En Islande, le poisson et la baleine vont payer !

En matière de gestion des pêcheries, l’Islande est souvent prise comme modèle depuis que ce pays applique les Quotas Individuels Transférables (QIT). En réalité, il s’agit d’un modèle à ne pas suivre. La crise économique qui frappe actuellement le pays, met à jour des dysfonctionnements très graves dans le secteur de la pêche, activité clé puisque représentant 60% des recettes d’exportation.

Démonstration à partir du cabillaud, la pêcherie la plus importante du pays avec près de 40% du chiffre d’affaires des captures totales.

L’échec de la gestion par QIT

Alors que dans les eaux communautaires (européennes) et en mer de Barents, les quotas de cabillaud sont en augmentation respectivement de 30% et 20% pour 2009, en Islande pourtant montrée comme l’exemple à suivre, le quota de cabillaud accuse une nouvelle diminution. Il aurait même été en forte baisse sans l’intervention des sociétés de pêche auprès du gouvernement avant sa démission en janvier 2009. Avec la crise qui secoue le pays, les grands armements à la pêche sont aux abois, ils ont besoin de liquidités pour éponger leurs dettes contractées auprès de la banque « maritime » Glitnir qui a été nationalisée en octobre 2008 après sa faillite. Contre l’avis des scientifiques, on a donc ajouté 30 000 tonnes de cabillaud aux 130 000 tonnes fixées au départ pour l’année 2009.


Capture de cabillaud dans les eaux islandaises depuis 1950 (Source : ICES)

La mise en place des Quotas Individuels Transférables (QIT) en 1991 n’a pas permis de retrouver les captures de cabillaud d’antan. Les débarquements se situaient dans une fourchette de 300 000 à 500 000 tonnes pour la période comprise entre les années 50 et la fin des années 70 ; c'est une période pendant laquelle les flottilles étrangères avaient accès aux eaux islandaises.

En 1983, l’Islande met en place un premier système de gestion par quota qui maintient les captures entre 300 000 et 400 000 tonnes. En 1991, le pays adopte les QIT et depuis les captures montrent une forte tendance à la baisse. Elles sont passées de plus de 300 000 tonnes en 1991, à près de 200 000 tonnes en 2000 puis 130 000 tonnes (+ 30 000 tonnes de "cadeaux") en 2009.

Avec les QIT, disparition des communautés littorales et des pêcheurs artisanaux

Outre l'échec de la gestion des pêcheries, les QIT ont eu une incidence énorme sur l’économie des pêches avec la concentration de l’activité autour de quelques grands armements.

Reprenons les constats socio-économiques de l’halieute, Jean-Michel le RY :
  • le système des QIT – vendus aux enchères – a entraîné une spéculation folle entre armateurs, soutenus à fond par leurs banques (dont on a parlé quelque peu ces mois derniers… !),
  • le système des quotas ne fonctionnant pas – captures régulièrement en baisse – les armateurs ne pouvaient pas rentabiliser l’achat surévalué de leurs QIT,
  • certains choisissaient la fuite en avant en continuant à s’endetter pour acheter des QIT supplémentaires, au nom du principe « et s’il n’en reste qu’un… »,
  • d’autres ne trouvaient une solution que dans la fraude : entre poisson entier, mis en filets, « flaqué », congelé, salé, séché, exporté sous un autre nom…tous les moyens étaient bons pour pêcher plus que les quantités autorisées et paraître respecter les limites établies pour le cabillaud,
  • par ailleurs, le système de vente des QIT était un système « à cliquet » qui permettait à un armateur industriel d’acheter des QIT de la pêche artisanale, mais pas l’inverse…de ce fait, de plus en plus de pêcheurs artisans devenaient salariés des armements de pêche industrielle ou quittaient le métier.

Des villages côtiers et isolés se sont vidés complètement de leurs habitants qui, autrefois, ne vivaient que de la pêche artisanale.

Devant l'ampleur du phénomène, et ne trouvant aucun soutien dans leur propre pays, deux pêcheurs sont allés devant le Comité des Nations Unies aux droits de l'homme pour faire valoir leurs droits ancestraux en matière de pêche (Source : Fishupdate).

Les poissons, les baleines et les concombres vont payer les dettes

Suivons le fil de l'actualité concernant l'Islande. Le pays puise dans ses ressources marines pour rembourser les dettes. Quota ou pas quota tout est bon à vendre.

Le 23 octobre 2008 : Après le déclenchement de la crise financière et la faillite des 3 grandes banques islandaises, "Fishupdate" titre : L'Islande n'augmentera pas ses quotas de pêche (ndlr cabillaud) pour aider le pays à surmonter la crise économique comme le demandent les sociétés de pêche.

Le 14 décembre 2008 : Revirement, IceNews titre : Bonnes et mauvaises nouvelles pour les pêcheurs islandais. La bonne nouvelle est l’augmentation des quotas de cabillaud (ndlr 30 000 tonnes), alors que la mauvaise est la maladie constatée sur les stocks de hareng.

Le 21 janvier 2009 : La Chine importe des concombres de mer depuis l’Islande, première livraison de décembre au prix de 53$ le kg (source : SeafoodSource).

Le 29 janvier 2009 : l'Islande décide d'intensifier la chasse à la baleine, la capture annuelle passant de 49 à 250 roquals (Source : Fishupdate).

Fin janvier 2009 : Après de nombreux licenciements, notamment dans la pêche, la population gronde et le pays connaît les manifestations les plus importantes de son histoire. Le gouvernement démissionne après avoir distribué ses cadeaux en poisson....

Il est probable que des scandales vont être mis à jour comme celui des quotas islandais "hypothéqués outremer" : Il semble que, suite à la faillite de la banque Glitnir en Islande, des quotas de pêche, évalués à 161 millions d'US$ et 241 millions d'US$ et appartenant à de grandes compagnies islandaises, aient été donnés en hypothèque à des banques étrangères. Or, d'après la loi islandaise, un étranger ne peut pas posséder de quotas de pêche islandais. Si la propriété d'un quota de pêche tombe dans des mains étrangères, le propriétaire n'a pas le droit de pêcher dans les eaux islandaises et doit revendre son quota dans un délai de 12 mois. (Source : Fishing News International, février 2009 / revue de presse du Collectif Pêche et Développement)

Philippe FAVRELIERE

Autres articles :

Pour aller plus loin....

Exemple d’une société de pêche islandaise qui capture plus de 150.000 tonnes de poisson chaque année : HB Grandi

Point de vue décalé sur la pêche islandaise, cliquer Ici

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Commentaires ajoutés :
  • le 4 février 2008 :
Le nouveau ministre de l'agriculture et de la pêche, Steingrímur J Sigfússon, a annoncé qu'il annulait la décision de son prédécesseur d'augmenter le quota de cabillaud de 30 000 tonnes et d'intensifier la chasse à la baleine. (Source : InterSeafood.com)
  • le 10 mars 2009 :
En fait, le quota de cabillaud de 30000 tonnes et la chasse à la baleine sont maintenus.
Le fait majeur de l'année 2008 est la diminution de la part des produits de la mer dans les exportations islandaises ; elle n'a jamais été aussi basse. "La composition des exportations est caractérisée par le fait que, pour la première fois depuis 1862 (année où l'on commença à publier des statistiques à ce sujet), la part des produits manufacturés (aluminium en tête) dépasse la moitié des ventes islandaises à l'extérieur. Avec 52,1 % du total, elle surpasse nettement celle des produits de la mer, évaluée à 36,6 % (la proportion la plus faible depuis 1865)". (Ambassade d'Islande)
  • le 21 avril 2009 :
L'Islande se gave de maquereauL'économie islandaise a pris une sacrée claque après l'effondrement des marchés boursiers et les finances du pays sont exangues. C'est sans doute pour cette raison que les Islandais ont décidé de s'octroyer, unilatéralement, un énorme quota de maquereau de 112 000 tonnes pour l'année 2009."Une ponction d'une telle ampleur revient à saper complètement les efforts de gestion menés depuis 1999 par l'Union européenne, la Norvège et les îles Féroé." Mais l'Islande ne semble pas décidée à jouer collectif. (Fanny Brun du Collectif Pêche et Développement d’après Philippe Urvois, Le Marin, 10 avril 2009)
  • le 13 mai 2009
Les exportations des produits de la mer islandaises ont augmenté en 2008 (SeafoodSource)
The country’s seafood exports reached 696.9 metric tons last year, up 12.5 percent from 2007. They were valued at ISK 171.3 billion (USD 761.3 million, EUR 558.7 million), up 34.3 percent from 2007.
In terms of quantity, frozen products represented about 43 percent of total seafood exports in 2008, followed by fishmeal and fish oil (29 percent), fresh products (16 percent), salted products (5.5 percent) and dried products (less than 2 percent).
Among Iceland’s top seafood exports were herring (183.6 million metric tons), cod (88.3 million metric tons), capelin (77.2 million metric tons), haddock (53.1 million metric tons), redfish (47.4 million metric tons) and saithe (30 million metric tons).
The United Kingdom, the Netherlands, Norway, Spain, the United States and Japan were among the top destinations of Icelandic seafood.
  • le 24 juillet 2009 : l'entrée dans l'UE est critiquée par la Fédération des armateurs de bateaux de pêche d'Islande mais pas par les pêcheurs artisanaux
Islande/UE: la presse salue le vote, pêcheurs et agriculteurs critiques (Marine Marchande)REYKJAVIK, 17 juil 2009 (AFP) - Les deux principaux quotidiens islandais ont salué vendredi le vote du Parlement autorisant le gouvernement à négocier son adhésion à l'Union européenne mais les secteurs de la pêche et de l'agriculture ont renouvelé leur opposition à cette candidature. Pour l'éditorialiste du journal libéral Morgunbladid, l'adhésion à l'UE favorisera "la résurrection de l'économie islandaise" tandis que pour l'autre quotidien de l'île, Frettabladid, ce vote donne de l'"espoir pour des temps meilleurs". "C'est le début d'un processus long et ardu dans une question controversée", commente Morgunbladid. L'autre quotidien libéral, Frettabladid, dans un éditorial intitulé "le futur et le passé", estime que "l'Islande d'hier et l'Islande de demain s'affrontent". Ainsi, souligne-t-il, le Syndicat des agriculteurs et la Fédération des armateurs de bateaux de pêche d'Islande regrettent le vote tandis que la Confédération des syndicats s'en réjouit.... Suite sur Marine Marchande

La candidature de l'Islande à l'UE promet un bras de fer sur la pêche (AFP)
L'Islande, qui a déposé formellement jeudi sa candidature d'adhésion à l'Union européenne, espère devenir membre d'ici 2012, mais les négociations pourraient s'avérer plus compliquées que prévu sur les dossiers très sensibles de l'agriculture et surtout de la pêche. Le ministre islandais des Affaires étrangères Össur Skarphedinsson a remis la demande islandaise à son homologue suédois Carl Bildt, dont le pays préside l'Union depuis le 1er juillet, lors d'une cérémonie à Stockholm. L'Islande, membre de l'espace Schengen et de l'Espace économique européen, applique déjà près de trois quarts des directives européennes, ce qui devrait accélérer le processus. Mais le ministre islandais a reconnu que les négociations pourraient être plus compliquées.... Suite AFP

Pour des informations complémentaires :


En juillet dernier, le Ministre islandais des Affaires étrangères a déclaré a propos de la pêche, lors de la présentation de la candidature de l’Islande à l’Union européenne (UE), que son pays « ne demanderait pas de dérogations, car un accord est possible sur la base des règles existantes de la politique commune de pêche. Un règlement sur la "stabilité relative" prévoit que seuls peuvent avoir accès à une zone de pêche les pêcheurs ayant coutume d'officier dans cette zone »1.

La candidature de l’Islande coïncide avec le lancement d’un nouveau processus de réforme de la Politique Commune de la Pêche (PCP). Une nouvelle vision de la PCP à l’horizon 2020 a été proposée par la Commission européenne dans un Livre vert adopté en avril 20092 afin de lancer un débat sur la base duquel elle fera de nouvelles propositions de réforme de la PCP vers la fin de l’année 2010.

Ce Livre vert de la Commission indique qu’ « il est important de se poser la question du maintien de la stabilité relative dans sa forme actuelle. On pourrait la remplacer par un système plus souple, comme l’allocation de droits de pêche ».

La place de la stabilité relative en tant qu’élément d’équilibre de la PCP, avait déjà été examinée par la Commission dans le Livre vert pour la réforme de 2002 qui notait que « En l'état actuel des choses, la Commission ne voit aucune solution de rechange qui puisse donner d'aussi bons résultats que le principe de la stabilité relative et que lorsque les problèmes structurels auront été traités et que la situation économique et sociale de ce secteur sera devenue plus stable il sera peut-être envisageable de remettre en cause la nécessité de maintenir le principe de la stabilité relative et de permettre aux forces du marché de s'exercer de la même manière dans ce secteur que dans le reste de l'économie de l'UE »3. Elle répondait ainsi négativement, à une suggestion faite par le Parlement Européen4, lors des travaux préparatoires de cette réforme, qui s’était prononcé pour l’introduction d’un système de répartition des droits de pêche entre les pêcheurs, dans le cadre de la stabilité relative, tout en préconisant une transférabilité des droits de pêche (d’un Etat membre (EM) à l’autre ?) permettant au secteur de s’adapter en douceur.

Le système d’allocation des droits de pêche ou de répartition de ces droits entre les pêcheurs, lorsqu’ils sont transférables, est le plus souvent désigné par l’expression de « quotas individuels transférables » (QIT)….. Suite….

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  • Le 27 octobre 2010
Icelandic Group, le géant islandais vise l’écolabel MSC

L’islandais « Icelandic Group » fait partie des 5 plus grandes sociétés de pêche en Europe (top 10 dans le monde). La société a entamé un processus d’éco-certification MSC de ses pêcheries de cabillaud et d’églefin. Cette société regroupe 35% des quotas de captures islandais. L’Islande qui est le 11e exportateur mondial en valeur, a fixé un total autorisé des captures annuelles de 160.000 tonnes de cabillaud et 50.000 tonnes d'aiglefin.

En entrant dans le processus d'évaluation MSC, le groupe islandais vise à renforcer sa compétitivité sur le marché international en s'adaptant aux nouvelles tendances du marché - Fournir à ses clients du poisson issu d’une pêcherie bien gérée et durable. Source : Icelandic Group begins MSC certification process (Fis)

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Le 12 novembre 2010 : vers un rééquilibrage des quotas

Islande : Ministre de la pêche augmente les TAC pour aider les villages de pêche
Le ministre islandais de la Pêche, Jon Bjarnason, a annoncé la semaine dernière une augmentation du TAC de poisson de fond de 12.000 tonnes. Cette quantité peut être intégrée dans la législation en vigueur de la pêche. Cette quantité sera distribué aux villes et villages de pêche sur la côte. Les récepteurs les plus probables: Flateyri (NW), Arskogssandur (N), Vopnafjordur (E), Stodvarfjordur (E), Olafsvik (W), Grundarfjordur (W). Condition : Les prises doivent être débarquées et transformées dans la communauté qui reçoit le TAC. Source :megafishnet en référence à Iceland Seafood International.

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Le 26 juin 2011


L'Islande entre lundi dans le vif des négociations d'adhésion à l'UE avec le différend sur la pêche comme seul véritable obstacle sur un parcours jusqu'ici sans encombre. Mais la principale menace contre ce projet d'union lancé il y a deux ans par le gouvernement de gauche pourrait venir des Islandais eux-mêmes qui auront le dernier mot par référendum: ils sont majoritairement opposés à l'entrée dans l'Europe selon les sondages.

Lorsque s'ouvrira lundi à Bruxelles la conférence ministérielle d'adhésion, la voie de l'UE sera pratiquement libre pour Reykjavik, estime le chef négociateur islandais Stefan Haukur Johannesson. "Le processus de +screening+ (l'examen du degré d'harmonisation des lois islandaises avec les lois européennes, ndlr) a confirmé ce que nous savions: l'Islande est très bien préparée à ces discussions d'adhésion et les questions devant être négociées sont peu nombreuses", a-t-il assuré à l'AFP.

Mais la plupart des observateurs estiment que la politique de la pêche de l'Islande, une activité vitale pour cette île de l'Atlantique Nord et ses 320.000 habitants, peut devenir un obstacle majeur. L'Islande est brouillée avec l'Union sur la question des droits de pêche illustrée notamment par "la guerre du maquereau", conflit né de la décision unilatérale islandaise d'augmenter considérablement ses quotas de maquereaux. L'île est aussi en conflit avec l'UE sur la question de la chasse à la baleine. "L'Islande est sans doute une petite nation mais elle est un géant lorsqu'il s'agit de pêche", affirme le député Gauche-Vert Arni Thor Sigurthsson qui préside la commission des affaires étrangères du parlement.

"Si l'Islande devait rejoindre l'Union, elle permettrait à l'UE d'augmenter de 50% ses ressources provenant de la pêche", dit-il en soulignant qu' "il est de la plus haute importance pour l'Islande qu'elle obtienne un juste traitement dans cette affaire". Pour que les Islandais votent oui à l'adhédion "l'Islande devra être autorisée à gérer sa pêche de façon indépendante", estime Baldur Thorhallsson, analyste politique à l'Université d'Islande.

Une autre pierre d'achoppement pour Reykjavik sur le chemin de l'UE risque d'être le contentieux financier de Londres et La Haye avec l'Islande après la faillite Icesave.....

L'opposition à l'UE demeure vive dans l'île où le dernier sondage montre que 57,3% des Islandais sont toujours contre l'adhésion de leur pays à l'UE.

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Le 12 juillet 2011


L’information devrait en étonner plus d’un chez nos voisins britanniques. Selon une enquête révélée par nos confrères de The Ecologist, manger des fish & chips favoriserait… la chasse à la baleine en Islande !

C’est en fait la provenance du poisson utilisé qui pose problème, l’un des mareyeurs les plus importants d’outre-Manche, Warners Fish Merchants Ltd. (qui fournit pas moins de 10 000 établissements britanniques), s’approvisionnant chez HB Grandi, l’une des entreprises de pêche les plus importantes d’Islande et qui serait étroitement liée à Hvalur, première société de chasse à la baleine d’Islande. Il est avéré qu’HB Grandi lui a loué ses installations pour découper et conditionner de la viande de baleines. Ceci explique très certainement cela : Arni Vilhjalmsson est à la tête des deux sociétés. De même, le vice-président d’HB Grandi Kristjan Loftsson n’est autre que le directeur général de Hvalur.

Selon nos confrères, ces entreprises se servent des revenus de l’exportation de poissons en Europe, notamment en Grande-Bretagne, pour financer la chasse à la baleine. Et pas n’importe laquelle : la cible préférée d’Hvalur n’est autre que le rorqual commun, le deuxième plus grand animal sur Terre après la baleine bleue, une espèce en voie de disparition....

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Le 8 Mai 2014

Islande. Les baleines trouvent une bonne société


Illustration : Copie d'écran de dontbuyfromicelandicwhalers.com

Des affiches portant l'inscription "Savez-vous qui a attrapé vos produits de la mer?" apparaissent maintenant sur les bus, trains et autres endroits à Boston. Elles font partie d'une campagne organisée par une coalition de groupes américains de défense de l’environnement.

Source : IPS par Lowana Veal - Reykjavik, Islande, 23 avr

La campagne appelée 'Whales Need Us' (Les baleines ont besoin de nous) vise à attirer l'attention sur les liens entre les baleines islandaises et les poissons vendus aux Etats-Unis

L’image d'une baleine apparaît sur les affiches, ainsi que le nom du site web où les personnes intéressées peuvent trouver plus d'informations.

Les groupes ont décidé de se concentrer sur Boston parce que le lancement de la campagne à la mi-mars coïncidait avec l'ouverture de l’Exposition des produits de la mer d’Amérique du nord au Centre des congrès de Boston. Les partisans ont placé un piquet devant l'étal de 'HB Grandi', l’une des plus grandes entreprises de pêche en Islande, demandant aux curieux d’arrêter de faire le commerce avec l’entreprise à cause de ses liens avec la pêche à la baleine.

Cette exposition est le plus grand événement commercial de produits de la mer en Amérique du nord.

Au début de la manifestation, les consommateurs de poissons ont été invités à demander à leurs détaillants et restaurants locaux de vérifier que leurs produits de la mer ne proviennent pas d'une source liée à la pêches à la baleine de l’Islande.

"La campagne a pris contact avec des détaillants, grossistes et l'industrie des services alimentaires à travers les Etats-Unis pour leur faire savoir que les consommateurs américains ne veulent pas acheter des produits de la mer provenant des baleiniers, et pour solliciter leur aide", déclare Susan Millward, directrice exécutive de l'Institut du bien-être des animaux, l'une des organisations derrière la campagne 'Les baleines ont besoin de nous'.

Le 18 mars, le dernier jour de l'exposition de trois jours, 'High Liner Foods' (HLF), une entreprise américano-canadienne de commercialisation de produits de la mer, a annoncé qu'elle cesserait d’avoir des relations commerciales avec 'HB Grandi' en raison de ses liens avec la pêche à la baleine. Elle a des relations commerciales avec cette entreprise islandaise depuis octobre 2013.

Depuis la fin de l'exposition, les sociétés américaines 'Trader Joe's' et 'Whole Foods Market' ont rompu les liens avec 'Legacy Seafoods', une autre société basée à Rhode Island, en Nouvelle- Angleterre, qui importe auprès de 'HB Grandi' des quantités importantes de poissons.

HLF dit qu'elle n'a pas de contrats existants en suspens avec 'HB Grandi', et s’est engagée à ne pas conclure de nouveaux contrats avec la société jusqu'à ce qu'elle renonce totalement à son implication et sont intérêt dans la pêche à la baleine.

"Même si la politique de HLF est stricte sur le fait de ne pas faire des affaires avec des fournisseurs directement impliqués dans la pêche à la baleine, elle n'a rien à faire avec les personnes ou actionnaires de 'HB Grandi'. Nous n'avons aucun contrôle sur la propriété des entreprises privées ou publiques dans la base des fournisseurs de HLF", souligne à IPS, Elvar Einarsson de la division d'approvisionnement de 'High Liner'.

A la fin de 2011, 'High Liner' a racheté les activités de la société 'Icelandic Group' aux Etats-Unis et en Asie. 'Icelandic Group' a également convenu d'un accord de licence sur sept ans avec HLF pour l'utilisation de la marque 'Icelandic Seafood' dans les pays d'Amérique du nord jusqu'en 2018.

"Pour HLF, la commercialisation et la vente de produits de la mer provenant d'Islande sous la marque 'Icelandic Seafood' constituent une partie importante de notre activité. Il n'y aura pas de changement sur les approvisionnements de HLF auprès de ses autres fournisseurs islandais et on espère que la situation de 'HB Grandi' changera de sorte qu'ils soient en mesure de devenir l'un des fournisseurs de HLF à nouveau", déclare Einarsson.

En septembre 2013, Kristjan Loftsson de Hvalur, une société baleinière, augmenté les parts de sa famille dans 'HB Grandi' de 10,2 pour cent à 14,9 pour cent. Sur le site web de 'HB Grandi', Loftsson est présenté en tant que président du conseil d'administration de la société.

A ce moment, il y avait de toute évidence une certaine inquiétude par rapport aux répercussions que cela pourrait avoir. 'Undercurrent', un site web qui traite des activités de pêche, a cité "un acteur de l'industrie islandaise" comme ayant dit: "Hvalur est la seule société baleinière en Islande, mais la pêche à la baleine est de plus en plus une activité controversée. C'est évidemment un risque pour une société qui vend des poissons sauvages que leur propriété est étroitement liée à la pêche à la baleine".

Vilhjalmur Vilhjalmsson, directeur général de 'HB Grandi', a déclaré publiquement qu'il ne parlera pas à la presse sur le commerce de la société avec 'High Liner Foods'. Dans un bref communiqué de presse publié par sa société, il est cité comme ayant déclaré: "Nous sommes d'accord avec la politique du gouvernement sur l'utilisation rationnelle des ressources naturelles et n'avons rien à voir avec les opérations que chaque actionnaire choisit de pratiquer ou de ne pas pratiquer".

Mais Millward souligne qu'ils ne cherchent pas à attaquer les industries de la pêche d’Islande en tant que tel. "Cette campagne n’est en aucun cas une attaque sur l'économie de l'Islande mais [elle] vise uniquement les entreprises liées à la société baleinière Hvalur" explique-t-elle.

En 2011, le président Barack Obama a émis des sanctions diplomatiques sur l'Islande dans le cadre de l'Amendement Pelly. La coalition 'Les baleines ont besoin de nous' a de nouveau fait usage de cet amendement.

"La campagne a également exhorté le public à contacter le président Obama en lui demandant de prendre des mesures ciblées contre les sociétés islandaises liées à la pêche à la baleine en invoquant l'Amendement Pelly, un instrument promulgué par le Congrès américain comme un moyen d’imposer la conformité avec les traités internationaux de conservation", a déclaré Millward à IPS.

Dans une certaine mesure, cette politique a fonctionné. Obama a dit qu'il invoquerait l'Amendement Pelly et engagerait un certain nombre de mesures visant l'Islande. Mais encore une fois, ces mesures semblent être diplomatiques plutôt que des sanctions commerciales, bien qu’elles soient ont plus étendues qu'auparavant.

Par coïncidence, Sigridur Ingibjôrg Ingadottir, une députée islandaise de l’Alliance social- démocrate vient de déposer une proposition au parlement qui appelle à une enquête sur les répercussions économiques et commerciales que la pêche à la baleine aura sur l'Islande.

"L'enquête prendra en compte à la fois les petits rorquals et rorquals communs", a-t-elle indiqué à IPS. "Sommes-nous prêts à sacrifier plus pour avoir moins, alors qu’il y a opposition croissante à la pêche à la baleine et l'Islande est en train d’attraper plus de baleines que ce qui est jugé durable par la CBI [Commission baleinière internationale]?". (FIN/2014)

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