistance a de réelles conséquences. Et pas de salaire...

Extrait d’une conférence d’Arundhati ROY aux Etats-Unis en 2004.
Publié par http://socialistworker.org/2004-2/510/510_06_Roy.shtml

Repris par Development Industry, Raza Rumi |14 avril 2009.

Traduction : Joana Neves, Mai 2014

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